I N T R O D U C T I O N ,
P A R LACÉPÈDE.
L ' H I S T O I E E ne nous montre aucun peuple parvenu au-delà des
premiers degrés de la civilisation, que nous ne voyions parmi les
établissements qu'il se plaît à créer, des ménageries élevées autour
des demeures des hommes puissants qui le dirigent. Le besoin les
a formées. L'orgueil les a étendues.
Lorsqu'une nation entourée d'ennemis dangereux , contrainte
de partager son territoire avec des bêtes féroces, ne labourant que
pende champs, et ne rassemblant que peu de troupeaux, a vu
des guerres cruelles et des chasses périlleuses se succéder mutuellement
et sans intervalle, les chefs ont dû employer la supériorité
de l'inteUigence humaine, à trouver des auxihaires u tiles parmi les
animaux qu'ils avaient domptés. Indépendamment du chien et
du cheval, les compagnons courageux et fidèles de l'homme,
ils ont, suivant les contrées qu'ils habitaient, di'cssé pour la
chasse ou exercé pom la guerre, le Cormoran, le Faucon, l'Aigle,
l'Isatis, l'Once, l'Éléphant; ils les ont retenus, nourris, soignés
dans de vastes enceintes : et voilà les premières ménageries , fouvrage
du besoin.
Bientôt les chefs des peuples ont voulu réunir à la réalité du
pouvoir, tous les signes de la prééminence, de la force. Pendant
qu'ils élevaient des trophées, qu'ils entassaient les dépouilles des
vaincus , cpi'ils se couronnaient des palmes du guerrier , ils ont
désiré de laisser des souvenirs durables des exploits du chasseur.
Dans cette enfimce des sociétés, où les destructetns des monstres
recevaient les honneurs du triomphe, comme les vainqueurs des
hordes ennemies, ces mêmes chefs conservant les produits de leur
chasse, avec autant de soin que les fruits de leurs concpiètes, et
aussi glorieux de l'esclavage imposé aux animaux les plus terribles,
que des fers donnés aux ennemis les ])lus redoutables, ont construit
à côté des monuments qui rappelaient leurs victoires , de