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est à peine de huit pouces, mais ils croissent encore de sept ou huit pouces pendant les
trois premiers mois. Ils restent un mois les veux fermés, et la mère les allaite pendant
plus do trois. Un Oiu-s femelle a encore mis bas à plus de trente-un ans. Toutes ces
observations ont clé faites sur nos Ours pendant qu'ils étaient dans les fossés de Berne;
on sait qu'on les J élevait, ,iarce que le mot haer et haci-en au pluriel, signifie Ours en
allemand, et parce <|uc la ville avait la figure de cet animal dans ,.es arntoiries.
J'ai vu un Ours de plus de trois pieds de longtteur, (|ui avait conservé le collier
,,ui fait la livTée du premier ige ; seulement il était devenu un peu jaune : une femelle
de quinze ans, actuellement dans notre ménagerie, en a encore des vestiges sur les
côtés du cou.
L'Ours ne dort pas toujours dans sa retraite d'liiver;mais la quantiléde graisse (pi d
a accmmilce pendant la belle .saison, lui rend l'abstinence po.ssible et même nécessaire.
Cette retraite commence et f.uit avec les grandes gelées ; elle dure donc .l'autant moins
que le pays est plus doux; l'Ours «dioisil un tronc d'arbre creux, ou un antre souterrain,
on quelque trou de roche, et lors.,.fil ne trouve auctme cavité natm'clle, il se fait
une hutte avec des branches et des fe.iillages, .,u'il garnit soignensement de mou-sse en
dedans. Les deux sexes ne se rémiisscnt pas; au contraire, la femelle semble craindre
le mile; non setdement elle vit trés-retirce .lès l'instant .[u'elle a conçu, mais elle
reste dans sa tanière beaucoup plus lard que le mdle dans la sienne, et autant de temps
qu'il en faut pour .[ne ses petits puissent la suivre. Elle dévore son arrière-faix, ce qui
sert à la soutenir plus long-temps dans .-ette retraite : c'est sans doute pom- l'avoir vue
enlevant avce sa gueule cette enveloppe à ses petits, qu'on aura dit .|u'clle ne met bas
que des masses il'inie cl.air informe qu'elle fa.-onne en les léchant. Les deux sexes
tirent aussi, .lit-on, quelque nourriture en suçant letn-s pieds; ee .pf il y a de sûr, c'est
que lejenneOtn-s dont j'ai parlé plus ha.it,suçait perpétuellement son pie.i de devant
comme s'il eut tèté. Les anciens ont é.-rit que l'0..rs, au sortir .le .sa retraite, mange
de la plante nonmiée arum ou pk-d rie veau, apparemment pour réveiller, par ce
remè.le acre, ses intestins si lo.igtcm]>s ina.:lifs.
L'Ours brun est un animal propre aux régions montagneuses et b..i.sées des .Jimats
froids et tempérés de l'ancien monde. Il y en avait, .lu temps des K.imaius, .lans tout
l'Appennin; aujourd'hui ils ne se trouvent plus .pie .lans .ses parties les |.lus dé,sertes:
ils sont a,ssez communs .lans toute la chaîne des Alpes el .lans les Pyrénées; il s'en
égare encore quel(|uefois .le S.iisse .lans les dcpai-lcments limitrophes de la France.
La Savoye en a toujours eu, ainsi que les' montagnes de Bolithne, de Hongrie, de
'l'hra.;e,'ct les gran.les ftiMlts .le P.ilog.ic et de Kussie. Ils sont anssi trè.s-nombrcux
.lans les montagnes el les grandes forets .lu Mor.1 de la Scandinavie. L'Angleterre, .r.iù
les Romains en liraient autref.iis, n'en po.s,scde plus an.ains, non plus .|uc rintcrieur
de la rran.M,de l'Allemagne et .le l'ICspagne. La Crète n'en a jamais eu. Ce m.hnc
Ours brun .se trouve eu Sibérie comm.. eu Hirssic; Cin.'lln en a vii ii 'l'oms.- el pri-s de
lakntsk; ainsi .-ette espèce a bien pu se porter sur l.vs inonlagnes .lu u..r.l .le la (Jimc,
où les niis,sionuaires .lisent .in'elle existe, cl sur . elles .In 'l'hibcl cl .In.nord .le l'iiidostan.
On ]>cut encore croire Koeinufer l.n'.sq.fil assure .ju'il y en a au .lapon;mais
Turpin .jui en place à Siam, Lcgeniil .|ui en met à .lava,et Knoxe .[iii en .lonneà
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l'Ue de Ceylan, méritent-ils la même confiance? El s'il y a des Ours .lans des régions
dont tontes les parties sont si chaudes, peuvent-ils être de la même espèce que les
nôtres? Zinunermann remarque déjà que s'il y avait eu des Onrs à Java, Boni,us
n'aurait pas manqué de l'annoncer. L'existence de l'Ours brun en Arri.]uc nous paraît
encore plus douteuse: Pline ayant li-ouvé, dans les annales romaines, que sous le
.-onsulat de Pison et de Messala, e'est-à-dire 6i ans avant J. C., l'édile curule Í».)-
mitim Ahénoharhm, avait montré dans le cirque cent Ours de Numidie, conduits
par autant de chasseurs nègres, rapporte ce fait avec surprise: « Je m'étonne, dit-il,
, qu'on ail employé l'adjectif immtVSr/»«', car il est ecrtain cpie l'.Vfriqne ne produit
„ point d'Ours. » Ursinus, lÂpse el Vossius ont pensé que par ces mois. Ours de
Nunildie, l'annaliste avait voulu designer des Lions, .:onnne les Éléphants furent
appelés d'abord Boeufs tk Lucauie, et ils ont rapporte des médailles de cet Ahénobarbus,
où le revers présente un Homme combattant contre un Li.)n. Mais eonnnent les
Roniains, qui, selon ee même Pline, avaient .Icjà vu plusieurs fois de nombremos
troupes de Lions, auraient-ils pu nonnner cet animal d'une manière si dctournce?
Comment sur-tout Pline aurait-il ignoré cette synonimiequi devait être encore en
usage de son temps? car on retrouve l'épithète d'ÛHcî de Lfbie dans des auteurs sps
eomemporains; Juvénal, Martial, et Virgile l'avaient employée long-temps avant eux.
Solin,el parmi les modernes, Crinitus, Saumaise, Alé-omnde et Zimmermann ont
donc pris le parti de l'annaliste, et ont soutenu que l'Ours existe en Afrit[ue .pioique
rarement. Solin dit même qu'il y est plus beau et revêtu do poils plus longs; mais le
témoignage de cet auteur, ainsi que celui de Strabon qui donne aussi des Ours à
l'Arabie, aurait besoin d'être confu-mé par celui de .pielque v.)yageurmoderne, digne
de foi sur cette matière. Or, je ne trouve que SImw qui place des Ours en Barbarie,
et il le fait dans une simple énumération, sans en rien dire de particulier cl sans q.i'il
paraisse les avoir vus; el le citoyen Desfontaines, .;e savant el courageux naturalisie,
qui a fait un long séjour à Alger, et qui a soigneusement visité l'Atlas, n'y a jamais
apperçu el n'a point enlendu parler d'Ours, .pioiqu'il se soit exaetcmenl informé de
tous les quadrupètles.ju'on y trouve, l'oncel .lit bien .pi'une .le ses mules fut blessée en
Nubie par un Ours; mais Dnwe observe qu'il aura contbn.lu le mol arabe Duhlah ,
cpii signifie une Hyène, avec Didib, qui signifie un Ours. Bruce assure même posilivemenl
à cette occasion, .[.fil n'y a .l'Ours dans aucune partie de l'Afrique. Je ne fais
pas mention de Dapper qui place des Ours au Congo. Aucun autre témoignage ne confirme
le sien, et il était trop ignorant en histoire naturelle pour que son rapport isolé
puis.se mériter .pielque créance.
La peau de l'Ours est utile comme fourure grossière mais chaude: le vulgaire .Toil
sa graisse plus propre que loute autre ii guérir les rhumatismes el autres mala.lies
locales ; la chair des jeunes est mangeable, mais on ne sert guère sur les bonnes tables
que les pieds .salés et fumés; enfin l'Ours lui-même, comme destructeur des ruches el
des troupeaux, est un animal Irès-nuisible: voilà plus de motifs .pi'il n'en (iiulpour
lui donner la chasse: on les lire à l'affût, o^t on les poursuit avec des Chiens, ou on met
le feu aux ..rbres .lans lesquels ils se retirent, et ou les lue ou les ])reu.l lors.pi'ils en
sortent, on on mêle, pour les enivrer, de r.;au-.le-vie au miel .pi'ils aiment avec