
du reste ils ont de fréquents démêlés, les Milans noirs habitent
aussi en grande quantitéles villes du Japon, auxquelles ils rendent
les même services :
« Quoique, dit le docteur Vidal en 1875, ils soient moins familiers
que les Corbeaux, ils se laissent volontiers approcher ; et
même je me suis amusé plusieurs fois à leur jeter des morceaux
de viande qu’ils saisissaient toujours au vol avec une adresse merveilleuse.
»
Les Milans noirs voyagent sur le Bosphore en compagnie des
Percnoptères, leurs collaborateurs, passent par bandes fort nombreuses
au printemps et à l’automne, s’arrêtent et séjournent par
milliers dans Constantinople entre ces deux saisons. Ils font
fréquemment entendre un cri qui a du rapport avec le hennissement
du cheval, et se laissent facilement approcher en ville. Ils
quittent vers la lin d’août, et l’on n’en voit plus un seul dès les
premiers jours de septembre.
Un fait curieux est . leur agglomération au moment de.leur
passage, observé par M. Alléon.
« Le 21 août 1868 , rapporte cet ornithologiste, en rentrant
à Constantinople, vers deux heures de relevée, nous avons
remarqué un nuage immense, exclusivement formé de Milans
noirs, qui planaient au-dessus de la ville^ Tous les Milans avaient
disparu de l’intérieur, et formaient sans doute le noyau de là migration
; à chaque instant, de tous côtés, arrivaient des bandes
innombrables qui comprenaient chacune plusieurs milliers de ces
oiseaux, et se réunissaient à la masse ; la troupe décrivait de
vastes spirales, faisait des évolutions diverses, montant et descendant
; à la fin du jour, elle traversa le Bosphore et se dirigea vers
l’Asie, pour ne plus reparaître. D’après le nombre prodigieux qui
formait chaque bande, la multiplicité des bandes, les heures
échelonnées de leur arrivée, il est évident que cette migration
réunissait les Milans noirs, non seulement des campagnes voisines,
mais peut-être de toute la Turquie, et même des autres
contrées de l’Europe et de l’Asie centrale. Chaque bande avait dû
partir au lever du jour, et même avant, suivant l’usage des oiseaux
migrateurs ; d’après nos informations, plus de dix heures s’étaient
écoulées entre l’arrivée de la première bande et celle de la dernière
; elles sont donc parties de points distants respectivement
de plusieurs centaines de kilomètres. Est-ce le hasard, est-ce l’instinct
qui, le même jour, au-dessus de la même ville, ont réuni,
pour une migration commune, des oiseaux originaires de plusieurs
contrées de la terre? Pour organiser et diriger ces merveilleux
voyages, l’instinct ne nous paraît pas un agent suffisant ;
il a fallu fixer le jour et le lieu du départ ; des émissaires ont dû
prévenir les tribus éloignées, les sujets épars. Il nous paraît
difficile de ne pas accorder un degré d’intelligence aux organisateurs
et aux acteurs de ces migrations. » .
C’est toujours le mystère des rassemblements et des migrations
des Hirondelles.
En temps ordinaire, les Milans'noirs ne sont pas très répandus
dans la campagne de Constantinople : on les y rencontre
cependant quelquefois par petites bandes, surtout dans la vallée
desEaux-Douces, jusqu’aux aqueducs de Justinien, déchirant des
charognes en compagnie des Aigles criards et des Percnoplères.
Un couple de Milans noirs, qui a niché plusieurs années dans
le voisinage de l’habitation de M. Alléon, à Buyuk-Déri, était toujours
occupé, lorsqu’il quittait son aire, à pêcher au vol, dans
la société des Goélands, les ordures animales qui flottaient sur le
Bosphore.
C’est que, comme le dit M. Bailly, la principale nourriture
du Milan noir consiste en poissons vivants ou morts, ou en reptiles,
qu’il cherche à découvrir en parcourant d’un vol bas les
lacs , les cours : des rivières et leurs bords. II fond sur eux à'
chaque instant en décrivant, ajoute-t-il, une ligne perpendiculaire
ou oblique, selon la distance de laquelle il s’élance et selon la
position de sa proie. Il les enlève avec une dextérité remarquable
dans ses serres, à fleur d’eau, ou en y entrant quelquefois jusque
près de la moitié du corps ; il lient alors ses ailes étendues au
dessus des vagues. Plus agile et moihs sauvage que le Milan royal,
il plonge assez fréquemment à côté des barques des pêcheurs du
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