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des lynx en Ethiopie \ & a dit qu’on en préparait le cuir
& les ongles à Carpathos, aujourd’hui Scarpantho ou
Zerpanto, Ifle de la Méditerranée , entre Rhodes &
Candie ; 3.0 que Gelder b a fait un article particulier
du lynx d’Alie ou d’Afrique , lequel article contient
l ’extrait d’une lettre d’un Baron de Balicze ; Vous n'aveg
pas fa it mention, dit-il à G chier , dans votre livre des
animaux, du lynx Indien ou Africain ; comme Pline en a
parlé, l’autorité de ce grand homme ma engagé à vous en$
voyer le deffein de cet animal, afin que vous en parliez__
II a été deffiné à Conflantinople, il eft fort différent du loup-
cervier d’Allemagne , il eft beaucoup plus grand, il a le
poil beaucoup plus rude lr plus court, &c. Gefner , fans
faire d ’autres réflexions fur cette lettre, fe contente d’en
rapporter la lùbflance, & de dire par une parenthèfe ,
, * Plinii, Hiß. Nat. lib .V I ll, cap. x x i ; & lib. X X V III, cap. VIII.
— On obfervera que Piine ne parle ici que du lynx & non pas du
lupus-cervarius ; que toutes les vertus & propriétés du poil, des
ongles, de l’urine, &c. n’ont rapport qu’à l’animai qu’il appelle lynx,
& qu’il cite comme un animal extraordinaire, un monitre d’Ethiopie;
& qu’il n’eft pas ici queftion du loup-cervier, puifqu’il allure pofi-
tivement que celui-ci avoit été envoyé des Gaules aux (peélacles de
Rome. La feule chofe qui pourroit faire fotipçonner que le chaus ou
lupus - cervarius de Piine ne ferait pas notre loup-cervier, c’eft qu’il
dit qu’il a la figure du loup & les taches de la panthère ; mais ce doute
s’évanouira lorfqu’on confidérera toutes fcs circonftances & qu’on fe
rappellera d’ailleurs que de tous les animaux de proie qui fe trouvent
dans les pays ièptentrionaux, le loup-cervier eft le feul dont la robe
foit tachée comme celle de la panthère.
k Gelher, H iß. quadrup. pag. 63?.
que le deffein de l’animal ne lui eft pas parvenu.
Pour que l’on ne tombe plus dans la même méprifê,
nous obferverons, 1.° que les Poètes & les Peintres ont
attelé le char de( Bacchus de tigres, de panthères &
de lynx , felon leur caprice, oupluftôt parce que toutes-
ces bêtes féroces , à peau tachée, étoient également
confàcrées à ce Dieu ; 2 ° que c ’eft le mot lynx qui fait
ici toute l’équivoque, puifqu’il eft évident, en comparant
Pline avec lui-même*, que l’animal qu’il appelle
Lynx, & qu’il dit être en Éthiopie, n’eft nullement
celui qu il appelle Chaus ou Lupus-cervarius qui venoit
des pays feptentrionaux ; que c ’eft par ce même nom
mal appliqué, que le Baron de Balicze a été trompé ;
quoiqu’il regarde le lynx Indien comme un animal différent
du Luchs d’Allemagne, c ’e ft-à -dire , de notre
lynx ou loup-cervier : ce lynx Indien ou Africain,
* Pompeii magni primum ludi ojlenderunt Chaum, quem Galli Rhaphium
vocabant, effigie tupi, pardorum maculis. Plinii, lib. V I I I , cap. x ix .
— Sunt in eo genere ( fcilicet luporum ) , qui cervarii vocantur, qualem è
Gallia in Pompeii magni harena fpeâatum diximus. Plin. lib. V I I I ,
cap. X X I I . — Lyncas vulgo frequentes à ‘ fphingas, frufco pilo, mammis
in peâore geminis, Ætbiopia générât, multaque alia monjlre fimilia. Plin.
lib VI I I , cap. X X I— Il eft clair, en comparant ces trois paflàges,
que le chaus & le lupus-cervarius font le même animal, & que le lynx
en eft un autre. La feule chofe qu’on puiffe ici reprocher à Pline,
c’eft que, trompé apparemment par le nom, il dit que cet animal
a la figure du loup ( effigie lupi). Le loup-cervie^ eft comme le loup
commun, un animal de proie, il en approche encore par b grandeur
du corps, il a comme fui une efpèce de hurlement ou de cri prolongé
, mais pour tout le relie il en diffère abfolument..
Ggü/