ïo o R E L A T I O N D’ ÜN V O Y A G E
& avec Iefquels ils trafiquent dans l’Océan, dans la
Méditeranée, dans la mer du Nord & dans Ta Baltique.
Il vient en outre à Bergues tous les ans plus de
mille navires de différentes nations chargés de fel,
de grains, de farines, d’eau-de-vie, & autres denrées.
Les habitans de Bergues envoyent aufli plu-
fieurs vaifTeaux en Groenland, pour y faire la pêche
dii loup ou chien marin, dont le lard fert à faire des
Iluiles très - efiimées pour les lampes. Il fe fait à Ber-
gues un très grand trafic de grainsde toute dpece ,
parce que la terre de tout ce bailliage eft ingrate &
peu cultivée. Ses habitans, fur-tout ceux de la côte,
fontprefque tous pêcheurs. Ils font obligés de tirer les
grains néceffaires à leur fubfiftance des magafins de
la ville, qui font abondamment pourvus parle moyen
de la navigation. Tous les habitans du nord de Bergues
y viennent de plus de trois cens lieues faire leur
provifion de bleds & d’autres denrées qu’ils ne trouvent
pas auffi'facilement à Dronthem. Enfin la ville
de Bergues eft le grenier de toute la Norvège. La
rivière de Bergues, & toutes les côtes de ce gouvernement,
font très-poifTonneufes. Les pêches les plus
confidérables & les plus avantageufes font celles de
la morue & du hareng. Ces pêches font les mines
d’or du pays; c’eft de leur produit que les navires danois
& étrangers font leur chargement pour toutes
les parties de l’Europe.. Le poiffon fec ou ftockfifch
que l’on prépare à Bergues, eft fort eftimé dans les'
ports d’Efpagne, d’Italie, de Hollande, de Flandre,'
& même d’Angleterre. Ce poiffon s’exportè auftl dans-
la mer Baltique, ainft que la morue feche,& en tonneaux,
que les Norvégiens font pafier dans toute
l’Europe. On charge âiifli à Bergues une quantité
prodigieufe d’huile de poiffon, de peaux de bouc &
de mouton, de foif, de goudron & de planches.
Il me refte à parler du commerce de la rogue, dont
On fait une grande confbmmation en Bretagne. La
fogue eft un amas d’oeufs de morue; e’eft un appas
abfolument néceffaire pour la pêche de la fardine.
La pêche de morue, pour en retirer' la-rogue ou les
ceufs,fe fait fur les côtes de Norvège, depuis le mois
de janvier jufqu’à la mi-avril. On prend des morues
dans les autres fàifons ; mais on ne lui trouve des oeufs
que dans cette première pêche. On commence à pê-'
cher la morue avec fa‘rogue aü mois de janvier, fur
la côte dèNordlànd & de Finnemar'ck, à plus de cent
fiéUès dans le Nord de Bergues; Lo poiffon defeend
fucceffivement le long des côtes,en prenant toujours"
Vers le fud jufqu’à la ville de Bergues, & environ-
trente lieues encore plus fiid du côté de Schutnefs,-
où cette pêche finit à la fin d’avril ; parce- qu’alors la-
morue s’éloigne de terré, & gagne la pleine mer
pour pondre fes oeufs. Cette pêche ne fè fait devant
Bergues qu’a Ta fin de mars. Les pêcheurs norvégiens'
re font ladite pêche que dans les endroits fermés. Ils-
N 3
. Commet te
de la rogue.