mutilation des mâles ; ces bois font donc fi différens
les uns des autres, qu’il n’eft pas furprenant que les
Auteurs qui ont voulu les décrire, foient fi peu d’accord
entr’eux.
Une autre fingularité que nous ne devons pas
omettre, 6c qui eft commune au renne 6c if l'élan, c’eft
que quand ces animaux courent ou feulement précipitent
leurs pas, les cornes de leurs pieds * , font à
chaque mouvement un bruit de craquement fi fort,
qu’il femble que toutes les jointures des jambes fe
déboîtent ; les loups avertis par ce bruit ou par l’odeur
de la bête courent au-devant, la faififlent 6c en viennent
à bout, s’ils font en nombre : car le renne fe défend
* Rangiferum pulices, Oejlra, tabani ad alpes cogunt, crepitantibus
tmgulis. Linn. fyjl. nat. edit. X , pag. 6y . — Le renne eft encore
different du cerf, en ce qu’il a les pieds plus courts & beaucoup
plus gros, & fèmblables aux pieds des buffles; c’eft pourquoi il a
naturellement l’ongle ou la corne du pied fendue en deux, &
prefque ronde comme celle des vaches ou des taureaux. De quelque
manière qu’il marche, loit qu’il aille lentement ou qu’il coure, les
jointures de lès jambes font un allez grand bruit, tout de même que
des cailloux qui tomberoient l’un for l'autre, ou des noix que l’oti
càflëroit, & ce bruit s’entend auffi-tôt que l’on peut apercevoir la
bête. Schejfer, page 2 0 2— Fragor ac JIrepitus pedum, mgularumque
tantus ejl in celeri'progrejfu, ac J i fdices vel nuces collidantur; qualem
flrepitum articulorum etiam in alce obfervavi. Hulden. Rangifer. Jence,
1 6y y. — Ce qui eft de remarquable dans le renne, c’eft que tous
lès o s, & particulièrement les articles des pieds craquent comme fi
on rçmuoit des noix, & font un cliquetis fi fort, qu'on entend cet
animal prefque d’aulîi loin qu’on le voit. Regnard tome 1." page 1 0 S.
d’urt
d’un loup feul ; ce n’eft point avec fon bois, lequel
en tout lui nuit plus qu’il ne lui fe rt, c’eft avee les
pieds de devant qu’il a très - forts, il en frappe le
îoup avec allez de violence pour l’étourdir ou l’écarter,
6c fuit enfuite avec allez de vîtelfe pour n’être
plus atteint. Un ennemi plus dangereux pour, lui,
quoique moins fréquent 6c moins nombreux, c ’eft
le rofomack ou glouton : cet animal encore plus vorace,
mais plus lourd que le loup, ne pourfuit pas le renne,
il grimpe ôc fe cache fur un arbre pour l’attendre
au paflàge : dès qu’il le voit à portée,, il fe lance
defiiis, s’attache fur fon dos en y enfonçant les ongles*,
6c lui .entamant la tête ou le cou avec les dents, ne
* Il y a encore un animal gris-brun de la hauteur d’un chien,
que les Suédois appellent Jie rt & les Latins Gulo, qui fait auffi uns
guerre fànglante aux rennes. Cette bête monte fur les arbres les plus
hauts pour voir & n’être point v u e , & pour furprendre fon ennemi;
îorfqü’il découvre un renne, foit fàuvage, foit domeftique paflàut
fous l’arbre fur lequel il eft , il ïè jette fur fon dos & mettant fes
pattes de devant fur le cou , & celles de derrière fur la queue ; il
s’étend & fe roidit d’une telle violence, qu’il fend le renne fur le dos
& enfonce fon mufeau qui eft extrêmement pointu, dans la bête,
dont il boit tout le làng. La peau du jært eft très- belle & très-fine,
& o.n la compare même aux zibelines. OEuvres de Regnard, tome I ."
page 1 5 4 . — L e caribou court for la neige prefqu’auffi vite que fur
la terre , parce que fes ongles ( pieds ) qui font fort larges l ’empêchent
d’enfoncer ; lorfqu’il habite le fort des bois, il s’y fait des
routes en hiver comme l’orignal, & y eft attaqué de même par le
carcajou. Hijloire de l ’Académie des Sciences, année r y i y , page 1 4 ,
N ot a . Le carcajou eft le même animal que le jiert ou glouton.
Tome X I I. Q