24 H i s t o i r e N a t u r e l l e
qu’il a vu , mais ne font que des copies prifes du revers
de la médaille de l’Empereur Adrien, & du cololïe
du Nil à Rome : ainfi l’on doit encore reculer l’cpoque
de nos connoiffances exaétes fur cet animal, jufqu’en
1 603, que Federico Zerenghi, Chirurgien de Narni
en Italie, fit imprimer à Naples l’hiftoire de deux hippopotames
qu’il avoit pris vivans, & tués lui-même en
Égypte, dans une grande fofle qu’il avoit fait creufer
aux environs du Nil , près de Damiète ; ce petit
ouvrage écrit en Italien, paroît avoir été négligé des
Naturahftes contemporains, <3c a ete depuis abfolument
ignoré ; cependant, c’eft le feul qu’on puiffe regarder
comme original fur ce fujet. La defcription que l’Auteur
donne de l’hippopotame, eft aulfi la feule qui foit
bonne, & elle nous,a paru fi vraie, que nous croyons
devoir en donner ici la traduébion éc 1 extrait.
«Dans le delfein d’avoir un hippopotame, ( dit
« Zerenghi ) , j’apoftai des gens fur le Nil, qui en ayant
» vu fortir deux du fleuve, firent une grande fofle dans
» l’endroit où ils avoient paffé, & recouvrirent cette
» fofle de bois léger, de terre & d’herbes. Le foir, en
» revenant au fleuve, ces hippopotames y tombèrent tous
» deux : mes gens vinrent m’avertir de cette prife, j ac-
« courus avec mon JanifTaire, nous tuâmes ces deux
» animaux en leur tirant à chacun dans latete trois coups
» d’arquebufe d’un calibre plus gros que les moufquets
» ordinaires : ils expirèrent prefque fur le champ & firent
»un cri de douleur qui reflembloit un peu plus au
mugiflfement
mugiiïement d’un buffle qu’au henniflement d’un cheval. «
Cette expédition fut faite le 20 juillet 1 600; le jour «
fuivant, je les fis tirer de la fofle & écorcher avec foin , «
l ’un étoit mâle & l’autre femelle , j ’en fis faler lesp eaux : «
on les rçmplit de feuilles de cannes de fucre pour les «
tranfporter au Caire, où on les fala une fécondé fois «
avec plus d’attention & de commodité ; il me fallut «
quatre cents livres de fel pour chaque peau. A mon «
retour d’Ëgypte, en 1 6 0 1 , j ’apportai ces peaux à «
Venife & de-là à Rome; je les fis voir à plufieurs «
Médecins intelligens. Le doéteur Jérôme Aquapen- <c
dente & le célèbre Aldrovandé, furent les feuls qui «
reconnurent l’hippopotame par ces dépouilles ; & <c
comme l’ouvrage d’Aldrovandé s’inîprimoit alors, il «
fit de mon confentement defliner la figure, qu’il a «
donnée dans fon livre, d’après la peau de la femelle. «
L ’hippopotame a la peau très-épaifle & très-dure, «
& elle eft impénétrable, à moins qu’on ne la laifle «
long-temps tremper dans l’eau ; il n’a pas, coin me «
le difent les Anciens , la gueule d’une grandeur mé- «
diocre, elle eft au contraire énormément grande ; il «
n’a pas, comme ils le difent, les pieds divifés en deux «
ongles, mais en quatre; il n’eft pas grand comme un «
âne, mais beaucoup plus grand que le plus grand «
cheval ou le plus gros buffle; il n’a pas la queue «
comme «selle du cochon, mais plutôt comme celle«
de la tortue , finon qu’elle eft incomparablement «
plus grofle ; il n’a pas le mufeau ou le nez relevé en «
Terne X I.I D