
 
        
         
		44  HISTOIRE  NATURELLE  
 pl.  ii ; les autres ne sont que plus petites que  celles-là, et le deviennent  
 toujours davantage à mesure qu'elles s'approchent de la gorge. Les plumes  
 de cette  demiere ainsi que généralement toutes celles du corps sont d'un  
 noir changeant en pourpre: quant aux subalaires, elles sont, vues en masse,  
 d'un noir mat, et séparées, d'un noir brun; les ailes, qui s'étendent jusqu'au  
 milieu de la  queue, sont aussi noires et veloutées comme elle dans toutes  
 les parties qu'on  apperçoit des pennes, lorsqu'elles sont ployées et serrées  
 au  corps; leur dessous et leurs barbes intérieures sont lisses et d'un  noir  
 luisant, légèrement  pourpré; le bec,  dont l'arête est tranchante, les pieds  
 et les ongles sont noirs.  
 Lorsque cet oiseau  déploie tous ses attributs,  c'est-à-dire Iorsqu'excité  
 par l'amour il étale, comme tous ceux que la nature a ainsi favorisés, toutes  
 les richesses de sa parure, alors, dis-je, cet oiseau doit se présenter sous un  
 aspect véritablement  imposant; attitude  que nous avons bien essayé  de  
 rendre dans notre planche  12, mais  d'une nianiere  qui,  quoiqu'en  approchant  
 le plus possible, est sans doute  encore bien éloignée de rendre  
 ce jeu que  donnent à l'être vivant le désir qui le presse et la présence  de  
 l'objet qui doit le satisfaire. Notre n°  i3 représente le même oiseau dans cet  
 étal de tranquillité où, content du succès de ses préludes amoureux, il touche  
 au  moment de jouir de son  triomphe,  moment délicieux où toute parure  
 devient inutile et même gênante.  
 Après cette description lidele et vraie que nous venons de faire, et l'exactitude  
 des figures que nous donnons  du  sifilet, il seroit, je  pense, inutile  
 d'entrer dans de grands détails sur toutes celles qu'on a publiées du même  
 oiseau, et de rappeler ici tout ce qui a donné lieu aux différentes erreurs  
 qu'on a commises à son  sujet: nous nous  bornerons  donc à dire que  pour  
 connoitre les choses et en parler  sainement, il faut les avoir  étudiées, et  
 qu'il  paroit. qu'il est même certain  que la plupart de nos ornithologistes  
 n'en ont rien fait jusqu'à  ce jour.  
 J'ai vu plusieurs sifilets dans différents cabinets, mais je n'en connois que  
 trois  de parfaits, dont l'un fait partie du cabinet de  M.  Hollhuysen à  
 Amsterdam;  M. Gevers  Arntz,  de  Rotterdam, possède l'autre; et le  troisième, 
  tout le  monde peut le voir chez moi (1). Plusieurs naturalistes  
 assurent  que l'espece s'en trouve à la nouvelle Guinée ; ce que nous  
 (1)  Cet oiseau  est resté long-temps déposé avec beaucoup d'autres  chez mon  libraire,  afin que  le public  pût,  
 en le  comparant  aux  dessins et  aux  gravures  qui  en ont été faits,  s'assurer  que  je  11e  m'amusois  point à  embellir  
 les  oiseaux  que  je  publiois,  ainsi  que  certaines  gens,  intéressés  sans  doute à  décrier  cet  ouvrage,  
 cherchent  sourdement à  le  persuader  aux  crédules.  Si  l'intention  perfide  ne  se  montrait  ici,  je  semis  en  
 vérité  tenté  de  m'enorgueillir  d'un  tel reproche : embellir la nature!  ce seroit là  sans  doute  un  beau  titre à la  
 reconnoissance publique. O  ISarraband ! toi dont  le  pinceau  fidele  sert  si  puissamment  mon  zele, toi  que  j'ai  
 vu si  souvent  hésiter,  craindre  de  ne  pas  rendre  les  beautés  que  j'exposois .1  tes  regards,  aurois-tu  pensé  
 que,  dans  le  dessein  de  me  nuire,  on  trouveroil  que  tes  couleurs,  savamment  distribuées,  surpasseroient  
 celles  de  la  nature?  Mais  consolons-nous;  elle  sera  toujours là  la nature  pour  donner 1111  démenti à nos  vils  
 détracteurs.  
 DES  O I S E A U X  DE  PARADIS. 45  
 ignorons. Il paroît au  moins qu'elle y est moins nombreuse  que celle de  
 l'oiseau de paradis-émeraude, puisqu'on ne reçoit pas en Europe à beaucoup  
 près autant de ses individus  que de ceux de cette derniere : ils nous  
 parviennent au reste la plupart préparés d'une même maniéré,  c'est-adire  
 desséchés sur un bâton et sans pattes, sans ailes, ni os dans la  tête;  
 or c'est d'après ces mannequins que le sifilet avoit été décrit et figuré jusqu'ici  
 : on ne doit  donc pas s'étonner de nous trouver si peu d'accord avec  
 nos prédécesseurs.  
 12