2 BOUQUETIN DES P YRÉN ÉES.
« leurs têtçs : et tant plus ils ont de raies en leurs cors, et plus leurs cors sont
« longs et plus gros, tant plus vieils sont les Boucç. Us ont grande barbe et sont
« bruns, de poils de Loup et bien velus, et ont une raie noire sur l’eschine et tout
« au long des fesses, et ont le ventre fauve^ les jambes noires et derrière fauve ;
« leurs pieds sont comme des autres Boucs privés ou Chèvres; leurs traces sont
« grosses et grandes; et rondes plus que d’un Cerf; leurs os sont à l’advenant d’un
« Bouc privé et d’une Chièvre, fors qu’ils sont plus gros; ils naissent en mai; la
a Biche sauvage faonne ainsi qu’une Biche Chièvre ou Daine-, mais elle n’a qu’un
« Bouc à la fois, et l’allaite ainsi que fait une Chièvre privée.
« Les Boucs vivent d’herbes, de foings comme les autres bêtes douces... Leurs
« fumées retirent (quand elles sont formées) sur la forme des fumées d’un Bouc
« ou d’une Chièvre privée ; les Boucs vont au rut environ la Toussaint et demeu-
a rent un mois en leurs chaleurs: et puis que leur rut est passé, ils se mettent en
« ardre, et par ensemble descendent les hautes montaignes et rochers où ils au-
« ront demeuré tout l’é té , tant pour la neige que pour ce qu’ils ne trouvent de
« quoi viander là sur, non pas en un pays plain, mais vont vers les pieds des
« montagnes quérir leur vie : et ainsi demeurent jusques vers Pâques, et lors ils
« remontent les plus hautes montagnes qu’ils trouvent, et chacun prend son buisson
« ainsi que font les Cerfs. Les Chièvres alors se départent des Boucs, et vont de-
« meurer près des ruisseaux pour faonner et y demeurer tout le long de l’été ;
« lorsque les Boucs, sont hors d’avec les Chièvres, attendant que le temps de leur
« rut soit venu, ils courent sus aux gens et bestes, et se combattent entre eux ainsi
« que les Cerfs, mais non de telle manière : car ils chantent plus laidement. Le
« Bouc blesse d ’un coup qu’il donne, non pas du bout de la tête, mais du milieu,
« tellement qu’il rompt les bras et les cuisses de ceux qu’il atteint, et encore qu’il
« ne fasse point de plaie, si est-ce que s’il acule un homme contre un arbre ou
« contre terre, il le tuera. Le Bouc est de telle nature, que si un homme, quel-
« que puissant et fort qu’il soit, le frappe d’une barre de fer sur l’eschine, pour
« cela il ne baissera ne ployera l’eschine. Quand il est en rut, il a le col gros à
« merveilles, voire est de telle nature, que encores qu’il tombât de dix toises de haut,
« il ne se ferait aucun mal. »
L ’individu très-jeune que notre Ménagerie a possédé, et qui nous avait été
donné par M. Poilly de Noyon, n’avait encore que deux pieds de hauteur moyenne,
et sa longueur des fesses à la partie antérieure des épaules était de deux pieds
trois pouces. La queue avait quatre pouces, les cornes avaient neuf pouces de
longueur et les deux arêtes antérieures qui finissent par former le caractère des
cornes de cette espèce ne se montraient encore qu’à leur base; tout ce qu’on en
voyait ne présentait encore qu’une arête antérieurement avec trois ou quatre
gros noeuds. Son pelage est d’un cendré-brun sur toutes les parties supérieures, et
il est formé de poils soyeux divisés par larges anneaux bruns et blonds. Une ligne
noire qui naît à la tête et se prolonge le long du dos jusqu’à l’extrémité de la queue,
est coupée au bas du cou par une ligne transverse qui descend jusqu’au milieu des
épaules. Le chanfrein et la partie antérieure des canons sont noirâtres; le ventre
et la face interne des canons à leur partie supérieure sont blancs. Sous les poils
soyeux se trouve une bourre épaisse formée de poils laineux d’une médiocre finesse.
La tristesse et l’immobilité presque continuelles de cet animal n’ont permis de faire
aucune remarque sur son naturel. Il avait été nourri par une Chèvre avec laquelle
il a continué à vivre, sans paraître avoir d’attachement pour elle.
A vril 1833.