ligne médiane qu’une simple tubérosité, médiocrement saillante. Cependant les mâles
qui ont vécu à Londres, et qui étaient, il est vrai, encore jeunes, ne présentaient pas de
troisième corne, mais une simple proéminence à large base, comme notre femelle. La
plupart des têtes osseuses du cabinet d’Anatomie, ne présentent aussi qu’un renflement
ovoïde à la région Jfronto-nasale (i). Je ne saurais donc affirmer, comme
M. Ruppell, que la troisième corne soit véritablement un caractère de sexe.
Quoi qu’il en soit de cette question de la distinction des espèces, nous possédons
maintenant sur l’organisation intime de la Girafe, les renseignements les plus complets.
L ’examen des têtes osseuses a bien fait connaître le mode de formation des cornes.
On sait quelles ne sont pas caduques, et demeurent toujours revêtues de la peau;
mais leur portion solide ou osseuse n’est ni une sorte de végétation annuelle
comme dans les cerfs, ni une portion saillante de l’os frontal comme dans les ruminants
à comes creuses; le noyau osseux qui forme la corne est séparé des os
du crâne par le périoste. Ce n’est qu’à mesure que l’animal grandit et que le noyau
osseux se développe, qu’il s’applique plus intimement au frontal et au pariétal,
qu’il fait peu à peu disparaître la membrane qui le sépare de ces os, et qu’il finit par
s’y souder entièrement. M. Owen a eu l’occasion de disséquer trois des Girafes qui
ont vécu a Londres, et il a consigné le détail de ses observations dans un fort beau mémoire,
imprimé dans le 2* volume des Transactions de la Société Zoologique de
Londres. Chaque appareil d’organes y est décrit avec un grand soin, et cependant l’auteur
n’a point réussi, tant les observations ont besoin d’être multipliées en histoire
naturelle , à décider complètement le point de savoir si la Girafe est pourvue
d une vésicule biliaire, comme les ruminants à cornes creuses, ou si elle en manque
comme les cerfe. Par une exception singulière, que M. Owen attribue à une anomalie
individuelle, et non pas à la différence des sexes, la Girafe femelle qu’il a disséquée,
lui a présenté une vésicule biliaire volumineuse et même bifide, tandis que les
deux maies ne présentaient aucune trace de vésicule. Le résumé du travail anatomique
de M. Owen, c’est que l’ensemble de l ’organisation intérieure de la Girafe la rapproche
des cerfs plus que des autres familles de ruminants.
Quant aux caractères extérieurs de la Girafe, la parfaite fidélité de notre figure
pour les formes et pour les couleurs, nous dispense d’une description minutieuse!
et les fait mieux connaître en un instant que ne le pourraient nos paroles les plus
étudiées. On y retrouve les traits qui ont frappé tous les observateurs : cette tête
fine, ce museau aplati, cette lèvre supérieure mobile et qui déborde l’inférieure
cet oeil grand et fortement recouvert par l ’arcade surcilière, cette grande brièveté du’
tronc comparée a la grande hauteur des membres, cette queue conique à poils ras
terminée par un gros bouquet de longs crins noirs, et enfin cette grande inclinaison
de la ligne dorsale qui tient, non pas comme on l’a cru longtemps, à une inégalité
de longueur entre les membres de devant et ceux de derrière, mais simplement à
la grande hauteur des apophyses épineuses des vertèbres dorsales, et à celle de l’omoplate.
Laspect de la Girafe surprend à la première vue; mais, bien que ses formes
et ses proportions soient en désaccord avec ce que nos yeux sont accoutumés à
considérer comme des conditions de beauté chez les animaux, on ne peut nier qu’il
(1) M. Bt.pp.71 a fail représenter ( f c r i , Tel. 7 ) I. „ojat, de la corne médiane comme aéparé de cdlne pa, un. an.ore, ainai „ne
W m * T O ta .P n e .U I , m. 219) parai! doo.er do
la verre de co Uni. Il affirme aroir eaaminé dans le Muséum de Francfort le crâne même qui a « n i pour le dcaein de l'ourrattc do
nhvsiirc' di,"n ™ I” “1 ™“ ”u l'nuticucc d-uru! sc,ni,laLle suture. La protubérance médiane n’a pas été détachée d’une au,lace épi-
pnysaire, dit-il, mais elle a été sciée pour être conservée dans la peau bourrée.
GIRAFE. 3
n y ait dans son ensemble une sorte de beauté qui lui est propre, et que son aspect
ne cause pas le sentiment d étrangeté qu’en fait naître dans l’esprit la simple description.
Les couleurs de notre animal sont fidèlement reproduites. Le pelage est
dun fond isabelle, sur lequel sont répandues de larges taches fauves irrégulières, et
en général de forme trapézoïdale sur le cou et sur le tronc. Ces taches, plus petites
sur la fesse, y sont un peu disposées en forme de rose ou de roue; sur les joues, sur
les bras jusquau carpe, et sur les cuisses jusqu’au jarret, les taches sont petites et
nombreuses; les oreilles, le bas de la face, le ventre et le bas des jambes sont blancs.
M. Ruppell a donné au maie quil a fait représenter des couleurs plus foncées que
celles de notre animal; les auteurs s’accordent généralement à dire qu’en effet les
couleurs du mâle sont plus foncées que celles de la femelle.
Les anciens avaient déjà reconnu, et l’observation directe a confirmé, que la Girafe
marche 1 amble, cest-à-dire quelle soulève en même temps et porte en avant les
deux membres du même côté, ce qui lui était d’ailleurs commandé par la brièveté du
tronc. Son galop n’est pas moins particulier; dans ce mouvement, qui se fait en élevant
successivement les membres de devant et ceux de derrière, l’animal écarte ses
deux jambes postérieures et les porte en avant des jambes antérieures, de sorte
qu'il y a un moment où les membres antérieurs et postérieurs sont comme croisés
en X . Cette allure est fort rapide ; on assure qu’en liberté les chevaux ne peuvent pas
suivre la Girafe : nous avons souvent vu la nôtre dans les allées du Jardin des Plantes,
prendre le galop dans des mouvements de gaieté, et laisser en quelques bonds
bien loin derrière elle les gardiens qui la conduisaient. Notre Girafe baisse facilement
et volontiers la tête à la hauteur des personnes qui l’approchent; mais quand
elle veut la descendre jusqu’à terre, elle est obligée d’écarter fortement les jambes de
devant, ce qu elle ne fait que lentement et avec précaution. Au reste, en même temps
que la nature a donne à cet animal une taille qui lui permet de se nourrir des branches
des arbres, elle lui a rendu cette pâture facile par la langue si longue et si flexible
dont elle l’a doué. La langue est en effet, pour la Girafe, un véritable organe de préhension,
qui va saisir et amener entre Jes lèvres les parties les plus mobiles du feuillage
: il est curieux de voir avec quelle agilité et quelle adresse notre Girafe fait jouer
autour de ses lèvres, a 1 aide de sa langue, les brins de fourrage ou les petites branches
qu elle détache. M. Owen, qui a disséqué cet organe avec soin, n’a vu de remarquable
dans sa structure, que la disposition fortement sinueuse de ses nerfs, pour se prêter à
ses mouvements d’allongement. Les voyageurs ont remarqué le mutisme de la Girafe :
la notre n a jamais laissé échapper aucun cri ; en Angleterre un des mâles, au moment
de la copulation, a seulement fait entendre un cri semblable à celui du cerf. M. Owen
attribue cette absence de voix a la structure de la glotte, qui reste tou jours entrouverte,
de manière que les cordes vocales ne peuvent pas s’appliquer l’une contre l’autre.
La Girafe femelle de la ménagerie du Muséum donne chaque mois des signes de
chaleur, et 1 espèce paraît pouvoir se reproduire facilement en Europe. La Société
Zoologique de Londres qui a possédé à la fois des mâles et une femelle de même
âge, a pu observer les détails de leur reproduction (Voy. R. Owen, Proceed. Zool.
Soc., 1839, p. 108, et Trans. Zool. S o c ., vol. m, p. 21 ). Le rapprochement, qui
se fait de la même manière que chez le cerf, eut lieu plusieurs fois du 18 mars
au i “ avril i 838. La femelle a porté environ i 5 mois, et a mis bas, le 9 juin i 83g,
un petit vivant. Ce jeune animal avait en naissant les yeux ouverts. Sa peau était
tachetée comme dans l’adulte. Il but au biberon du lait avec avidité, et fit entendre