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4 L A C I V E T T E.
général que l'une ou l'auire espèce habite dans toute la région chaiidc de celle panie
du monde, depuis l'Arabie jusqu'à la Nouvelle Guinée, si même plusieurs de ces voyageurs
n'ont pas pris pour elles l'espèce beaucoup plus pelile ei à laches plus dislinctes,
décrite par Sonnei-at, sous le nom de Civette de Malacca, et par Bullbn, sous celui de
Genette àu Cap (i).
On a cru long-lemps, sur la foi des éditeurs d'IIernandès, que la Civetlc habitait
aussi en Amérique 5 en eflet, Recclii avail laissé une figure assez exaele du Zil)Clh, sous
le nom. à'animal Zihelhicum Jmericanwn ^ el le capucin Bolivar avail raconlé à Faber,
que cet animal se irouvaii dans toute l'Amérique méridionale conune en Afrique,
et même qu'on faisait au Brésil un gi-and commerce de son parfum-, mais Buffon, et
d'aprèiilui Zinmiermanu, observent que Fernandès dil positivement qu'il n'y a de Civettes
en Amérique que celles qu'on y appone des Pliilippines : il est vrai (]ue M. d'Azzara
cherche à excuser Bolivar, en disanl qu'il a JÎU ¡)rendrele ! iverra vittata du Brésil
pour une Civette, parce qu'il sentie muscquandon l'irrite; mais il faudi-a toujours que
ce religieiLx ait manqué de mémoire, lorsqu'il a avancé que les Brésiliens en recueillaient
et en vendaient le parfum.
Cette substance se prend sur des Civettes domestiques et vivantes, ou bien elle se
recueille sur les rochers et sur les arbustes où les Civettes sauvages s'en sont débarrassées,
car elle les incommode lorsqu'elle est irop abondante. On s'apperooit de cette
abondance à l'inquiétude que ces animaax manifestent, et aux mouvemenls qui les
agitent, el on les en délivre en les saisissant par les pieds et par la téte, et en introduisant
une petite cuillère dans la bourse qui recèle la pomjnade odorante. Leui- sueur
répand aussi une odeur de musc; mais l'opinion de ceux qui prétendent (ju'on mêle
cette sueur à la vTaie Civette pour en augmenter la quantité, n'en est pas moins irèsinvraisemblable.
Comment la recueillerait-on, et à quoi monterait-elle quand elle
serait desséchée? Il faut tenir ces animaux sèchement et proprement, et les Lien nourrir;
mieux ils le sont, plus leur parfum est abondant. Les mdles donnent plus de pommade
que les femelles; mais l'odeur de celles-ci est du double plus forie, selon quelques
auteurs. Cette odeur est d'une force insupportable lorsque la matière est fraîche;
ce n'est qu'après un certain temps qu'elle s'aiTaiblii assez pour devenir agréable. Les
Civettes aiment le sucre, les oeufs, les petits oiseaux et surtout le poisson. Quehjue
cher que soit leur entrelien, il paraît qu'on trouve encore un assez grand profil dans
la vente de leur parfum. Il y en avait autrefoisà Lisbonne qui étaient d'un grand revenu
poin- leurs propriétaires. Buffon dit qu'on en élève encore à Amsterdam pour en recueillir
la Civette.
Pendant que les Français occupaient l'Egypte, le roi nègre du Darfoulir envoya
quatre Civetlcs à leurs principaux généraux. On apprit à celle occasion quelques
détails qui m ont été communiqués par mon savant ami, le professeur Oeoffrov ; les
( i ) On ne sait pourquoi la note manuscrite de Sonnerai, d'après lacpicile Bullón a rédigé l'arlicle
de cette Genette du Cap, n'est pas d'accord avec ce que le môme Sonnerai dit, dans son voyage, de
la Civette de Malacca ; mais il suffit de comparer les deux iigures pour voir (pi'elles appartiónenl au
même animal.
LA CIVETTE. 5
Darfouriens onl peu de Civettes ; elles leur viènent de régions encore plus éloignées 5
niais voici comment ils s'y prènent pour en augmenter le produit : on place dans la
poche à musc un petit morceau de beurre ou d'autre corps gras ; on agite alors l'animal
en le secouant avec force par les pieds, et même en le frappant de façon à le mettre
dans une sorte de fureur; cette pression accélère la sécrétion de la matière odorante,
et le corps gras s'en pénèti'e tellement, qu'il a presque autant d'effet que la pommade
elle-même: les femmes du Darlbuhr employent ce beurre imprégné de Civette pour
huiler leurs cheveux. C'est sans doule au traitement barbare que les Civettes ont
éprouvé dans ce pays-là, qu'elles doivent en grande partie la lerocilé (ju'elles nous
nioutrent.
L'individu que notre planche représente, avait été acheté à Nantes, d'un capitaine
qui revenait de la traite des Nègres, et qui assura que cette Civette était âgée de deux
ans. Elle en a vécu cinq à la ménagerie, ne s'y nourrissant que de chair, dont elle
mangeait environ deux livres par jour; elle buvait un ou deux verres d'eau. Sesexcréments
étaient fortdurs,et semblables, pour lagi-osseur et pour ia couleur, à des grains
de café: elle urinait en arrière, irès-peu àia fois, et son urine était très-infecte.
Son odeur musquée était continuelle; mais elle devenait plus forte qu'à l'ordinaire,
lors(|u'on irritait l'animal : dans ces moments-là il tombait de sa poche de petits grumeaux
de matière odoriférante; lorsqu'on le laissait tranquille, il en tombait aussi,
mais de loin en loin, et seulement tous les quinze ou vingt jom-s.
Cette Civette passait presque tout le jour et toute la nuit à dormir, se tenant roulée
en rond et la têie entre les jambes ; il fallait la menacer ou la frapper pour qu'elle se
l'clevdl.
La meilleure figure delà Civette, avant celle que nous publions, est cellede Perrault ;
vient ensuite celle de Buffon; celles de Jonhston et de Blasius peuvent passer pour
médio<'res, et les autres pour mauvaises.