23. R E L A T I O N D’ UN V O Y A G E
pores des liqueurs comme autant de petits coins, ils
ferment le paffageaux parties grofiieres de la matière
fubtile, arrêtent l’agitation des particules infenfibles
des liqueurs, par-là les durciiTent & les changent en
glace; c’eft ainû que fe forment dans certaines cavernes
dont le voifinage çft nitreux, des pyramides de
glace, telles qu’on en trouva trois de quinze pieds de
hauteur au mois de feptembre 1 7 1 1 , dans une caverne
auprès du village de Chaux, à cinq lieues de
Befançon (æ). J’admets le vent pour la feconde caufè
accidentelle de la formation de la glace.
Bien des gens s’imaginent que le vent eh un obfta-
cle à la formation de la glace ; il eft vrai que lorfqu’il
a beaucoup de prife fur une grande furface d’eau,
comme fur les fleuves, fur les lacs, & fui- les mers;,
il les empêche quelquefois de geler tant qu’il les
agite., & qu’il ôte aux parties intégrantes du liquide
le tems de s’unir, mais il eft toujours certain en général
que le vent doit accélérer la congélation, comme
je vais l’expliquer. Dans un tems froid qui tend à la
gelée, le vent fec, comme celui de nord-eft pour
notre climat, contribue à la congélation ; car l’air
qui fè trouve en repos fur la furface d’un liquide,
prend à-peu-près le degré de froideur de ce liquide,
& s’y maintient; ainfi la matière fubtile qui circulé
entre les interftices du liquide,& dont le mouvement
CO Hift. de l’Acad. 1712, p. 21.
D A N S L A M E Rj DiU; N O JR.OEE ; s 3 ,
eft'toujôurs proportionné au mouvement de celle qui
.rènviroîine..immédiatement,n?eft pas encore aflez affaiblie
pour permettre la congélation.;, mais fi l’on
hâte la communication de la froideur à la furface du
liquide en ehaffant- violemment l’air.qui la touche,
& en mettant à fa place (comme fait,lèvent) un air
plus froid, plus denfe, & tel qu’ifle faut pour procurer
la congélation, on affaiblira la matière fubtile
extérieure qui touche le liquide,. & par ce moyen
celle qui y eft renfermée, laquelle doit toujours, diminuer
de mouvement jufqu’à ce qu’elle fait âbâiffée
au degré néceffaire pour demeurer en équilibre avec-
la première. Cependant fi le nouvel air reftoit en
repôs, il n’y aurëit pas encore de congélation; mais
fi l’on continue à chaque inftant de chaffer l’air de
deffus la furface du liquide, & fi l’on y en fubftitue
toujours un qui foit au degré de froideur néceffaire
pour la congélation, il eft évident qu’il communiquera
à la fin. au liquide fon degré de.froideur, &
qu’il diminuera le mouvement de cç liquide jufqu’à ï
la congélation; ainfi le vent produit la congélation
comme un éventail excite en nous le fentiment de la *
fraîcheur en chafiant d’autour de nous l’air échauffé
par la chaleur du fang & la tranfpiration.
La troilicme caiife accidentelle de la formation;
de la glace eft l’affoibliffement de la chaleur extérieure
du foleil caufé par l’éloignement de fa fource,
par la pofition oblique & délkvantagèufe des furfaces