célèbrent également chez les Abyssins en réunions
qui offrent quelque intérêt par les usages auxquels
ils donnent lieu. Dans le cours de notre relation nous
avons eu l’occasion de dépeindre la plupart d’entre
elles, surtout celles relatives au mariage. Les funérailles
appellent aussi un très-grand concours de
peuple, et sont accompagnées de coutumes assez
curieuses.
Aussitôt qu’une personne a rendu le dernier soupir,
les parents poussent des cris de désespoir et s’arrachent
la peau du front et des tempes ; les femmes et
les enfants se coupent les cheveux en signe de deuil *.
Au milieu d’une compagnie où nous nous trouvions,
quelqu’un vint apprendre la mort d ’un parent qu’on
n’avait vu depuis fort longtemps et qui vivait à une
très-grande distance. Ce fut alors à qui pousserait les
plus forts gémissements, répandrait les plus chaudes
larmes. Nous vîmes de la désolation pour quinze jo u rs,
et pensâmes à nous retirer par discrétion. Mais bientôt
les faces se rassérénèrent, les pleurs furent séchés; et
au bout de quelques instants on reprit la conversation,
les occupations et les plaisirs au point où on les avait
laissés.
Trois ou quatre heures après la mort, on procède à
l’enterrement. Si le défunt est un soldat, ses compagnons
d’armes, suivis de leurs serviteurs, l’accompagnent
au champ du repos. L’usage des salves de mou-
squeterie tirées sur la tombe existe comme en Europe;
puis tout le cortège retourne à la maison mortuaire, et
1 Palestine, p. 378 et suiv., t. II.
un orateur entame une oraison funèbre sous forme de
versets, dont chacun célèbre une qualité du défunt1. A
la fin de chaque verset, les assistants exclament en
choeur oyé ! oyé ! chanté sur un certain rhythme et accompagné
de sanglots. Tant que dure cette cérémonie,
les parents ont la tête couverte de leur toge et ne cessent
de pleurer. La facilité des larmes est tellement
grande chez ce peuple que sur mille assistants, au
moins, réunis dans un enterrement, et dont le plus
grand nombre ne porte aucun intérêt au mort, il n ’en
est pas un qui ne sanglote de la manière la plus expressive,
et q u i, au sortir de l à , ne se mette à rire avec
tout autant de naturel.
Dans le chapitre îv de la relation nous avons décrit
le cérémonial de l’inhumation d’une jeune fille.
Relations privées. —[ Les Abyssins sont très-portés
aux baisons intimes ; elles se forment ordinairement
entre individus de même classe, e t, en Abyssinie
plutôt que partout ailleurs, sont fondées sur les convenances
de position, d ’âge et de caractère. Il y a plusieurs
de ces intimités assez nettement caractérisées;
la plus étroite et la plus sûre est celle que le Kâle-
Kidane a consacrée, d’autant plus qu’elle a ordinairement
sa garantie dans une certaine conformité d’intérêts,
Nous avons d it, dans l’Introduction, quel était
ce genre d’alliance.
Une très-vive amitié est celle qui s’établit entre un
jeune marié et son garçon d’honneur ou musé ; elle
*' Palestine, p. 381, t. II.