
i66 L’AN T I Q U I T E ' E X P L I Q U E E , &t. Liv. IV.
J’en trouve neuf, quatre dans cet étage , & cinq dans celui de delTous.
Nous avons déjà fait voir la difficulté de diftinguer toutes les Mufes les
unes des autres, non feulement par la diverfùé des defcriptions que les auteurs
en font, mais auffi par le peu d’uniformité dont les marbres & les
bronzes les reprélentent. Ici la difficulté eft encore plus grande , parceque les
mafques qui diftinguent Euterpe &Thalje des autres, ne s'y trouvent pas.
On reconnoit fûrement Uranie par le globe quelle touche, & peutêtre Ter-
pfichoré par les flûtes. Quant aux deux qui font à la bouche de l’antre, j’y vois
deux Mules fi parfaitement bien exprimées, que je les aurois mifes au nombre
des Mufes fans m’arrêter un moment, fi l'autorité d’un auffi habile homme
qu’eft M. Schott ne m'avoit obligé de pefer fes raifons. Il dit que celle qui tient
une guitarre eftun Apollon ; il lé fonde fur plufieurs médaillés où ce dieu eft
habillé en femme : il s’en trouve en effet de cette maniéré parmi les figures
d’Apollon que j’ai données au premier tome. Mais fur l’image prefente le
fein de femme eif fi marqué , qu’il n’y a nul moien de la prendre pour un
Apollon, il eft encore plus marqué dans l’eftampe du Bellori faite à Rome où
lé trouve le marbre qui eft l’original. Je m’en tiens donc à ce que j’ai d’abord
dit, que ces deux quife tiennent à l’entrée de l’antre font deux Mufes ; les fept
autres font fordes de l’antre. Une efpece de machine qui eft entre ces deux
Mufes a la forme d’un bonnet ; & en effet M. Cuper l’a prife pour le bonnet
d’Ulyffc , & dit que cela fignifie l’Odyffée d’Homere.- il fonde fa conjecture
fur ce que le bonnet d’Ulyffe eft de même forme dans certains monumens :
l’arc & le carquois qui femblent appuiez fur ce bonnet, marquent, dit-il,
l’Iliade qui contient la guerre de Troie. Mais cette machine , fi on la compare
avec toutes les têtes de la planche, eft de beaucoup trop grande pour être
un bonnet. M. Schott l’a prife pour un vaiffeau qu’il appelle Cortinn. Il eft à remarquer
que fur cette machine il y a deux bandes ou deux courroies qui fe
croifént, & qui paroiffent aboutir l’une au carquois & l’autre à l’arc, en forte
qu’il pourroir bien fe faire que c’étoit une machine où l’on tenoit attachez
l’arc & le carquois de peur qu’ils ne traînaffent à terre.
Cet antre appuie le fendment du P. Kirker, qui dit que cette montagne eft:
le Parnaffe : mais, dit M. Cuper, celle- ci n’a qu’une pointe, au lieu que le Par-
naffe en avoit deux : il vaut donc mieux dire que c eft le mont Olympe. La
videlicet alias hoc ipfo gradu poliras, & quinque in
’ gtadu inferiorï. Jam vidimus , cum de Mulis agere-
mus j quam lit difficile ipfas lingulatim internofeere,
non modo quia diverfe ilîæ ab auétoribus deferibun-
tur i fed etiam quia marmora aliaque monuments
multum variant in earum forma. Hic autem major
difficultas occurrit ; quoniam larvæ quæ Euterpen &
Thaliam ab ali is diftinguunt, non comparent. Urania
certo dignofcitur, quæ orbem feu globum cæleftem
tangit, forteque etiam Terplichore a fiftulis indica-
tur. Quod fpe&at autem ad duas illas quæ in an tri
oftio liant adverfæ , Mufas certc agnofeo quales ex-
primuntur in monumentis : ne ftatim autem in Mu*
lamm choro accenfeam prohibet au&oritas viri cru-
diti Domini Schotti , cujus argumenta prius funtex-
pendenda , quam aliquid ea de re ftamamus. Putat
autem ille, eam quæ cithararn tenet, elfe Apollincm;
adeamque rem comprobandam numifmata non pauca
dicit Apollinem mutiebri forma exhibere ; quod fane
verum eft , Apollinemquc fimilem me dare memini
tomo primo. Sed in hoc monumento linus muliebris
& mammæ tam aperre mulierem produnt ,utnullo
modo poffit pro Apolline haberi. Sinus etiam muliebris
apertius fefe prodit in tabula curante Bellorio
Romæ, ubi monumentum illud eft , exeufa. Itaque,
uti jam dixi, hæ ambæ in antri oftio pofitæ Mufæ
funt : feptem veto aliæ Mufæ ex antro funt egreflæ.
Inter duas autem illas quæ in antri ore confiftunç ,
eft machina nefeio quapileiformam referens.Etcerte
UlyffispileumelTe putavit V.CI. Cuperus, & Homeri
O dy fleam lignificare dicit, quia nempe Ulyffis pi-
leus in aliis monumentis ejufdem eft formai : arcus
vero, inquit ille , & pharetra , quæ hoc pileo inniti
videntur , fignificant Uiadem , quæ Trojanum bel-
lum continet. Verum hæc machina fi cum capitibus
omnibus, quæ in hac imagine comprehenduntur,con-
feratur, longe major efle videbitur quam ut pileus
exiftimari poffit V. CI- Schottus cortinam efle cen-
fcr. Notandum autem eft in ea machinæ hujus parte
quæ adverfaconfpicitur duo efle quafi lora fefe mu- •
tuo deeuflantia , & quorum extrema pertingere videntur
aliud ad pharetram , aliud ad arcum , i ta ut
machina polira videatur , ut in ilia alligentur arcus
Ôc pharetra , ne in terra jaccant.
Antrum porro illud pro Kircheri opinione pugnat 0
qui putat hunemoneem efle Parnaflum. ObjicitCu-
perus montem hune uno tantum cacumine furgere,
cum contraParnaflus duo cacumina feparaca habucric»
A P O T H E O S E D’H O M E R E . tÿ
■montagne telle queladontoe M. Cuper, n'a en effet qu’une poinre mais
dans notre eftampe & dans celle que le Bellori a donnée à Rome même , il y
a deux pointes bien marquées. Il eft vrai que comme celle de devant couvre
1 autre , On ne peut pas voir la diftance qui éroit ehtte les deux ; mais la fepa-
ration des deux pointes y patoit évidemment.
, Les fcntimens ont été encore plus partagez touchant l’homme qui eft à côte
de 1 autre fur un piedeftal. On 1 a pris pour un Engaftrimythe, pour un prêtre
d Homere, pour Lin, pour Lycufgue, pour Pififtrate, pour le Précepteur
Egyptien d Homere. Je m en tiens à 1 opinion de M. Spaiiheim qui croit
que c’ell Bias de Priene, l’un des fept Sages de la Grèce. C'eft A'rchelaüs dé
Priene fils d Apollone , quia fait ce monument, comme porte l’infcription :
il y a grande apparence qu il aura voulu faire a foft compatriote philofbphé
1 honneur de le mettre en une compagnie.fi 'célébré ; il a en effet tout l’air d’uü
philofophe : ce qui femble, encore déterminer à lé Croire, c’feft qu’il a derrière
lui un grand trépied ; car c en eft un véritablement, comme on peut
voir en le comparant aux trépieds que tous avons dohneiz en grand nombre
dans le fécond tome & dans d’aütres ehdrôits de cet ou vrage :,‘or tout le mpn-
de lait que le trepied que 1 Oracle avoit ordonne de préfénter au plus fage dé
la Grece, fût déféré à Bias de Priene.
On a moins de difficulté à expliquer les figures qui occupent tout le bas dé
ce monument, parce que chacùto a fon infcnpriôh. il y avoir erreur dahs les
deux premiers mots où l’on avoit lu E i m i l U & K i p d n o s ; c’eft ainfi
qu ont lu M, Cuper 3c d autres , qui lé font donnez la t'orturé à expliquer lé
mot (uiiexU qui n’y fut jamais. M. Fabretti quià Vu & examiné ce marbré â
rétabli la véritable leçon; le premier mot eft kovmenh , deux lettres fautées
avec une pièce du marbre faifoienc oixothenh , qui veut dire le monde ou
la terré, & le fécond X t o i iÔ ! , le tems. La Terre & le Tems font côte à
côte ; la première en forme de Cy bêle, qui eft la même que Tellus ou la Terré,
a fur la tête une haute tour ; elle met fur la tête d’Homere affis devant ellé
une eburonne de laurier : cela veut dire que toute la terre habitable
couronne Homere comme le prince des pôëtes. Le Tems peint eii homme a
des ailes a fon ordinaire ; il rient, ce fémble, un rbuleau qui d’ün côté fé termine
en demi cercle : le Tems marque qu’Homere eft lé plus ancien des pôë-
Vere quidem mons, ut in Cuperi tabula repræfenta-
tur , uno tantum cacumine gaudet ; fed in tabula
noftra, & in ea quam Bellorius Romæ protulit, duo
funt cacumina adrnodum confpicua -, fed cacumen ii-
lud primum quod infpicienti offertur , cum alterum
cacumen operiat, non finit amborum feparationem
& inter uttumque diftantiam oculis percipi j fed
tamen fcparata efle cacumina aperte ex umbra cer-
nimus.
Majora etiam fuere opinionum divortia circa virum
ilium , qui e latere antri in ftylobate confiftit : nam
alius Engaftrimythum dixit, alius Homeri facerdo-
tem, alius Linum , vel Lycurgum, vel Pifîftratum,
alius præceptorem Homed Agyptium : longe verifî-
miliorcmego puto Spanhcmii fenrentïam, qui putat
efle Biantcm Prieneum unum ex feptem Gr.tciæ fa-
pientibus. Hune enim lapidem fculpfit ArchelaiiS
Apollonii filius & ipfe Prieneus, ut inferiptione fer-
tu r, qui videcur civcm popularemque fuum in tara
celebri ccetu honoris eau fa pofuifle : vereque illéphi-
lofophum vefte & habitu rfefert > qliodque hanc confirmât
opinionem, pone ilium magnùs tripus eft ,tri-
podes quippe fimiles non paucos vidimus tomo fecundo
& alibi ; àt nêmo nefeit tripodem , qui ora^
culo jubente fapientiflimo Graicoriim offérendus
erat, Bianti Prieneo datum fuifle.
Quæ inferiorem ànaglyphi pârtem occupant figuræ,
non funt toc diffitultatibus obnoxiæ, quoniam fingu-
læ inferiptionem appofiràm habent. In duâbusprimis
voçibus error fuberat, lèélumquè fuerat fi t M È Ai A.
K l P O N O 2 j fie legerunt Cuperus & alii , qui
mirum quantum in explicanda voce ivfy.thk laborave-
rint. AtFabretcus ad Tab. Iliadosp. 34^. cum mar-
mor vidiflet & examinaviflet, veram reftituit leétio*
nem. Prima vox eft k o T m e n h -, duæ enim lireræ
cum fi'ufto lapidis éxciderunr, legendumque oiKolf-
M e NH, oibis , mundus, terra: fecunda vox eft
X p o n o 2 , tempus. Terra arque Tempüs fimul
funt : Terra Cybëlés forma pingirur, præaltam capitc
turrem geftans. Eavero Homeri ante fe fedentis capi-
ti lau ream imponitcoVönam -, quo fignificatur a toto
orbe Hömerum quafi poerarum principem coronari.
Tempus viri formam habens alis pro more inftruótum
eft : videturque volumen tenere , quod àb altero latere
in femicirculum définit. Tempus vero fignificat
Homcrum aut poctarum antiquiflimum efle , aut an