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T R A I T É DES A R B R E S F R U I T I E R S.
espaces considcrabJes de lorrain sablonneux aux lisières des bois et dans
les laillis découverts où il croît naturellement. Sa principale racine, assez
ordinairemcni couchée ou oblique, est peu divisée 5 elle est munie çà et
là de quelques petits chevelus très - ramifiés, et plus nombreux vers le
collet que partout ailleurs.
La lige, roussâlre et fendillée à la base, devient rarement plus grosse
qu'une plume à écrire; elle est droite et se divise près de terre en plusieurs
rameaux anguleiLx par la décurrence des supports, cl garnis de
feuilles alternes ovales, longues de 20 à 28 millimètres ( 9 à 12 lig. )
terminées en pointe raccourcie, bordées de petites dénis inégales, acuminées
et glanduleuses. Ces feuilles, teintes d'un assez beau rouge dans leur
jeunesse, sont, dans l'état adulte, d'un vei't gai eu dessus, d'un vert moins
foncé en dessous, et portées sur de courts pétioles un peu renflés et presque
toujoui's roussàtres ; elles tombent aux approches de Phiver, et laissent
voir dans leur aisselle nn bouton long, pointu et blanchâtre, qui contient
le rudiment d'une nouvelle pousse.
Les fleurs naissent en avril et mai sur Ja pousse actuelle. Elles sont
axiliaires, solitaires, pedonculées, figurées en grelot et d'un rose pdle :
nous les avons toujours vues décandres, avec un slylc simple, plus long
que la corolle.
A ces (leurs succèdent des baies noires qui atteignent au plus la grosseur
d'une petite balle de mouscjuei. Elles sont couvertes d'une poudre
bleuâtre, et couronnées par un large ombilic au centre du([ucl on voit
le style ou la place <ju'il occupoit, et sur un cercle excentrique, dix
poinis où éioient placées les étumines, et enfin sur un autre ccrcle plus
excentrique encore, cinq cicatrices qui, en indiquant Pinsertion de la
corolle, prouvent évidemment que, malgré son intégrité apparente, cette
corolle étoit composée de cintj pétales. L'intérieur du fruit est une chair
aqueuse, violette, dans lafjuclle on trouve une grande quantité de pclites
graines jaunâtres au lems tle la maturité, qui arrive eu juillet et aoiU.
Quelques auteurs font mention d'une variété à fruit blanc que nous
n'avons pas encore rencontrée.
U S A G E S ET P R 0 P R I É T É S.
Les fruits de l'airelle sont d'une saveui' sucrée, relevée d'un aigrelet
agréable : on les mange crus avec ])laisir. JNOUS les a\ons vu vendre à la
mesure sur les marchés de plusieurs villes des départemciis de la Normandie;
et couune ils sont très-comnmns dans cette partie de l'Empire, nous
croyons avec M. Bosc d'Antic qu'on pourroit en faire des pains de confilurcs
en cmjiioyant le procédé usité chez les Canadiens pour le varciniuni
coiYmhosimi. « Ce procédé, dit M. Bosc , consiste à faire cuire les fruits
« dans un vase de fer, et à augmenter par la chaleur du four la dessica-
« lion jusc[u"à consistance solide. » 11 en résulte une confiture naturelle
d'un goût très-agréable, qui se garde longieius, cl dont les Sauvages du
INord de l'Amérique et de l'Asie font luie pariic de leur nouirilure. « On
n sait, dit encore M. Bosc, que les peujjles chasseurs ichiiophages du
oe Nord de l'Europe et de l'Asie, les Lapons, Samoyedes, Kamtschadules,
« Vnstiakes, Kouriles, ramassent en très-grande abondance les baies de
« la ronce arctique et de la ronce lierbacée, pour leur servir de nourri-
« ture végéude pendant l'hiver; mais (ju'ils ne les font point desséclier,
« qu'ils se contentent de les mettre dans des \ ases d'écorce et de les enfouir
« en terre. On pourroit conserver de même celles de l'airelle myrtille,
« car les vignerons qui s'en servent pour colorer le vin , les gardent sans
« inconvénient depuis le mois de juin jusqu'à la vendange, avec la seule
« précaution de les placer à la cave dans des vases bien fermés. » Cette
manière de colorer le vin, est une falsification, il est vrai, mais elle n'est
pas dangereuse, conmic la pluj)art de celles <|ui se j>rali(]uent, siu--toui
chez les marchands de vin de Paris.
La médecine fait usage aussi des baies de l'airelle pour arrêter le coursde
ventre, la dyssenterie et le crachement de sang. On les fuit cuire jusqu'à
la consistance de raisiné en v ajoulant un peu de sucre : ou bien on les fait
sécher, et après les avoir l'éduits en poudre, on l'administre à la dose d'un à
deux gros. Quand les enfans en mangent immodéi'ément, elles leur causent
une légère i\rcsse, et peuvent tlonner lieu à des obstruciions. Les qualités
astringentes de toute la j)]anie la reiulcnt jn'opre à tanner le cuir. Les
clièvres et <|uelquefois les moutons la mangent; les chevaux et les vaches
n'en veulent pas.
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