dans les ifîes de la mer du Sud ; ils en avoient peuplé
l ’ifïe de Juan-Fernandès a, où elles avoient extrêmement
multiplié ; mais comme c’étoit un fecours pour
les Flibuftiers, qui dans la fuite coururent ces mers, les
Efpagnols réfolurent de détruire les chèvres dans cette
iiïe , & pour cela ils y lâchèrent des chiens qui, s’y
étant multipliés à leur tour, détruifirent les chèvres dans
toutes les parties acceffibles de Fille ; & ces chiens y
font devenus fi féroces, qu’a&uellement ils attaquent les
hommes. '
Le fànglier, le cochon domellique, le cpchon de
Siam ou cochon de la Chine , qui tous trois ne font
qu’une feule & même efpèce, & qui fe multiplient li
facilement & fi nombreufement en Europe & en Afie,
ne fe font point trouvés en Amérique : le Tajacou b, qui
a une ouverture fur le dos, efl l’animal de ce continent
qui en approche le plus ; nous l’avons eu vivant, &
nous avons inutilement elfayé de le faire produire avec
le cochon d’Europe ; d’ailleurs il en diffère par un fi
grand nombre d’autres caraétères, que nous fommes bien
fondés à prononcer qu’il eft d’une efpèce différente. Les
cochons tranfportés d’Europe en Amérique, y ont encore
mieux réuffi & plus multiplié que les brebis & les *
* Voyez le Voyage autour du monde par A nton, liv. I I , page r o i .
1 Tajaçu. Piton, Ind. pag. 98. — Tajacu, aper Mexicanus mofchiferus'.
Ray, Synopf. quadrup. pag. 9 7 . — Le Sanglier du Mexique. Les François
de ta Guiane l’appellent Cochon noir. Britïon, Regn. animal.
page i i i .
D E L ’ A N C I EN CO N T IN ENT. y I
chèvres. Les premières truies, dit Garciiaffo1 , fe vendirent
au Pérou encore plus cher que les chèvres. La
chair du boeuf & du mouton, dit Pifon b, n’efl pas fi
bonne au Brefd qu’en Europe ; les cochons feuls y font
meilleurs & y multiplient beaucoup : ils font auffi, félon
Jean de Laetc, devenus meilleurs à Saint-Domingue
qu’ils ne le font en Europe. En général on peut dire,
que de tous les animaux domefliques qui ont été tranf-
portés d’Europe en Amérique, le cochon efl celui qui
a le mieux & le plus univerfellement réuffi. En Canada
comme au Brefd, c ’efl-à-dire dans les climats très-froids
& très-chauds de ce nouveau monde , il produit, il
multiplie , & fa chair efl également bonne à manger.
L ’efpèce de la chèvre au contraire ne s’efl multipliée
que dans les pays chauds ou tempérés , & n’a pû fe
maintenir en Canada ; il faut faire venir de temps en temps
d’Europe des boucs & des chèvres pour renouveler l’efpèce
, qui par cette raifbn y efl très-peu nombreufè.
L ’âne, qui multiplie au Brefd, au Pérou, &c. n’a pu
multiplier en Canada; l’on n’y voit ni muletsyni ânes,
quoiqu’en différens temps l’on y ait tranfporté plufieurs
couples de ces derniers animaux auxquels le froid femble
ôter cette force de tempérament, cette ardeur naturelle,
a Voye^ I’Hiftoire <les Incas. Paris, 1 7 4 4 ., tome 11, pages 2 6 (f
i f /vivantes.
L Vide Pifon, H ifl. Nat. Brafil. cum app. Marcgravii.
* R°yel l’Hiftoire du nouveau monde, par Jean de Laet. Leyde,
1 64.0, chap, iy , page y.