OBSERVATIONS CÉXÉEALES. Les arbrcs, indc'pendamniciit dc leur utilité, de leurs
produits ou <le leurs agréineus, se lieut plus ou moins avec nos idées, nos
aHectious, selon les rap]>orts d'ancienneté, j'oserais dire de connaissance, qui
existent entr'enx et nous. Tel séduisant que puisse être à uos yeux l'arbre
exotique nouvellement cultivé dans nos serres ou dans nos vergers , s'il excite
notre admiration, si nos yettx se lixent avec plaisir sm ses rameanx fleuris,
il ne nons fera jamais éprouver cette douce émotion que nous ressentons à
la vue d'un arbre qui nous est connu <lepuis notre enlimcc, qui nous a tant
de fois protégé de son ond)rc, nourri de ses fruits, recréé par son bel aspect,
qne nous rencontrons par-tout, et qui nons rappèle souvent des circonstances
cle notre vie, dont lo, souvenir est une, nouvelle jouissance.
C'est sous ces rapports intérossans que le Noyer, ainsi que beaucoup d'autres
arbres, se présente "a notre imagination ; ct lorsque son nom vient frapper nos
oreilles, ou sa présence notre regard, ce n'est pas seulement un arbre orné de
tous SCS attributs, qui vient se poindre à notre pensée, mais il fait renaître en
même tems quelques-uns des beaux jours cle notre jeunesse. Combien de fois,
h l'époque dc la maturitc, ne l'avons-nous pas lacéré et mutilé à coups de pierre
on dc baton '1';, dans l'espoir do hû dérober quclipies-uus de ses fruits. Cotte
petite guerre innoconle, qui excrc^ait eu même tems notre adresse et développait
nos forces , avait toujours des suites agréables. Los noix obtenues par droit de
conquête, étaient encore les inslrumcns de nouveaux jeux, et la récompense du
vainqueur. Si ces rédoxions paraissent niituilicnses à qiiolcpu-s esprits froids ct
sérieux, ils ne se rappcleront pas sans iiUérct que ces jeux <latcnt dc loin, qu'ils
étaient en usage parmi la jeunesse romaine, qu'Ovide les a décrits dans nn petit
poème intitidé de JS'uce, <pj'ils étaiem plus variés qne chez niuis. C'est ii raison
sans doute dc ccs jeux de l'enfance, que los nouveaux époux jetaient des noix
anx enfans de la noce, soit ponr fournir ans amuscmcns de cette jeunesse, soit
pour signifier cpi'ils renonç.nicnt anx jeux du jeune âge , et qu'ils devcn.iicnt
hommes. On distribuait encore des uoix aux Romaitis pendant la ci-Iébration des
Fêtes Cc'réales. Dans l'institution de la foie de la Rosière de Salency, établie par
St.-JIodard, il était ordonné (jn'on présenterait h la jeune fille couronnée, au
retour de la cérémonie , une collation composée dc noix ct dc quelques autres
I'ruits du pays. I.es noix ornetit rarement les t.iblos de Topnlonoe et du luxe,
mais elles paraissent dans les fetes champi-tros, comme remhlc'me de la simplicité des
mcL'urs dc nos premiers porcs, et de la frugalité dc leurs repas : il semble que
ce soit un reste précieux de ces siècles recnlrs que l'on a nonmu-s l'âge d'or.
]1 est bien certaiti d'ailleurs (pu- le Noyer est comm depuis un très-grand nombre
de siècles, qu'il devint Tètre par Tlu^qdiraste, quoiqu'on soit fort embarrassé
pour retrouver dans ses ouvrages le nom (pi'il lui donne, Quelques-uns ont prétendu
que c'est l'arbre qu'il appelle Carj'nn ; mais le défaut de description, et le peu
qu'il en dit, laisse beaucoup d'incertitudes ct ne permet pas de prononcer.
Le Noyer n'est point indigène dc l'Europe, mais il y existe depuis si long-tems,
qu'il y jouit de tous les droits des arbres qui y croissent naturellement. Originaire
de la Perse, 011 on le trouve encore dans son état sauvage an milieu dos forêts, il
occupe une jilace dislinguée parmi les arbres de nos vergers. Le nom de Jitglans,
traduit du grec, que nous lui avons con.servé, semble être une preuve de sa hante
antiquité, el nous reporter ii ce tems on los glands formaient la ])rincipalc nourriture
(i) Nujc ego j une ta !•
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