2 íü VOYAGE UE LA BONITE.
A leiuiiiieration de ces causes, toutes fort rationnelles,
j’ajouterai les considérations suivantes : les
hautes montagnes qui dominent le village de Marivèles
sont situées tout à fait à la partie sud-ouest de Luçon
et retienueut les nuages que pendant six mois la
mousson de S. O. y amène constamment. Là, les
images se condensent et se résolvent en pluies qui
tombent dans les vallées. Les eaux sont absorbées par
une couche peu épaisse de terre végétale; mais la na-
tuie éminemment massive et peu perméable du basa-
uite qui eu constitue le fond, empêche l’absorption
dans le sein de la terre, et le soleil aident qui réchauffe
ces climats les réduit de nouveau eu vapeurs
qui retombent eu pluie.
Pendant la mousson de N. E. l’action inverse ne
se reproduit pas, parce que les vents réguliers ne s’établissant
qu’à quelque distance sous le vent de l’île,
le calme le plus absolu règne dans le fond des vallons
et que la masse d’eau n’étant ni entraînée au loin
sous forme de nuages ni absorbée par le sous-sol à
cause de son imperméabilité, se vaporise pendant le
jour sous l’influence de la température, et se résout
en pluie pendant la nuit. Le passage continuel à
des températures différentes est favorisé par la grande
quantité de végétaux, qui entretiennent une fraîcheur
favorable au développement des facultés vitales.
La puissance végétative extraordinaire du sol ne
serait-elle pas due à la composition intime de la terre
végétale, formée de l ’atténuation des argiles résultant
de la décomposition des éléments feldspalbiques et
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pyroxéniques qui composent les rocbes volcaniques,
et des marnes que fouruisseut les calcaires arragonites
qui, comme je l’ai dit plus haut, sont très-abondants?
A ces principes déjà fertilisants viendrait se joindre
une masse de terreau résultant de la décomposition
séculaire des forêts vierges, et de ce mélange résulterait
un sol éminemment fécond.
Le rapport de la constitution géologique du sol
avec les grands phénomènes de physiologie animale
ou végétale amène à un ordre de considérations nouvelles
que je ne puis qu’effleurer, et que des esprits
plus puissants et mieux exercés pourront seuls aborder.
C’est là, je crois, une mine féconde dont l’exploitation
judicieuse fournira à la science de nombreuses
et intéressantes déductions.
Le 6 décembre (i), le temps s’étant mis au beau
et les avaries étant réparées, la Bonite appareilla et
alla mouiller au fond de la baie, vis-à-vis Manille,
capitale de l’île Luçon et du groupe des Philippines.
Cette ville, la plus importante de l’Océariie, est bâtie
sur les bords de la rivière du Passig et repose sur les
allnvions de ce cours d’eau, assez puissant vers son
embouchure pour pouvoir être remonté par des bâ-
(i) La Bonite étant arrivée à Manille par l’Est, avait avancé sa
date d’un jour, après avoir coupé le i8o° degré de longitude, cl
avait passé du 3o octobre au i®“' novembre; mais, à Manille, nons
ne nous trouvâmes pas d’accord avec la manière de compter du
pays, notre 6 décembre n’étant pour les habitants que le 5. Cela
lient à ce que les navigateurs espagnols qui y sont arrivés comme
nous par l’Est ont conservé la date d’Europe.
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