2 L' T C H N E U M O N .
même longueur. Son poil esl à peu près annelé comme dans l'espèce précédente 5 mais
les anneaux bruns y soni plus larges^ les paties sont noires ainsi que le museau 5 mais
e'esl surtout aune loulTede Ionics poils noirsqui terminent sa queueetquiserayonncni
de haut en bas en éventail, que se reconnaît l'Ichneumon.
D'ailleurs, ces trois espèces se ressemblent si parfiiitement pour les proportions des
parties, qu'il n'est pas étonnaui qu'on les ait souvent confondues ensemble. Leur tête
est courte, un peu aplatie siu' le front, et à cela près exactement conique; la lèvre supérieure
est un peu plus avancée que l'inférieure. Des six incisives, il y en a deux, à la
mâchoire du dessous, les secondes <lonts de chaque côté, qui sont plus étroites, et qui
sont forcées de rentrer un peu en dedans par le défaut d'espace. Le poil est ras sur la lête
et les pattes ; il est long et rude sur tout le corps. La brièveté des pattes donneaux Mangoustes
le port des Furets et des Fouines: jusqu'ici on ne savait pas si ce petit genre
appartenait plutôt à l'ordi-e des planligrades qu'à celui des digitigrades; on était porté
à croire, d'après Ja longueur des tarses, que les Mangoustes marchaient sur les doigts, et
d'après la nudité de ces parties, qu elles appuyaient au contraire sur toute la plante du
pied. Ce qu'il y a de certain à cet égard, et ce que nous avons vérifié sur les deux espèces
que nous avons vues vivantes, c'est qu'elles marchent habituellement sur les doigts,
et qu'elles ne posent sm- leurs talons que pendant leur repos, ou lorsqu'elles s'élèvent
sur les deux pieds de derrière pour examiner ce qui se passe autour d'elles.
Toutefois ces U-aits de la description des Mangoustes ne nous penneliraient pas de
les distinguer des Fouines, des Maries et de toutes les espèces du genre Viven a ; mais il
est deux autres caractères d'une assez grande influence qui séparent très-exactement ce
petit genre de tous les animaux qui vivent de proie. Les Mangoustes ont une langue
presque aussi rude et presqueaussi papilleuseque ceUe des Chats,et en outre une poche
au devant de l'anus. On se rappèle que c'est toujours au-dessous de cette ouverture qu'on
trouve des poches dans les Civettes et les animaux qui en sont pourvus ; mais dans les
Mangoustes, c'est au-delà du sphincter de l'anus que les téguments communs alongés et
repliés sur eux-mêmes, forment un sac que l'animal ouvre et ferme à son gré. Il faut
qu'il trouve une grande jouissance à rafraîchir le fond de cette poche, car il la met en
contact avec tous les corps froids et un peu élevés qu'il apperçoit. L'Ichneumon de la
ménagerie n'estvisité de personnequ'il n'aillese posersurlessouliersde tous les curieux.
Ces observations n'avaient point échappé à Beion : il parle « d'un grand pertuis tout
» entouré de poils, au-delà de l'anus, lequel conduit l'iclineumon ouvre, quand il a
» grand chaud. »
il parait que les anciens ont eu aussi connaissance de cette poche: c'est sans doute
ce qui les a mis dans le cas d'attribuer à l'Iclincumon lu plupart des contes ridicules
qu'ils ont faits sur l'Hyène : Élien di L que les Ichneumons sont hermaphrodites; qu'à la
saison d'amom- ils se battent à outrance, et que les vainquein-s se réservant les droits
et les jouissances des mdles, soumettent les vaincus à la condition des femelles.
L'Ichneumon, quoiqu'assez commun en Égyple, m'a peu foui-ni l'occasion de l'y
observer. Il est très-difficile de l'approcher; je ne connais point d'animal plus craintif
et plus défiant; il n'ose se hasarder de courir en rase campagne; mais il suit toujours,
ou plutôt il se glisse dans les petits canaux ou les sillons qui servent à l'irrigation des
L'I C H N E U M G N. 5
terres: il ne s'y avance jamais qu'avec beaucoup de réserve; il ne lui suffit pas d'appcrcevoir
qu'il n'y a rien devant lui dans le cas de lui porter ombi'age; il ne s'en rapporte
point à sa vue, il n'est tranquille, il ne continue sa route que quand il l a éclairée par
le sens de l'odorat: telle est sans doute la cause de ses mouvements ondoyants, et de
l'allure incertaine et oblique qu'il conserve toujours dansla domesticité. Quoiqu'assuré
de la protection de son maître, il n'entre jamais dans un lieu (¡u'il n'a pas encore pratiqué,
sans témoigner de fortes appréhensions: son premier soin est de l'étudier en
détail, et d'en aller en quelque sorte tâler toutes les surfaces au moyen de l'odorat.
Cependant on dirait qu'il a quelque peine à percevoir les émanations odorantes des
corps; ses efforts pour y réussir sont rendus sensibles par un mouvement continuel de
ses naseaux, et par un petit bruit qui imite assez bien le souffle d'un animal haletant et
fatigué d'une longue course. Il faut que ce soit pour suppléer à la faiblesse de sa vue
qu'il fasse un si grand usage du sens de l'odorat ; et comme alors il n'acquiert de notions
distinctes des corps que lorsqu'il en est à portée, on ne doit pas s'étonner qu'il vive dans
une défiance perpétuelle de tout ce qui l'entoure.
Pour connaître jusqu'où il portecene défiance, il faut le voir au sortir d'un sillon
lorsqu'il se propose d'aller boire dans le Nil. Combien de fois il lui arrive de regarder
autour de lui avant de se découvrir! Il rampe alors sur le ventre; il n'a pas fait un pas
que, saisi d'effroi, il fuit en marchant à reculons; ce n'est qu'après avoir beaucoup hésité
et flairé tous les corps environnants qu'il se décide, et fait un bond ou pour aller
boireou pour se jeter sur sa proie.
Un animal.d'un caractère aussi timide devait être susceptible d'éducation, et en
effet on l'apprivoise très-facilement: il est doux et caressant; il distingue la voix de
son maître et le suit pi'esque aussi exactement qu'un Chien : on peut l'employer à nettoyer
une maison de Souris et de Rats, et on peut être assuré qu'il y aura réussi en bien
peu de temps. II n'est jamais en repos, furète sans cesse partout, et s'il a flairé c|uelque
proie au fond d'un trou, il ne quitte point la partie qu'il n'ait fait tous ses efforts pour
s'en saisir: il tue sans nécessité; il se contente alors de sucer le sang et le cerveau des
animaux qu'il a mis à mort ; et quoiqu'une proie aussi abondante lui soit inutile, il ne
souffre pas qu'on la lui relire; ila coutume de se cacher pour prendre ses repas; il s'enfuit
, avec ce qu'on lui donne, dans l'endroit le plus retiré et le plus sombre de l'appartement
où on le tient ; il ne faut pas alors l'approcher, il défend sa proie en grognant
et même en mordant.
Ces habitudes lui sont communes avec les gi'andes espèces carnivores, le Lion, le
Tigre etc. ; il en a d'autres par lcs([uelles il ressemble davantage au Chien, comme de
lappcr en biivanl,eL de pisser eu levant une de ses jambes de derrière; quand il a bu,
il renverse son vase de manière à se verser sur le ventre toute l'eau qui y était contenue.
L'Ichneumon se nourrit en Égypte de Rats, de Serpents, d'oiseaux etd'ceufs. L'inondation
l'obligeant d'abandonner les campagnes, il se réfugie aux environs des villages
auxquels il fait un grand tort en se jetant sur les poules et les pigeons : cependant
les Égyptiens ne s'effrayent pas beaucoup de ses dévastations ; ils se reposent du soin
de le détruire sur le Renard et le Chacal que les grandes eaux font aussi déserter les
plaines : les Ichneumons jetés au milieu d'ennemis aussi rusés et réunis sur un terrain