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année Tavemier * en acheta feize cens foixante & treize
veffies, ce qui fuppofe un nombre égal d’animaux auxleur
a fait connoître combien doit pefèr une veflie non altérée; le
goût eft leur fécondé preuve, auffi les Indiens ne manquent jamais de
mettre à la bouche de petits grains qu'ils tirent des veffies lorlqu’ils
en achettent; le troifiètne, c’eft de prendre un fil trempé dans du lue
d’ail & de le tirer au travers de la veffie avec une aiguille; car fi l’odeur
d ’ail le perd, le mute eft bon ; fi le fil la garde, il eft altéré. Voyages
de Chardin. Amjterdam, i y i t , tome I I , pages 1 6 iT i y .
* La meilleure forte & la plus grande quantité de mule, vient du
royaume de Bouton, d’où on le porte à Patna, principale ville de
Bengale, pour négocier avec les gens de ce pays-là ; tout le ntufe
qui fe négocie dans la Perle Vient de-lâ........ J’ai eu la curiofité d’apporter
la peau de cet animal à Palis, dont en Voici la figure.
Al très qu’on a tué cet animal, on lui coupe la veffie qui paroît
fous le ventre de la groflèur d’un oeuf, & qui eft plus proche des
parties génitales que du nombril, puis on tire de la veffie le mule
qui s’y trouve & qui eft alors comme du lâng caillé ; quand les
payfans le veulent falfifier, ils mettent du foie & du lâng de l’animal
haché enlèmble en la place du mule qu’ils ont tiré, ce mélange produit
dans les veffies en deux ou trois années de temps, de certains
peths animaux qui mangent le bon mufe, de forte que quand on
Vient à les ouvrir, on y trouve beaucoup de déchet; d'autres payfans,
quand ils ont coupé la veffie & tiré du mule ce qu’ils en peuvent
tirer, (ans qu’il y paroiflè trop, remettent à la place dé petits morceaux
de plomb pour la rendre plus pelante ; les marchands qui l’achettent
& le mmfponent dans les pays étrangers, aiment bien mieux cette
tromperie que l’autre, parce qu’il ne s’y engendre point de ces petits
animaux; mais la tromperie eft encore [dus mal ailée à découvrir, quand
de la peau du ventre du petit animal ils font «le petites bourfes qu’ils
coufent fort proprement avec des filets de la même peau & qui refi-
lénifient aux véritables veffies, & ils rempliftent ces bourles de ce
qu’ils ont ôté des bonnes veffies avec le mélange frauduleux qu’ils y
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quelles’ cette ve/fië auroit été enlevée; tnaiscomme cet
animal n’eft domeftique nulle part, & que fon efpèce
eft confinée à quelques provinces de l ’Orient, il eft im-
poftible de fuppofer qu’elle eft allez nombreufe pour
produire une auftï grande quantité de cette matière, &
l ’on ne peut pas douter que la plupart de ces prétendues
poches ou veiïies ne foient des petits facs artificiels
faits de la peau même des autres parties du corps de
l ’animal, & remplies de fon fang, mêlé avec une trèsveulent
ajouter, à quoi il eft difficile que les marchands puiflènt rien
connoître ; il eft vrai que s’ils lioientla veffie dès qu’ils l’ont coupée ,
fans lui donner de l’air & laiflèr le temps à l’odeur de perdre (à
force en s’évaporant, tandis qu’ils en tirent ce qu’ils en veulent ôter,
il arriveroit qu’en portant cette veffie au nez de quelqu’un, le fane
lui lortiroit auffi-tôt par la force de l’odeur qui doit néceflàirement
être tempérée pour le rendre agréable (ans nuire au cerveau. L’odeur
de cet animal que j’ai apporté à Paris étoit fi forte, qu’il étoit
împoffible de le tenir dans ma chambre, il éntêtoit tout le monde du
logis, & il fallut le mettre au grenier, où enfin mes gens lui coupèrent
la veffie, ce qui n’a pas empêché que la peau n’ait toujours,
retenu quelque choie de l'odeur. On ne commence à trouver cet
animal qu’environ le cinquante-fixième degré; mais au foixantième,
il y en a grande quantité, le pays étant rempli de forêts : il eft vr(,j,
qu’aux mois de Février & Mars, après que ces animaux ont fouflèrt.
la faim dans le pays où ils font, à caufe des neiges qui tombent en
quantité, jufqu’à dix ou douze pieds de haut, ils viennnent du côté
du midi, julqu’à quarante-quatre ou quarante-cinq degrés pour mangerr
du blé ou du ris nouveau, & e’eft ence temps-là que les paylâns les
attendent au paflàge avec des pièges qu’ils leur, tendent, & les tuent
à coups de flèches & de bâtons;' quelques-uns d’eux m’ont affitré:
qu'ils font fi maigres & fi languiflans à caufe de. la faim, qu’ils ont'
fouftèrte, que beaucoup fe laiflênt prendre à la courfe. II. faut qu’il)
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