6B R E L A T I O N D’ UN V O Y A G E
villes'on porte des grêlins qu’on a foin de roidir k
bord, & à lavant & à l’arriere du bâtiment par le
moyen du cabeftan. Au défaut de chevilles de fer,
on fe fert de grapins & de pinces qu’on enfonce dans
la glace à coups de maffe. On ferre ou on cârgue les
voiles, & l’on fe trouve amarré comme le long d’un
quai. 11 faut prendre garde de s’amarrer à une glace
trop élevée; car on en voit de hautes quife brifent
. & capottent continuellement. Lorfque la vue d’une
ouverture dans le s glaces, un changement de vent,
ou le voifinage d’une côte engagent à virer de bord,
on manoeuvre le vaiflêau par le moyen des amarres
comme dans un port. Si l’on veutfe frayer une route
dans les glaces pour y entrer ou pour en fortir, on
prend deux mâts d’hune de rechange, on amarre
les deux gros bouts fous les portes - haubans de mi-
faine, & l’on forme avec les deux petits bouts une
fourche en avant de la proue, laquelle fourche eft
foutenuepar un amarrage fous le mât de beaupré:
Nfette fourche fert à écarter les glaces en avant du
Bâtiment Si l’on ne juge pas à propos de fe fervir
de cet appareil, on choifit un morceau de glace un
peu moins élevé que la proue, on gouverne fur lui
à petites voiles; & lorfqu’on le tient fous l’épron ou
le taille mer, on force alors de voile. Gé morceau de
glace qui eft chaffé parle vaiffeau, chaffe à fon tour
toutes les glaces qui s’oppofent au paffage du bâtiment,,
qui, par ce moyen, ne fouffre aucun'dommage
Le 2 1 , le 22 & le 23, les vents variant continuellement,
& la mer greffe, je gouvernai au fud-fud-
oueft &fud-oueftquartdefud;&le 23 à minuit, m’ef-
timant à dix lieues à l’oueft de la plus au large des
ifles aux Oifeaux, je fis fonder, je trouvai deux cens
cinq braffes d’eau fond de fable noir comme la poudre
a canon. La qualité du fond me fit reffouvenir qu’un
capitaine pêcheur avoit rapporté qu’il avoit trouvé
Une roche dans le nord-nueft des iftes aux Oifeaux,
diftance de fept lieues, qu’il avoit fondé tout à l’entour
& trouvé vingt braffes d’eau fond.de fable noir;
La reffemblance du fond que j ’avois trouvé avec celui
des environs de la; roche femble en confirmer
lexiftence.
Avant de m’éloigner dé l’illande, il eft bon de
fane part au lecteur des connoilïknces que j’ai pu acquérirconcernant
les ports qui font fitués â l’oueft
& au nord de cette ifle. Je commencerai par'Æèlfiord,-
qui eft au nord de Lusbaye,&je continuerai demême
jufqu’à-la pointe de Langernefs.- Adelfiord ou la baie
qui porte ce nom, eft très-grande & très sj profonde
mais le mouillage n’y eft point bon pour de gros
vaiffeatix, parce que la cote eft trèsoefcarpée, & qu’il
faut mouiller très-près dê terre. Les pêcheurs étant
mouillés, ont la poupe à une fi petite diftance de l i
côte, que-les équipages vont à terre par le moven
d’une planche.
La baie de Direfiord eft auffi belle ;& aufii grande
1 3-
Con/efture
funwerocha,
Defcription
des ports de
l’oueft & du
nord de i’jp
lande.