LA GAZELLE CORINNE.
jietilcs tribus, cloni il a pris les caractères clans la courbiu'e des cornes; celles doni
les cornes ne sont courbées que deux fois, et rcprcsenlent ensemble une espèce de
lyre, ont été nommées Lyriconies. 11 y en a liuii espccesde connues, doni irois,la
Gazelle, le Kevel cl la Co/v/ine, sont si voisines l'une del'aulrc, (|u'ellcs poiu-raieni
bien nYlrc que des variéicsd'une seule, ei qu'il est nicnic assez diiTicile de dclermiiicr
à laquelle des irois appartient l'individu que nous représenlons. En eflci, leurs diflercnccs
ne consisleni que dans les cornes, qui sont rondes ei grosses dans la Gazelle,
un peu comprimées dans le Kevcl, et minces et presque lisses dans la Corinne.
Notre individu les a d'une grandeur et sur-ioui d'une grosseur moindres que celles
qu'on a obscnées dans la Gazelle, et cependant elles sont plusgraniies t|ue dans la
Corinne décrite par BufTon; ainsi ce n'est qu'avec doute que nous le rapportons à cette
dernière espèce.
Cet individu avait un pied (o,54) de hauteur au gan'ot; son tronc avait un pied
(0,53) de longueur, son cou, (o,25), sa léte, (0,19), et ses cornes, chacune (0,18).
Le cou entier, le dos et la face externe des membres, étaieni d'un fauve clair-,les
flancs, d'un fauve un peu plus brun-, la poitrine, le ventre et la face interne des
membres, blancs; le bout de la queue, noir. Les oreilles étaieni gris-fauve à leur face
convexe, blanchâtres à leur base en devant, noires en dedans avec trois lignes de poils
blancs. La tête est fauve, excepté le sommet qui e.st gris clair, et une bande blanchâtre
de chaque côté, qui, après avoir fait le tour de l'oeil, se rend vers la narine. Les
poignets, vulgairement dits genoux, ont chacun une touffe de poils bruns.
Cette Gazelle avait été prise aux environs de Constantine, ville de l'état d'Alger^
elle était âgée d'environ dix-huit mois lorsqu'elle arriva ici; elle y en a vécu dix-huit
autres, toujours douce, familière, caressant tout le monde; il lui prenait seulement
des accès de gaieté, dans lesquels elle sautait irrégulièrement et blessait les jambes
des assistants avec ses corne.s. Elle faisait entendi'e alors un petit cri, assez semblable
à celui d'un lapin blessé; le reste du temps elle était muette. C'était une femelle;
pendant qu'elle a été ici, elle a jnuc deiLx fois, mais sans aucun changement de couletu;
ses cornes n'ont pas sensiblement augmenté. Elle était extrêmement sobre; une
livre et demie soit de pain, soit d'orge ou de foin et un verre d'eau lui suffisaient
chaque jour; la plus grande propreté régnait toujours autour d'elle; ses excréments
ressemblaient à ceux du mouton pour la forme et pour la consistance, mais ils
étaient bca[icou[) plus petits.
Que la Corinne soit différente ou non de la Gazelle, il paraît que l'une et l'autre
sont fort communes en Barbarie, qu'elles se répandent depuis la Syrie et l'Arabie
jusqu'au Sénégal ; on en voit dans tous ces pays des troupes innombrables courir dans
les campagnes; lorsqu'on s'en approche, elles se resserrent les unes contre les autres
et présentent les cornes de toute part. Quoique timides, lorsqu'elles sont poussées à
bout, elles ont encore assez de force pour blesser dangereusement avec leui-s cornes;
elles ne peuvent cependant résister aux grands quadrupèdes carnassiers, et ce sont
elles qui font la pâture la plus ordinaire du Lion et de la Panthère. Les Turcs et les
.\i'abes les chassent avec le chien et le faucon, ou bien avec le petit I^^opard appelé
Once: la chasse au Faucon est sur-tout l'amusement des gens riches en Syrie; on
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LA GAZELLE CORINNE. • 3
habitue l'oiseau à saisir la Gazelle à la gorge et à lui entamer les gros vaisseaux avec
ses ongles. On prend aussi ces animaux en vie, en lâchant dans la campagne <|uelque
individu apprivoisé, airx cornes duquel on attache des cordes qui se tei'iiiinenl par des
noeuds coulants. Les Gazelles sauvages auxquelles cet individu se mole, se prcnent
dans ces noeuds par les cornes ou par les pieds et tombent promptement.
La chair des Gazelles est assez bonne et tient un peti de celle du Chevreuil; elles
ont beaucoup de graisse en été et maigrissent en hiver.
Les voyageurs n'ont rien rapporté sur les circonstances de leur propagation et de
leur développement.
Élien a très-bien décrit la Gazelle sous le nom de Dorcas, que les Grecs plus
anciens avaient employé pour le Chevreuil. Le nom de Gazelle est arabe:les auteui's
de cette nation les citent sans cesse dans leurs écrits, comme des symboles de douceur,
et des modèles de grace et de beauté. Les beaux yeux se noimnent simplement en
Orient, yeux de Gazelle, et c'est bien avec raison, car il est impossible d'avoir le
regard à la fois plus doux et plus vif que ce charmant animal.
Buffon a donné une bonne figure du squelette de la Corinne et une de ses cornes ;
toutes deux se rapportent ti'ès-bien à l'individu que nous représentons ; mais la iigui'e
qu'il a donnée de l'animal entier est mauvaise. Celles du Kevel et de la Gazelle commune
sont bonnes.
Pallas avait soupçonné que la Corinne était la femelle du Kevel : mais Buffon avait
vu les deux sexes de l'un et de l'autre ; et outre la femelle que nous représentons, nous
avons vu et disséqué un mâle tout semblable.
L'intérieur de la Corinne, ainsi que des autres Gazelles, ne diffère en rien
d'important de celui du Mouton et de la Chèvre.
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