Façon de
Voyager.
36 R E L A T I O N D’ UN V O Y A G E
a quelques montagnes plus hautes, mais où les glaces
ïie fubfiftent pas toute l’année,parce qu’il s’y rencontre
fans doute du falpêtre qui les fait fondre. Une
choie finguliere qu’on Voit foüvent dans, les Joeke-
len, c’elt qu’ils croiffent, décroiffent, s’élèvent 63
s-âbaifferit de joiir en jour; chaque inftant, pour ainfi
dire , ajoute à leùr forme, ou la diminue. Par. exemple
, fi l’on veut fuivre les traces de quelqu’un qui a
paffé la veille dans les- montagnes, ori perd ces traces
tout- - à - coup aü pied d’une maffe énorme de glace,
qu’il eft impoflibîede traverfer; & 'fi. l’on veut faire
le tour de Ce morceau de: glace, en remontant par la
droite ou par la gauche,..on retrouve les traces du
voyageur à la meme hauteur , &. fur la même ligne
que lés premières, ce qui prouve que ce monceau de
glace, n’exiftoit pas le jour précédent ; il faut .conyei
nir que ce phénomène -eft très-fingulier.
On voit qu’il eft difficile de voyager dans ce pays..
Il n’y a point de route pour les chariots & cigarettes;:,
on; peut aller-a cheval, & tranfporterfes effets fur des
chevaux; mais il. y a bien des endroits où l’on ne
peut ajler qu’à pied,& où les marchands font obligés
de tout porter fur le dos : : d’ailleurs un. voyageur
n’eft pas fur de pouvoir paffer dans une année par où
il aura paffé la précédente ; car les dégels font quelquefois
féparer eu .deux des morceaux de roches qui
forment.des obftaçles invincibles,. & les.torrens qui
fe, précipitent, des. montagnes font rouler dans les ;
d a n s l a ME R DU n o r d .' 37.
chemins des monceaux de pierres, qui les comblent
fouvent & rendent le paffage impratiquable.
L ’Iflande compte aujourd’hui plus de foixante-dix
mille âmes:-elle fut autrefois plus peuplée avant cette,
terrible pefte, appellée pejle noire, qui ravagea tout le
Nord au milieu du. quatorzième fiecle. Les annales
iflandoifes ne font point mention de cette calamité.
On fait feulement par tradition orale que la contagion
étoit dans les plaines & les vallons couverts
d’une rofée épaiffe, & que, pour éviter la mort,il
falloir gagner les plus hauts rochers.
Les parties maritimes de l’ifle font plus peuplées
que l’intérieur du pays, à caufe de la quantité prodi-
gieufe de poiffons qui fe jettent fur les côtes, & de la
facilité; du commerce avec les vaiffeaux de la Compagnie
établie en différens ports. L ’Iflande fèroit encore
plus peuplée fans les fréquens tremblemens de
terre qui ont plus d’une fois fait périr bien des habi-
tans ; & quoiqu’en dife M. Horrebows, qui tourne
en ridicule M. Anderfon fur les incendies de terre
& les tremblemens dont il donne la defeription, on
jugera par le récit même de M; Horrebows fi les incendies
font des jeux dont on puiffe plaifanter.. Voici
ce qu’il en dit lui-même (a): „ En l’année 1726,on
„ éprouva quelques tremblemens de terre dans les
„ cantons du nord; à la fuite de ces tremblemens,
(») Obfervation critique, p, 39,
e ÿ
POpillltioB,
Tremblé-'
ment & in-1
cendies de-
terre.