T R A I T E D E S A R B R E S F R U I T I E R S.
H I S T O I R E ET C U L T U R E.
L'espèce primitive des vgrictés de groseillers à grappes se trouve dans
tous les bois de l'Europe, d o ù on l'a tirée pour la cultiver dans les jardins.
Cependant , elle ii'eioit pas connue des anciens botanistes, ou du moins
on ne la trom e dans aucun de leurs ouvrages. Tragus paroît être le premier
({ui lait décrite et figurée vers l'an i55o. Mais cet auteur qui ne
connoisHoit le vihas des Arabes {rhewn rihes. L. ) que par ses propi-iélés
médicinales, et qui relrouvoit les mêmes propriétés dans la groseille,
et une espèce de ressemblance entre ce fruit et les tubereides des tiges
et des feuilles du ribas, confondit cette dernière j)lante avec le grosciller,
en les réunissant sous le nom générique de lihes. Cet assemblage monstrueux
persista tres-longtems, parce que les botanistes arabes ne connoissoieut
pas le grosciller, et que les botanistes d'Eiuope ne connoissoient
pas le ribas des Arabes. Dillcii, botaniste anglais, ayant reçu et semé des
graines de ribas, en i ^ j o , reconnut pourtant que cette plante se rapproclioit
des oseilles. Enfin Linné la rangea parmi les rliidjarbes dont elle
est une véritable espèce (i).
Depuis longtcms, l'usage de multiplier le grosciller par les semences
est abandonné, probablement parce qu'on n'eu obtenoit pas de meilleures
espèces. Mais les éclats enracinés, les marcottes et les boutures suffisent
il sa nu il tipli cation. Quoiqu'il ne soit pas délicat, il est nécessaire de lui
donner une terre meuble, et sur-tout an labour à chaque printems, et
plusieurs sarclages pendant l'été.
T^a fertilité extraordinaire de cet arbrisseau fait qu'on le cultive assez
négligemment. On lui conserve le plus souvent la forme d'un petit buisson
qu'il prend naturellement, en le tondant avec des ciseaux j mais cet
u.sage est très-blâmable , parce qu'on détruit continuellement les jeunes
pousses propres à donner le plus beau (riiit, et <pie l'intérieur du buisson
se garnissant de plus en plus, ie fruit qui s'y trouve ne peut jouir
(i) Vi)yez «n Mémoire de M. Uesfonlaines, daus les Annales du Muscum d'hiitoire nalurtJlc,
tom. Il, pag. 261.
T R A I T É D E S A R B R E S F R U I T I E R S,
•des bienfaits ni de l a i r ni du soleil. Il faut, au contraire, entretenir beaucoup
de vide au ceiUre, en ne laissant qu'un certain nombre de tiges ([ue
l'on arrête à la hauteur de 975 millimètres ( 5 p i . ) - Tous les ans, en
hiver ou au printems, on taille les forts bourgeons à quatre yeux, les
moyens, deux, et on laisse entières les petites brandies à fruit. Quand
ces tiges sont devenues trop grandes, ou qu'elles ne donnent plus que de
petites grappes, on les supprime successivement, en choisissant pour les
remplacer les plus forts bourgeons qui se développent chaque année.
Mais lorsciu'enfin les groseillers sont trop vieux, ils ne produisent ordinairement
que de petits fruits d'une telle acidité, dit Duhamel, que les
oiseaux même ne les mangent pas. Poui^ les renouveller, il n'est pas
nécessaire de tirer le plant d'aillem's : de jeunes bourgeons éclatés de ces
vieux pieds dégénérés, et plantés dans d'autres places ou dans les mêmes,
pourvu qu'on en change la terre, se rétabliront et donneront de beaux
fruits.
C'est ainsi que des jardiniers uitelligens cultivent le groselller dans les
plate-bandes d'un potager. Quelquefois même ils l'élèvent en boule sur une
seule tige haute de975 millimètres à i mètre 2yg millimètres ( 3 à 4 p i - )i
ce qui est préférable, nécessaire même, lorsqu'on a peu de place à donner
à cet arbrisseau. On peut encore le mettre en espalier, au midi, pour
hâter la matiu-itéde son f r u i t , et au nord povu: la retarder.
Quand les groseilles sont mûres, elles n'ont pas de plus dangereux
ennemi q u u u soleil trop ardent. Pom* les en préserver et les conserver
jusqucu novembre, on couvre les gi'oscillers avec des paillassons.
U S A G E .
La groseille rouge se mange en santé comme un fruit délicieux , et elle
n'est pas moins utile dans la maladie. On en prépare une gelée et un
siro[) propres à modérer les arilem's de la fièvre causée par une bile
lro[> e.xaltéc. l'Ule se confit eu gi-ains, eu pâte, eu conserve, en compote.
L'agréable acidité de ce fruit appaise la soif des Jiialades, et leiudonne
bonne bouclie. Le sirop de groseilles battu dans de l'eau, est d'un
usage familier, utile et agréable en été. Dans les diarrhées et les coliques