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dents. Tant qu’il eft jeune & qu’il a de la légèreté il vit
du produit de fa chafle, & quitte rarement Tes déferts
& fes forêts où il trouve affez d’animaux fauvages pour
fubfifteraifément; mais lorfqu’il devient vieux , pefant &
moins propre à l’exercice de la chafle, il s’approche des
lieux fréquentés, & devientplus dangereux pour l’homme
& pour les animaux domeftiques ; feulement on a remarqué
que lorfqu’il voit des hommes & des animaux
enfemble, c’eft toujours fur les animaux qu il fe jette &
jamais fiir les hommes, a moins qu ils ne le frappent,
car alors il reconnoît à merveille celui qui vient de 1 of-
fenfer *, & il quitte fa proie pour fe venger. On prétend
qu’il préfère la chair du chameau à celle de tous les
autres animaux ; il aime auffi beaucoup celle des jeunes
éléphans, ils ne peuvent lui réfifler lorfque leurs défenfes
n’ont pas encore pouffé 8c il en vient aifement a bout,
à moins que la mère n’arrive à leur fecours. L éléphant,
Je rhinocéros, le tigre 8c lhipopotame, font les fouis
animaux qui puiffont réfifler au lion.
Quelque terrible que foit cet animal, on ne laiffe
pas de lui donner la chaffe avec des chiens de grande
taille & bien appuyés par des hommes à cheval, on le
déloge, on le fait retirer; mais il faut que les chiens
& même les chevaux foient aguerris auparavant, car
* Voyei l’Hiftoire générale des Vpÿages, tome V,page S 6. M. l’Abbé
Prévoit qui, comme tout le monde fait, écrit avec autant de chaleur
que d’élégance, y fait une très-belle defcription du lion , de fes
qualités & de fes habitudes naturelles.
prefque
prefque tous les animaux frémiffent & s’enfuient à la foule
(odeur du lion. Sa peau, quoique d’un tiflïi ferme 8c
ferré, ne réfifle point à la baie , ni même au javelot ;
néanmoins on ne le tue prefque jamais d’un foui coup :
on le prend fouvent par adreffe, comme nous prenons
les loups, en le faifànt tomber dans une foffe profonde
qu’on recouvre avec des matières légères, au defliis
defquelles on attache un animal vivant. Le lion devient
doux dès qu’il eft pris, 8c fi l’on profite des premiers
momens de fà fiiprifo ou de fà honte, on peut l’attacher,
le mufeler & le conduire où l’on veut.
La chair du lion eft d’un goût defàgréable & fort ;
cependant les Nègres 8c les Indiens ne la trouvent pas
mauvaifo 8c en mangent fouvent : la peau , qui fàîfoit
autrefois la tunique des héros , fort à ces peuples de
manteau 8c de lit ; ils en gardent auffi la graiffe, qui eft
d’une qualité fort pénétrante, 8c qui même eft de quelque
ufage dans notre Médecine *.
* Vbye^ l’Hiftoire Naturelle des Animaux, par M.'s Arnaud de
Nobieviile & Salerne. Paris, 1 75 7 1 Iome ParC' 2 > PaS e 1 1 z ‘