France, le continent, d'abord les pays commerçants, tels que la Hollande,
avant de ruiner l'Angleterre,,) ne fut pas sévère sur ce. point, de sorte
que la contrebande fut exercée avec succès dans son Royaume.
Le Roi considérait le système, dit continental, comme une idée,
mathématiquement vraie, mais impossible à réaliser parfaitement a).
| Mais il reste cependant toujours encore à prouver, s i , rigoureusement
observé partout, ce système n'aurait pas produit les résultats que l'Empereur
s'en était promis; si l’Angleterre, après quelque temps, ne ée serait
pas vue contrainte, malgré e lle , de céder, comme doit céder une v ille ,
assiégée de tout parts et menacée de famine, et s’il n'aurait pu dans ce
ca s, rendre à l'Europe, le bonheur inappréciable d'un retour à la paix
générale.
Le peu de sévérité du Roi à l'égard du blocus, provoqua le mécontentement
de l'Empereur. Celui-ci ayant vainement employé les ordres
et les menaces pour déterminer son frère à faire observer plus rigoureusement
le système, ferma ses douanes au commerce hollandais, et
voyant qu'il ne pouvait parvenir à empêcher les Hollandais de se livrer
à la contrebande, conçut le projet de réunir la Hollande à son Empire,
à moins qu'on ne lui donnât pleine satisfaction, ainsi qu'on lé verra par
les pièces suivantes.
lett/re de l’Empereur Napoléon I au Roi de Hollande.
Monsieur mon frère, je reçois la lettre de V. M. Elle désire que je fasse connaître
mes intentions sur la Hollande ; je le ferai franchement. Quand V. M. est
montée sur le trône de Hollande, une partie de la nation hollandaise désirait la
réunion à la France ; l'estime que j’avais puisée dans l’histoire pour cette brave
nation m’a porté à désirer qu’elle conservât son nom et son indépendance. Je rédigeai
moi-même sa constitution, qui devait être la base du trône de V. M., et je l’y plaçai.
J’espérais quélevée près de moi, elle aurait eu pour la France cet attachement
que la nation a droit d’attendre de ses enfans, et à plus forte raison de ses
princes; j’espérais qu’élevée dans'ma politique, elle aurait senti que la Hollande,
qui avait été conquise par mes peuples, ne devait son indépendance qu’à leur
générosité; que la Hollande faible, sans alliance, sans armée, pouvait et devait
être conquise le jour où elle se mettrait en opposition directe avec la France;
qu’elle ne devait point séparer sa politique de fa mienne; qu’enfin la Hollande
j) Documens historiques et réflexions, sur le gouvernement de la Hollande, Tome I ,
page 132— 133.
a) Le même ouvrage, Tome m , page 156.
était liée par des traités avec moi. J’espérais donc qu’en plaçant sur le trône de
HoUande un prince de mon sang, j’avais trouvé le mczto termine qui conciliait
les intérêts des deux États, et les réunissait dans un intérêt commun et dans mie
haine commune contre l'Angleterre; et j’étais tout fier d avoir donne à la Hollande
ce qui lui convenait, comme par mon : acte de médiation j avais trouve ce qui
convenait à la Suisse. Mais je n’ai pas tardé à m apercevoir que je m étais berce
d’une vaine illusion: mes espérances ont ete trompées. V. M., en montent sur le
trône de Hollande, a oublié qu’elle était française, et a même tendu tous les
ressorts de sa raison, tourmenté la délicatesse de sa conscience, pour se persuader
qu’elle était hollandaise. Les Hollandais qui inchnaient pour la France ont etc
négligés et persécutés; ceux qui ont servi 1 Angleterre ont été mis en avant. Les
Français, depuis l'officier jusqu’au soldat, ont ete chassés, déconsidérés; et J al eu
la douleur de voir, en Hollande, sous un prince de mon rang, le nom français
exposé à la honte. Cependant je porte dans mon coeur, et jai su soutenir si haut
sur les baïonnettes de mes soh&ts, l'estime et lhonneur du nom français, quil
n’appartient ni à la Hollande, ni à qui que ce soit, dy porter atteinte impunément.
Les discours émanés de V. M. à sa nation se sont ressenti de ses mauvaoees
dispositions. On n’v voit que des allusions sur la France; au lieu de donnei
l’exemple de l’oubli du passé, ils le rappellent sans cesse, et par-là flattent les senti
mens secrets et les passions des ennemis de la France. Eh! cependant, de quoi
se plaignent les Hollandais? n'ont-ils pas été conquis par «os armes ne
pas ledr indépendance à la générosité de mes peuples? ne devaient-ils pas; plutôt
bénir la générosité de la France qui a constamment laissé ouverts ses canaux et
ses douanes à leur commerce, qui ne s est servie de la conquête que pour les
protéger, et qui n’a fait jusqu'à cette heure usage de sa puissance que pour conso-
Fider leur indépendance? Qui a donc pu justifier la conduite msultente po îr la
nation, et offensante pour moi, qu’a tenue V. M.? Vous devez comprendre que
je ne me sépare pas de mes prédécesseurs, et que depuis Cl<msjusquau comte
du salut pubnc, je me tiens solidaire de tout, et que le mal quon dit dei.gatte
de coeur contre les gouvernemens qui m’ont précédé, je le tiens comme dit dans
nntentkm de m'offenser. Je sais tmïl est venu de mode parmi certaines gens de
faire mon éloge et de décrier la France, mais ceux qui naiment pas la F™“«;
ne m'aiment pas: ceux qui disent du mal de mes peuples, je les tiens pour mes
plus grands ennemis; n’aurais-je eu que cette seule raison de mécontentement, de
voir fe mépris d a n s lequel était tombé le nom français en Hollande, que les droite de ma
qouronne ¿'autorisaient à déclarer la guerre à un souverain, f e g M a i
Etats duquel on se permettait des insultes contre mes peuples . je n en ai rien tait.
Mais l M. s’est fait illusion sur mon caractère; elle s est fait une fausse idee de
ma bonté et de mes sentimens envers elle. Elle a violé tooe les traites qu elle a
faits avec moi; elle a désarmé ses escadres, licencie ses matelots, desorganisé ses
“ mées de“ orte que la Hollande se trouve sans armée de terre ni de mer, comme
si des ¿agasins de marchandises, des négodans et des
une puissance. Cela constitue une association riche ; mais il n est pas de roi sans
finances, sans moyens de recrutemens assurés, et sans flotte.
V M a fait plus; elle a profité du moment où j avais des embarras sur le continent
pour laisser renouer les relations de la Hollande avec 1 Angleterre, ™ler les
lois du blocus seul moyen de nuire efficacement à cette puissance. Je lui ai
témoigné mon mécontentement de cette conduite, en lui interdisant ^ Fra"c^ etje
lui ai fait sentir que, sans le secours de mes armees, en fermant le Rhin, le Vy eser,
l’Escaut et la Meuse à la Hollande, je la mettais dans une position jilus critique