Départ
Breft.
170 R E L A T I O N D’UN V O Y A G E
officiers de mon état-major de la frégate la Folle,
MtJ. Duchatel & le chevalier Ferron, deuxfujets pleins
de zèle & de talens ; M. le chevalier Bernard de Ma-
rigny officier d’un mérite diftingué, donna des preuves
de fon zèle en fe joignant à nous. Il venoit de
commander un bâtiment du Roi, & les fatigues
d’une nouvelle campagne très-dure ne le rebutèrent
point. J’eus pour quatrième officier M. Soyer de Vau-
couleur , capitaine de Brûlot, qui a commandé plu-
fieurs Corfaires, & qui a la meilleure volonté,
de Je partis de Brell le 1 J de mai 1768, par un vent d’eft
foible ; mon intention étoit de palier par le canal S.
Georges, mais les vents qui vinrent au nord, bon frais,,
& fouillèrent plufieurs jours de cette partie, détruifirent
mon projet : je paffai à l’oueft d’Irlande, comme dans
mon premier voyage ; je ferrai cependant un peu plus la
côte, à caufe des bancs & hauts fonds dont j’aûparlé.
11 ne nous arriva rien d’intéreflant jufqu’au 27 à huit
heures du foir. Les vents étaient de la partie deîoueft
frais, la mer greffe;nous gouvernions au nord; nous
apperçûmes devant nous un lit de marée très-marqué
par des goémons & des écumes; nous nous trouvâmes
bientôt au milieu, & la mer mâle par-tout ailleurs,
étoit à l’endroit où nous étions unie comme dans un
étang; on voyoit feulement la furfacede la mer frémir
& bouillonner, & le courant nousportoit avec rapidité
au vent, c’eh-à-dire à l’oueft. Je fis promptement
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mettre en panne & fonder ; nous n’éûmes point de
fond, mais je fuis perfuadé que nous étions dans le
voifinage de quelques roches, d’autant plus que mon
eftime me mettait alors entre l’ifle deRokol&lesifles Mes de Saint,
de S. Kildas : il y a mouillage par 18 bralfes d’eau KiUas‘
au fud - eft, corrigé de la plus grande des ifles de S.
Kildas, & il y a paffage entre la même & celle quieft
dans le nord-quart-nord-eft. En cas de befoinonpeut
aüÏÏi mouiller dans ce canal par 26 bralfes d’eau fond
dé gravier & cailloux.
Le 3 1 , failànt route au nord pour attaquer la terre,
le cap Heckla me reliant par eftime au nord-oueft:,
corrigé dillance 20 lieues , nous fûmes alfaillis d’un
coup de vent furieux de la partie de l’eft, avec une
brume épaifle. Comme le tèms n’étoit point propre,
pour aller chercher la terre, & que j’avois beaucoup de
chemin à faire à l’ouefl:,je pris le parti de courir vent-
arriere le cap au ouell-nord-oueft,; & nord-oueft-quart-
d’ouell, en attendant que le tems fe radoucît & que
le ciel s’éclaircît. Mon intention étoit,fuppofé que le
t-erng ne changeât point, de mettre à la cape le bord
au large, lorfque je me trouverois parla longitude
ellimée des ifles aux Oifeaux.
Le premier de Juin lèvent tomba vers le foir, mais
la brume étoit toûjours épaifle, ce qui me fit continuer
la même route à petites voiles.
Le 2 au matin, le ciel étant un peu éclairci, le
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