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iiremicr qui reconnut la véritable lljène, fut le eélèbre Au^ev du Dusba-,
ambassatleur de l'Empereur près <le Soliman II, qui l il deux <lc ces animaux à Constanlin
o p l e ; ce (|ui est singulier, c'esl qu'il les reconnut par lu, caractère faux; la
rigidité de leur cou lui lit croire qu'elles n' j avaient point de vertèbres. Koempfer ayant
vu ensuite I'Hvcne eu Perse, la décrivit sans éiiuivo(iue, et ilès-lors les opinions des
natiu'alistes n'ont plus varié à son sujet.
L'Hyène ne peut rester dans le genre duCl i ien, où l'a placée Linnoeus; ses mtichoircs
plus courtes et plus fortes, armées rie quatre dents de moins, la rapproclieut des
Tigres, ainsi que les pi(|uants qui garnissent le milieu cl J'cxlrèmitc de sa langue. Ce
dernier caractère lui est aussi conunun avec les Civettes, dont elle se rap|)roclie ciirore
par la poclic qu'cllea .sotis la queue. Eunn le n<unbre de ses doigts, qui est de qtiiitre
senleiùent i clia(|ue pied, suffirait seul pour la distinguer de tous les autres grands
carnassiers. Ses intest ins dilTèrent peu de ceux des Tigres ; on remarque dans .son squelette
la brièveté des lombes, compo.sés de quatre vertèbres seulement, et le petit os
qui tient lieu de pouce, mais qui reste caché sous la peau. La poclie qu'elle a sous la
(|ueue, est leréceptacled'unehmneiu-onctueuse et fétide, fournie par |)lusieurs glandes
particulières.
L'a.specl de l'Ilvcnc a quelque clio.se de bizarre et d'effrajant; son museau coiu't et
tronqué, sa gueule fendue, ses grandes oreilles imes, la crinière qu'elle relève, la
férocité continuelle tie ses menaces, alTectent désagréablement ; mais ce qui surprend
le plus en elle, c'est sa dèmarclic;clle tient son train de derrière toujours beaucoup plus
bas i|ne celui de devant, non ipt'll soit tel par la proportion des os qui le composent,
mais parce qu'elle en plie fortement toutes les articulations, et cette lial)itude lui
donne l'air de boiter lorsqu'elle commence à marcher. Les autetn-s Arabes ont obscn é
ce boitement; Bruce et Skioldebrand l'ont confnmé, et l'Ilvène de la ménagerie le
montre d'une manière très-marquée.
L'individu qite nous décrivons, et^qui a été acheté eu Angleterre pour la ménagerie,
mais dont on ignore le pays natal, a tout le poil d'un gris-blanc, ttn peu tirant sur le
jauUiUre; des bandes transvensales irrégulières, d'un brun noir,oeeiqient les côtés du
cou, ceux dit <-orpset les membres; la crinière et la (¡neuesont toutes grâses, lede-ssons
du corps blanchâtre, la gorge et le dcs,sous du cou d'un brun noir, le front et les joues
d'un gris fauve, le museau presque nud d'un bnul foncé,ainsi i|ue la face externe des
oreilles (|ni est aussi presque nue; leur face inlerne est garnie de poils gris. Les deux
Hyènes décrites par Buffon avaient à peu près les mêmes couleurs, mais ou rencontre
aussi quelqttes variétés <à < et égard. Un individu conservé dans le cabinet, a tout le
fond du poil d'un jaune-rou.ss;\lre pille, et les tacites d'un rauve-rous,sâtre un peu foncé.
Un autre individu également conservé au cabinet,est presque enlièrement (l'un brun
noirâtre; quelques taches grisâtres aimonceiu à peine la direction des bandes ([u'on
voit sur les detix premiers. Celui-ci est probablement de la variété ob.servée par
Brttce en Nubie et eu Aby.ssinie.
L'Hyène vivante n'a [)u être mt^surée à cause de sa férocité; elle paraît avoir trois
pieds et demi de longueur; l'indiviilu jaunâtre a trois pieds .six pouces, et le brun,
trois pieds dix pouces. Bullbii en a observé une de trois |)ieds uetifpoLt(;es,et une autre
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(le trois pieds deux pouces^mais il y en a debeaLu^oLipplus grandes. Félix Cassai en a
vu,en Barbarie, de près de cinti pieds, eL celle irAbyssinie, décriie jiar Bruce, avait
cinq pieds ncurpoucres anglais.
L'Hyène esi irès-lbric 5 celles qu'on a fait combattre en Europe, se soni rendues
maîtresses des plus f^i-ands chiens ; elles commencent toujours par leur couper les
jambes, avec les dénis, avant de les étrangler. Koempfer raconte qu'elle a faii quelquefois
fuir des lions ^ ei en efiet, lorsque Fou considère la grandeur de ses dents et l'épaisseur
des muscles de ses miu-hoires, on juge que sa morsure doil être terrible. Elle emporie,
dil-on, le corps<run homme dans ses dents sans le laisser touclier à terre. Elle
joini àsa force une insatiable voracité^ toutes les nuits elle vient dans les villes pour y
ramasser les inunoutlices, les charognes cl tes restes des bôtes tuées aux boui heries ; en
.àbvssinie,où une coutume horrible laisse épars dans les rues les cadavres des personnes
exécutées, des troupeaux d'I-lyènes descendent chaque nuit des inontagnes pour s'en
repaître; les passants en sont i|uelquefois poursuivis; elles s'introduisent même dans
les maisons où elles dévorent jus<|u'aiLxsuifs et aux pelleteries; elles rodent autour des
troupeaux, suivent sansrelàchelescaravannes,non seulement pourdévorer les cadavres
des animaux et des hommes (|ui meurent en route, mais pour attaquer tout ce ([ui
s'écarte; elles se jètent plutôt sur les mulets et sur les iines(fuesm'les cavaliers; mais la
chair qu'elles aiment le mieux, est celle des chiens qu'elles poursuivent cl qu'elles
cornbattenl partout avec une espèce de furem-: ce fail avait déjà été remarque dans la
Bible. Lespierresct les épines donl les Mahomélans ont soin de garnir leurs tombeaux,
n'empêchent pas les Hyènes de venir les violer et d'en enlever les corps. Cependant cet
animal peut aussi prendredesnonrrituresvégéiales^enBarbarieetenSyrie il recherche
avec avidité les oignons et les racines charnues des diverses plantes, et creuse là terre
pour les trouver. Félix Cassai, gardien de la ménagerie, en a long-temps possédé une
qu'il nourrissait avec du pain et du lait.
En général, lorsque rH\ène a saisi t|uelque chose avec les dents,elle ne liiche prise
qu'avec la vie. Les Maures lui doimenl à prcmlrc un des bouts d'un grand sac iàit
exprès, et une fois ([u'clle le tient dans sa gueule, elle se laisse traîner et même percer
de coups plutôt que de l'abandonner, (^SJàolclc'hruiul, uarrallo de ïïyoena, no\'. ad.
vol. I, p. 80); aussi a-l-elle fail proverbe, et pour désigner unopinidlre,ondil:
il a une télé d'Hyène. En Jîarbarie, cet animal est craintif le jour; on peut enfermer
alors avec lui des animaux faibles sans c[u'il y louche, tandis • (lue la mut il les dévorerait
sans pitié. Lorsque les chasseurs pénèlrenl dans sa caverne avec des llambeaux, ils le
saisissent sans qu'il fasse de résistance et le ira înentdeiiors avec un lacet ; mais Bruce dit
<jn'cn Ahyssinie, où les I lyènessont plus grandes et habituées à la chair humaine, elles
oiu plus de courage, chassent en |)Iein jour les animaux et attaquent l'honmie toutes
les fois (pi'clles sont en force. Ludolphe dit aussi qu'en Abvssinie l'Hvène attaque
l'honnne et vient forcer les j)ûries des élables en plein jour. Une Hyène de Barbarie,
qui avait élé prise au )")iége,eut la foi'ce de se couper elle-même lajambe pour s'échapper;
Félix a été témoin de ce iiiit auprès de la Calle.
L'opinion générale est que l'Ilyène ne s'apprivoise pas; celle de la ménagerie est encore
absolument féroce; elle sendile haïr son gardien plus encore que toute autre