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C omme les battemens du Coeur font les plus fenfibles vers
fa partie poftérieure , il n’eft pas furprenant d’y trouver auffi
les ailes beaucoup plus grandes, leurs bronches plus nombreu-
fes, & une couche de graille pour diminuer le frottement à
ces endroits.
Q uand on ouvre le canal de ce Vifcère, on trouve qu’il con-.
tient une grande abondance de liqueur. J’en ai vu fortir, en
le perçant du côté du dos, après y avoir fait une ouverture à
la peau, une quantité qui, réunie, me parut excéder la capa*
cité d’un Anneau du même Infecte.
C e t t e liqueur, que l’on croit faire l’office de fang, ne fem-
ble avoir aucune couleur quand elle eft étendue; On la pren-
droit pour de l’eau; RafTemblée en goûtes, on-la trouve couleur
d’orange.
E x a m in é e au Microfcope, on la voit remplie d’un nombre
prodigieux de globules tranfparens, un peu différente en grof-
feur ; mais au-delà de trois millions de fois'plus petits qu’un
grain de fable; parmi ces globules j ’ën ai trouvé pourtant quelques
uns, qui me paroiffoient bien dix fois plus gros que les
autres, & également tranfparens ; ils étoient les feuls qui na-
geoient fur l’eau, & ils pourroient bien n’avoir été que des petites
goûtes de graiffé extravafées par la diffeftion.
C e t t e liqueur, mêlée avec un peu d’eau, s’altère; feS petits
globules perdent tout à coup leur tranfparence ; plufieurs fe
coagulent enfemble, & ils ne paroiffent plus que comme de petites
maffes pâteufes ; mais les gros globules demeurent toujours
les mêmes. L ’e au,
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' L’e aü , du refte, fe mêle allez facilement avec ce fuc, qui
ne paroît pas gras, & qui, comme plus pefant, y va naturellement
à fond, de même que fes globules, à la referve des gros.
Qtjand on en laiffe lécher quelque goûte fur un morceau
de verre, ce qui refte, après l ’évaporation, fe durcit, & ref-
femble à de la gomme tirant fur l’orange. Au Microfcope, les
bords en paroiffent alors tout, crevaffés de mille manières différentes,
ainll qu’il arrive à nôtre fang en cas pareil.
C e t t e ftibftance gommeuiè eft II abondante, dans le fuc que
renferme le Coeur, qu’après l’évaporation une feule Chenille
m’en a fourni une malle de la groffeur d’un pois gris.
C omme on ne trouve., dans la Chenille, aucun autre Vifcère
, que celui qui vient d’être décrit, que l’on puiffe foupçon-
ner y faire l’office de Coeur, on n’a pas hezité de lui en attribuer
les fonctions, & ce Vifcère a toujours porté, chez les
Naturaliftes, le nom de Coeur de la Chenille; nom que je n’ai
pas crû devoir lui ôter, quoiqu’il me femble'fort douteux qu’il
lui convienne , en effet.
D u moins paroitra-il bien étrange , à ceux qui auront vu
combien de centaines de Nerfs & de Bronches j ’ai fuivi, dans
cet Ouvrage, que je n’aye pas été en état d’y faire connoître
aucune Veine ni Artère, moins encore aucune qui s’ouvrît dans
le Coeur, bien que, dans les grands Animaux, cesVaiffeaux foient
beaucoup plus grands & plus aifés à demêler que les Nerfs, &
que la grandeur énorme de ce qu’on appelle le Coeur de la
Chenille, fembloit devoir faire elpèrer que du moins fes princi-
Hh h 2 pales