S O TOMY S NAMAQU OIS.
recueillir autre chose que les dépouilles de ces petits êtres, dont la vie est si obscure
et si cachée : heureux encore quand ils en prennent de fidèles dessins, comme l’a
fait Delalande, avant que la mort en ait altéré les formes particulières et la physionomie
générale. Enfin quand même on aurait en sa possession ces rongeurs
de petite taille, qui le plus souvent vivent dans des retraites souterraines, et ne
pourvoient à leurs besoins que pendant la nuit, ce serait inutilement qu’on voudrait
en étudier la nature : leur existence est toute d’instinct; la part que l’intelligence
prend à leurs actions est tellement bornée qu’à peine on en aperçoit les
traces. Ce n’est point par elle qu’ils sont destinés à remplir leur rôle sur la terre;
leur instinct seul est chargé de cette tâche; mais l’instinct dépend essentiellement
des conditions pour lequel il a été formé, et hors d’elle il ne se manifeste plus :
c’est un esclavage pour lequel il est fait, comme l’intelligence est faite pour la liberté.
Or les conditions de l’instinct ne peuvent être que rarement reproduites, et dans
tous les cas, pour les reproduire, il faudrait les connaître, c’est-à-dire qu’il faudrait
connaître l’instinct de l’animal auquel elles ont été imposées, ou autrement l’animal
lui-même. Ce n’est donc que très-rarement qu’il nous est possible de nous
étendre sur le naturel des petits quadrupèdes; mais les caractères exacts que nous
en donnons mettront les voyageurs à même de les observer et de compléter plus
tard leur histoire; et c’est ce qu’ils pourront faire quelque jour pour .-l’Otomys namaquois.
Ce rongeur, comme nous l’avons dit plus haut, a tous les caractères du
genre Otomys, et ses caractères spécifiques sont les seuls que nous ayons à décrire.
Sa longueur, du bout du museau à l’origine de la queue, est de quatre pouces
six lignes, et sa queue a trois pouces. Les parties supérieures de son corps sont d’un
gris brun très-foncé, résultant de poils soyeux noirs et de poils laineux annelés de
noir et de fauve. Les uns et les autres sont gris à leur base; toutes les parties inférieures
sont d’un gris clair, et les incisives des deux mâchoires sont divisées antérieurement
par un sillon longitudinal.
C’est pour exprimer ce dernier caractère que je proposerai de désigner dans les
catalogues méthodiques cet Otomys par le nom latin de Bisulcatus.
Octobre 1829.