92 R E L A T I O N D’UN' V O Y A G E
reüfés. Pourquoi cela? c’eft qu’ils ontpenfé que la
,, guerre de terre feroit négliger notre marine, & ils
ont eu raifon ; la marine de l’ennemi n’exifte que
„ par fa finance , & fa finance n’a d’autres fonds que
„ fon commerce faifons donc la guerre à fon corn-
„ merce,& à fon commercefeul. Prenez àl’Anglois
„ une colonie-, il menacera; ruinez'fon commerce,,
il fe révoltera. Nousavons trois cens lieues de côtes.
„ à garder. Ce foin exige une marine refpeétable,qui
„ eft-ce qui défendra les côtes, des vaiffeaux ? Abus,.
,, abus: ce font des troupes de terre; on armera cent
„ cinquante mille hommes pour épargner ; cependant
„ les riverains feront ravagés;on armera cent cinquan-
„ te mille hommes il éft clair que vingt-cinq.vaif-
„ féaux de ligne à Breft, & quinze mille hommes fous
„ cette place fuffifènt pour arrêter tout, excepté la pré^
„ dilection pour les foldats de terre ” . On voit que ce
marin a des vues judicieufes, mais il ne démontre
pas avec.éloquence la néceffité d’une marine, comme
le fait M.. Thomas (a) dans l’éloge de M. Duguaf.
(a) Dans ces’ entretiens fi profonds qii’il avoit avec Philippe, ilpa».
loit fans cefle‘ à ce prince de l’importance & de l’utiiité de la marine.
- Ah ! s’il revivoit aujourd’hui, s’il erroit parmi nos ports & nos arfé-
naux, quelle feroit fa douleur rFrançois1, s’ifcrieroiPil, que font de?
venus lés vaiffeaux’ que j’ai commandés1, ces flottes' viétorreufes qui
. dominoient fur l’océan?,Mes yeux cherchent.en-vain: je n’apperçois
- que des ruines. Un trille filénce règne dans vos ports. Eh quoî!
, n’êtes-vous plus le même peuple? N’avez-vous plus les mêmes enne-
„.mis à combattre? Allez tarir la fourcs de leurs tréfors. Ignorez-vous
D A N S LA ME R D U N O R D . 9.3,
Trouin. Cependant cet orateur, conduit par un préjugé
pardonnable, attendu qu’il n’a jamais fréquenté
lus ports du Ro i, laiffe échapper auffi en faveur de la
marine marchande quelques traits contre la marine
royale.,- C’eft avec le même préjugé qu’un moine a-
fabrique le Journal hiftorique d’un voyage aiix ifles’
Maïouines en 1^63 & 17^4 - L ’éditeur de cetinfipide
journal, imprimé à Berlin en 1769, fèmble n’être
forti de fon couvent que pour ailer'faire dans urt autre
monde une ample récolté de menfonges 6c d’in--
veéiivesV De retour en Europe, il fè plaît à répandre
lé venin greffier de là plume mauffade fur là marine"
du Roi, dans une digreffion- qui contient autant dé
Bevues que de phrafès. On voit dit l'ignare enfant de
S. Benoît,Z? 1 j juin 1764, un navire auvent dans le
nord ouefl^on vire pavillon ^flamme^n met pavillon m»
berney.on tient le vent, malgré ces fignaux prétendus,,
'qtie toutes les gùeVVès Se l’Euiopc ue font plus que Ses'guerres de
„-.commerce, qu’on acheté des armées & des viéloires,& que le fang eft
„ à prix d’argent? Les vaiffeaux font aujourd’hui les appuis des trônes.
„-Portez vos régards au-delà des'mèrs: tes habitans de vos colonies vous
„..tendent lés bras. Etes vous citoyens? ce font vos freres. Etes-vous
„ avides de riçheffes ? vous en trouverez dans-le nouveau monde. Vous
„ y trouverez un bien plus précieux'; la gloire. Vous avez vêrfé tant de
„• fang pour maintenir la balancé de l’Eur'optf; l’arnbitio'n a changé d’oB-
„ jet. Portez, portez cette balance fur les mers : c’eft-là qu’il faut établir
„■ l'équilibre "du"pouvoir;" Si un féül peuple y domine, ilfera-tyran', &
„. vous ferez efclàves. Il faudra que vous achetiez de lui les alimens de '
„-votre-luxe, dont vos malheurs ne vous guériront pas, &c ”, ■
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