14 0 H i stoire Naturel le
qu’en Afie & dans les parties les plus méridionales de
l’Afrique dans l’intérieur des terres; car la plufpart des
Voyageurs qui ont fréquenté les côtes de l’Afrique,
parlent à fa vérité de tigres, & difent même qu’ils y font
très-communs; néanmoins, il elt aifé de voir par les
notices mêmes qu’ils donnent de ces animaux, que ce
ne font pas de vrais tigres , mais des léopards , des
panthères ou des onces, &c. Le Doéteur Shaw a, dit
exprelfément qu’aux royaumes de Tunis & d’Alger, le
lion & la panthère, tiennent le premier rang entre les
hêtes féroces ; mais que le tigre ne fe trouve pas dans
cette partie de la Barbarie : cela paroît vrai, car ce furent
des Ambaflàdeurs Indiensb, & non pas des Afriquains,
qui préfentèrent à Augufte dans le temps qu’il étoit
à Samos , le premier tigre qui ait été vu des Romains ;
& ce fut auffi des Indes qu’Héliogabale fit venir ceux
qu’il vouloit atteler à fon char pour contrefaire le dieu
Bacchus.
L ’efoèce du tigre a donc toujours été plus rare &
beaucoup moins répandue que celle du lion : cependant
la tigreffe produit, comme la lionne, quarte ou cinq
petits ; elle eft furieufè en tous temps, mais fa rage devient
extrême lorfqu’on les lui ravit; elle brave tous les périls,
elle fuit les raviffeurS, qui fe trouvant prelfés font obligés
de lui relâcher un de fès petits ; elle s’arrête, le fàifit,
* Voyages de Shaw. La Haye, 1 y q y , tome l , page y 1 y .
1 Voyey ta Defcription des ifles de l’Archipel, par Dapper. Amjl.
1 7 0 y, page s. e f . ■
l’emporte pour le mettre à l’abri, revient quelques
in flan s après & les pourfuit jufqu’aux portes des villes
ou jufqu’à leurs vaifîèaux & lorfqu’elle a perdu tout
efooir de recouvrer fa perte, des cris forcenés & lugubres,
des hurlemens affreux expriment là douleur cruelle &
font encore frémir ceux qui les entendent de loin.
Le tigre fait mouvoir la peau de û face , grince des
dents , frémit, rugit comme le fait le lion ; mais fon
rügiffement eft différent, quelques voyageursa l’ont comparé
au cri de certains grands oifeaux. Tigrides indomkoe
mncant, rughmt que Leones. ( Autor Philoineloe) . Ce mot
Rancant n’a point d’équivalent enfrançois; ne pourrions-
nous pas lui en donner un, & dire, les tigres muquent
& les lions rugiffent ; car le fon de la voix du tigre eft
en effet très-rauque b ï
La peau de ces animaux eft affez eftimée, fur-tout à
la Chine ; les Mandarins militaires en couvrent leurs
chaifes c dans les marches publiques, ils en font auffi
des couvertures de couffins pour l’hiver ; en Europe ,
ces peaux quoique rares ne font pas d’un grand prix.
On fait beaucoup plus de cas de celles du léopard de
’ Second Voyage de Siam , par le P. Tachard. P a ris, 1 6 8y ,
page 248.
h Les tigres de l’eft de l’Afie (ont d’une grofleur & d’une légèreté
(urprenante ; ils ont ordinairement le poil d’un roux-fauve.... Ils ru-
gitîènt comme les lions ; leur cri (lui pénètre d’horreur. Voyage de
Coreal. Paris, 1 7 2 2 , tome 1, page 177 -
' Hiftoire générale des Voyages, par M . l’Abbé Prevoft, tome V I,
page 602.