occupèrent la Haye et Leyde ; tandis que le quartier-général de T armée
française en Hollande, fut établi à Utrecht, où le Général-en-Chef
français reçut le commandement des douze-mille Hollandais, qui étaient
destinés à surveiller les côtes.
Dès le 1er juin, des douaniers français s’établirent près d’Amsterdam,
pour*y faire exécuter les lois du blocus. Ils tentèrent plusieurs fois de
s’établir dans cette capitale, ou sur les bords du Zuyderzee, mais cela
leur fut refusé.
Le 29 juin, le Roi fut instruit que l’Empereur insistait sur l’occupation
d’Amsterdam et. l’établissement du quartier-général français dans cette
capitale.
Lorsque le Roi reçut cette' nouvelle, il était à Harlem avec son fils
aîné. Son désespoir fut au comblé. H forma le plan de défendre Amsterdam
à outrance. Il consulta à ce sujet, le Général Dumonceau et
l’Amiral de Winter, qui lui firent des réprésentations respectueuses, mais
fortes, sur l’inutilité et le peu de durée de la défense d’Amsterdam. H
voyait de son pavillon de Harlem, cette grande ville d’Amsterdam, assise
dans un bas-fond entre deux mers, qu’il fallait achever de submerger
pour pouvoir la défendre, et en même, temps il considérait son jeune
fils, âgé de cinq ans et demi, dont l’air assuré et riant auprès de son
père si agité, somblait désapprouver une défense inutile.
„Je succomberai avec gloire”, se disait-il; „mais d’un autre côté, rien
„ne restera de mon règne éphémère; et mon fils, qui pourrait un jour
„relever la Hollande et réaliser mes projets pour elle, perdra tout à la
„fois, avec tant de milliers de familles qui, tranquilles en ce moment,
„ignorent l’orage qui les menace, et se reposent entièrement sur celui
„qui est obligé de veiller pour elle.”
Il convoqua ses Ministrés, qui furent tous d’un avis opposé à la défense.
Il céda, mais voyant, qu’i l Létait sans autorité réelle dans son Royaume,
et qu’il ne pouvait plus, ni soutenir les droits, ni protéger les intérêts
de ses sujets, il résolut d’abdiquer en faveur de son fils aîné Napoléon-
L ou is/ et à défaut de celui-ci, en faveur de son fils Charles-Louis-Napoléon;
croyant., comme on le verra par les pièces suivantes, que c’était le seul
moyen qui lui restait, pour éviter que son Royaume et son peuple ne
finissent par être réunis à la France.
Message du Roi, au Corps-Législatif sv/r les 'motifs de son abdication.
Messieurs, je charge les ministres réunis en conseil de présenter à votre assemblée
la résolution à laquelle je me suis vu forcé par l’occupation militaire de ma capitale.
Les braves soldats de la France n’ont point d’autres ennemis que ceux de la cause
commune à la Hollande et à moi; ils ont dû et doivent être reçus avec tous les
égards et toutes les prévenances possibles ; mais il n’est pas moins vrai que dans la
situation actuelle de la Hollande, quand une armée entiere, une foule de douaniers,
et l’armée nationale même mise hors du pouvoir du gouvernement ; quand tout, pour
ainsi dire, à l’exception de la capitale, se trouve sous les ordres d’un officier
étranger, j’ai dû déclarer au commandant français et au chargé d’affaires de l’empereur,
que, si l’on occupait la capitale et son arrondissement, je considérerais
cette opération comme une violation manifeste du droit des gens et des droits les
plus sacrés parmi les hommes. C'est ce qui m’a porté à refuser l’entrée du Muiden,
de Naarden et de Diemen aux douaniers ; j’étais en droit de le faire, parce que
le traité n’autorise la présence des douaniers que sur les bords de la mer et à
l’embouchure des rivières.
Le 16 juin, je reçus du chargé d’affaires de S. M. l’empereur l’assurance que
son intention n’était point d’occuper Amsterdam. Vous en trouverez la copie ci-
jointe , et cela me faisait espérer que l’on reviendrait à suivre strictement, et à ne
point dépasser un traité imposé par S. M. l’empereur même.
Malheureusement l’erreur n’a pas été longue, et j’ai reçu la communication que
vingt mille hommes de troupes françaises se réunissaient à Utrecht et aux environs.
J’ai consenti, malgré la pénurie extrême et l’embarras de nos finances, a leur
fournir des vivres et autres choses nécessaires, quoique le traité porte qu’il n’y aura
précisément que six mille hommes aux dépens de la Hollande ; mais je craignais
que ce rassemblement n’annonçât d’autres intentions défavorables à notre gouvernement
, et je n’ai point tardé à recevoir, avant-hier 29, l’information officielle que
S. M. l’empereur insistait sur l’occupation d’Amsterdam, et l’établissement du
quartier-général français dans cette capitale.
Dans cette position, vous ne devez pas douter, messieurs, que je ne me fasse
résigné à souffrir, pour mon peuple, de nouvelles humiliations, si j’avais pu concevoir
l’espérance de pouvoir supporter un tel état de choses, et surtout de prévenir de
nouveaux malheurs ; mais je ne puis me faire illusion plus long-temps. J’ai ratifié
conditionnellement le traite dicté par la France, dans la conviction que les parties
les plus désagréables pour la nation et pour moi ne seraient pas suivies, et que,
satisfait de l’abnégation de moi-même, pour ainsi dire, qui résulte de ce traité,
tout serait aplani entre la France et la Hollande. Ce traité offre à la vérité un
grand nombre de prétextes à de nouveaux griefs et à de nouvelles accusations;
mais peut-on jamais manquer de prétexte? J’ai donc dû me confier dans les
explications et les communications que l’on m’a faites lors de ce traité, et dans
les déclarations formelles et précises que je n’ai pu manquer de faire : telles que
les douaniers ne se mêleraient que des mesures relatives au blocus; que les troupes
françaises ne resteraient que sur les côtes; que les domaines des créanciers de
l’Etat et ceux de la couronne seraient respectés; que les dettes des pays cédés
viendraient à la charge de la France; enfin que, dans le nombre des troupes à
fournir, on défalquerait celles qui sont en ce moment à la disposition de la
France en Espagne, de même que pour l’armement maritime on donnerait le
temps nécessaire.
Je me suis même toujours flatté que le traité aurait été adouci. Je me suis