l ’application de ces dénominations. On a regardé comme
des lièvres & des lapins cinq ou fix elpèces de petits
animaux, qui n’ont guère d’autre rapport avec les lièvres
6c les lapins que d’avoir, comme eux, la chair bonne à
manger. On a appelé vache ou élan un animal fans cornes
ni bois, que les américains nommoient tapüerete au Brefd
6c manipouris à la Guyane ; que les Portugais ont enfuite
appelé anta, 6c qui n’a d’autre rapport avec la vache ou
l’élan, que celui de leur reffembler un peu par la forme
du corps. Les uns ont comparé le pak ou le paca au
lapin, & les autres ont dit qu’il étoit femblable à un
pourceau a de deux mois. Quelques-uns ont regardé le
philandre comme un rat, 6c l’ont appelé rat de bois;
d’autres l ’ont pris pour un petit renard h. Mais il n’ell
pas nécelïàire d’infifter ici plus long-temps fur ce flijet,
ni d’expofer dans un plus grand détail les fauffes dénominations
que les voyageurs, les hifloriens 6c les nomen-
clateurs ont appliquées aux animaux de l’Amérique, parce
que nous tâcherons de les indiquer & de les corriger,
autant que nous le pourrons, dans la fuite de ce difcours
6c lorfque nous traiterons de chacun de ces animaux en
particulier.
On voit que toutes les elpèces de nos animaux domef-
tiques d’Europe, 6c les plus grands animaux làuvages de
* Voye^ l’Hiftoire du nouveau monde , par Jean de Laet, pages g. S g.
ty fuivantes.
b Vide Klein, de quadrup. pag. JO ; & Barrère, Hiftoire de la France
équinoxiale, page 1 6 ( . l’Afrique
l’Afrique 6c de l’A fie , manquoient au nouveau monde;
il en eft de même de plufieurs autres efpèces moins
conlidérables, dont nous allons faire mention le plus
luccintement qu’il nous fera polfible.
Les gazelles, dont il y a plufieurs elpèces différentes,
6c dont les unes font en Arabie, les autres dans l’Inde
orientale 6c les autres en Afrique, ont toutes à peu près
également befoin d’un climat chaud pour fublilter 6c fe
multiplier : elles ne fe font donc jamais étendues dans
les pays du nord de l’ancien continent pour palfer dans
le nouveau ; aulfi ces elpèces d’Afrique 6c d’Afie ne s’y
font pas trouvées : il paroît feulement qu’on y a tranf-
porté l’elpèce qu’on a appelée gazelle d’Afrique, 6c
que Hernandès nomme algayel* ex Aphrica. L ’animal
de la nouvelle Elpagne que le même Auteur appelle
lemamaçame, que Seba défigne par le nom de cervus,
Klein par celui de tragulus, 6c M. Brilfon b par celui de
gazelle de la nouvelle Elpagne, paroîtaulfi différer, par
l ’elpèce , de toutes les gazelles de l’ancien continent.
On ferait porté à imaginer que le chamois, qui fe
plaît dans les neiges des Alpes, n’auroit pas craint les
glaces du Nord , 6c que de-là il aurait pû palier en
Amérique ; cependant il ne s’y elt pas trouvé. Cet animal
feinble affeéter non feulement un climat, mais une litua-
tion particulière; il ell attaché aux fommets des hautes
montagnes des Alpes, des Pyrénées, 6cc. 6c loin dé s’être
* Voyer Hernandès, Hiftoire du Mexique, page y 1 2 ,
® Veyei le Règne animal j par M. Briflon, page y 0.
Tome IX . Ij