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LE BABIROUSSA
MALE, FEMELLE ET JEUNE.
N o u s avons donné, dans les soixante-quatrième et soixante-septième livraisons,
les figures du Babiroussa mâle adulte, et d’un jeune âgé de sept mois. Nous donnons
aujourd’hui la figure de la femelle, à laquelle nous joindrons ce que nous avons à
dire sur l’espèce en général, et en particulier sur ces trois individus.
Quelques particularités singulières d’organisation que présente cette espèce, naturelle
aux MoluqueSj jointes à quelques assertions singulières répandues à son sujet,
donnaient depuis long-temps aux naturalistes le désir de l’observer eux-mêmes ,
lorsque M. le capitaine Dumont d’Urville en ramena un mâle et une femelle de son
expédition sur la corvette l’Astrolabe, et en fit don à la ménagerie du roi.
La vue de ces animaux montra que l’idée qu’on s’en était faite n’avait rien
d’absolument erroné, car il a suffi de la rectifier relativement à la hauteur des jambes
pour la rendre tout-à-fait exacte. L’erreur, assez légère, qui se trouvait dans cette idée
venait de la traduction littérale de ce nom de Babiroussa, qui en Malais paraît
signifier Cochon-Cerf. On avait auguré de cette signification que le Babiroussa avait
les jambes minces et élevées, et il était difficile d’associer dans la pensée la forme
épaisse et lourde d’un corps de Cochon avec les mouvemens élégans et légers des
Cerfs; ce qui était cause d e là curiosité-fles^naluralistes à voir un animal dont.les
formes contredisaient toutes les analogies. Les analogies ont donc eu raison : le
Babiroussa a les jambes des Cochons comme il en a le corps ; et le nom de Cochon-
Cerf lui aura peut-être plutôt été donné à cause de ses défenses semblables à des cornes
qu’à cause de ses jambes, quoique les unes, pas plus que les autres, ne rappellent
les caractères du Cerf.
Une espèce de Cochon dont les défenses de la mâchoire supérieure se dirigent en
haut, percent la peau du museau et se recourbent en arrière en décrivant une spirale,
dut, de tout temps, attirer l’attention de ceux qui se sont trouves dans le cas
d’observer ces particularités singulières. Et, en effet, quoique cette espèce ne se rencontre
que dans quelques unes des îles du midi de l’Asie, de tres-anciens auteurs
en ont parlé, et on en a depuis long-temps d’assez bonnes figures.
Pline indique incontestablement cette espèce lorsqu?il dit que, dans l’Inde, les
Sangliers ont deux défenses sur le front semblables aux cornes d’un jeune Taureau
(lib. VIII, cap. 52). Et Cosmas-le-Solitaire, qui, comme on sait, avait voyagé dans l’Inde
au commencement du sixième siècle, en donne une tres-passable figure sous le nom
de Cerf-Cochon, dans sa topographie chrétienne, en ajoutant qu’il avait vu cet animal
et en avait mangé (Bec. des Voy. par Thévenot). Pison, dans un article additionnel