La defcription & les figures de l’hippopotame~que
Profper Alpin a publiées plus de cent ans après , font
encore moins bonnes que celles deColumna, n’ayant
été faites que d’après des peaux mal confèrvées ; Sc
M. de Jufiieu \ qui a écrit fur l’hippopotame, en 1 7 2 4 ,
n’a donné la defcription que du fquelette de la tête
Si des pieds.
En comparant ces defcriptïons, & fur-tout celle de
Zerenghi, avec les indications que nous avons tirées
des Voyageurs b, il paraît que l’hippopotame eft un
* Mémoires de l’Académie des Sciences, ann. 1 J 2 4 , page 2 0ÿ .
Il y a dans le Nil des hippopotames ou chevaux marins, & il s’en
prit un à Girge l’an 1 6 5 8 , qu’on amena auflî-tôt au Caire, où je
le vis la même année au mois de février: mais il étoit mort. Cet
animal étoit de couleur quafi tannée, il avoit le derrière tirant à celui
du buffle, toutes fes jambes étoient plus courtes & groflès ; là grandeur
étoit femblable à celle d’un chameau ; fon mufle à celui d’un boeuf,
il avoit le corps deux, fois gros comme un boeuf ; la tête pareille à
celle d’un cheval, mais plus groffè ; les yeux petits , fon encolure
étoit fort groflè, l’oreille petite , les nafoaux fort gros & ouverts, les
pieds très-gros, allez grands & prelque ronds , & avec quatre doigts
à chacun, comme ceux du crocodile ; petite queue comme un
éléphant, & peu ou point de poil for la peau, non plus que l’éléphant;
il avoit en la mâchoire d’enbas quatre dents groflès & longues d’un
demi-pied , dont deux étoient crochues & groflès comme des cornes
de boeuf. Plufieurs difoient d’abord que c’étoit un buffle marin,
mais je reconnus avec quelques autres, que c ’étoit un cheval marin :
vu la defoription de ceux qui en ont écrit ; il fut amené mort au
Caire par les Janiflàires, qui le tuèrent à coups de moufquets en
terre où il étoit venu pour paître ; ils lui tirèrent plufieurs coups
fans le faire tomber : car à peine la baie perçoit - elle toute la peau
de l ’H i p p o p o t a m e . 35
animal, dont le corps eft plus long Si auffl gros que
celui du rhinocéros , que fes jambes font beaucoup
plus courtes a , qu’il a la tête moins longue Si plus
greffe à proportion du corps; qu’ il n’a de cornes, ni
fur le nez comme le rhinocéros, ni fur la tête comme
les animaux ruminans. Que fon cri de douleur tenant
autant du henniffement du cheval, que du mugiffement
du buffle, il fe pourroit, comme le difent les Auteurs
anciens & les Voyageurs modernesb, que fa voix ordinaire
comme j’ai remarqué ; mais il lui en tirèrent un , qui lui donna dans
fa mâchoire’ , & le jeta bas. Il y avoit long - temps qu’on n’avoit
vu de ces animaux au Caire. Relation d’un voyage du Levant, par
A4. Thevenot. Paris, 1 66 4 , tome 1, pages 4 $ 1 ù 1 4-y 2 .
* Les pieds de l’hippopotame font fi bas & fi courts, qu’ils ne
paflènt point quatre doigts hors de terre. Belon, des poiflons ,page 1 7 .
— Crura è terra ad ventrem pedes très cum dimidio. Fabius Columna,
pag. 3 1 . Nota. Les témoignages de Belon & de Columna for la
longueur des jambes de l’hippopotame, diffèrent trop pour qu’011
puiflè adopter l’une ou l’autre de ces mefores, & l’on doit obiërver
que l’hippopotame que Belon a vu vivant, étoit fort jeune & fort
gras, qu’il devoit par conféquent avoir le ventre gros & pendant:
qu’au contraire la peau de celui que décrit Columna, qui eft le
même que celui de Zerenghi, avoit été deflechée dans du fèl ; &
par conféquent Columna ne pouvoit pas aflurer, comme il l’a fait,
que le ventre de cet animal n’étoit pas rond, mais plat. Ainfi la me-
fore de Belon eft trop courte pour un hippopotame adulte, & celle
deColumna eft trop longue pour un hippopotame vivant; & ce que
l’on doit inférer de toutes deux, c’eft qu’en général le ventre de cet
animal n’eft guère qu’à un pied & demi de terre , & que (ès jambes
n’ont pas deux pieds de longueur, comme le dit Zerenghi.
1 Vocem equinam (dit illius gentis relatione. Prolp. Alpin. Ægypt.
Ei j