
Sa HISTOIRE NATURELLE
souvent donnée pour bleue par différents naturalistes, ce qui a plus d'une
fois occasionné des erreurs chez les compilateurs, qui travaillant sans voir
les objets en nature, s'attachent aux mots plutôt qu'à la chose, et multiplient
fort gratuitement les especes. Je crois, quant à ces couleurs équivoques
qu'il est si difficile d'exprimer par des mots, qu'on pourroit en
donner une idée plus juste en les désignant comme on désigne assez
généralement le verd sombre, par verd canard, et qu'ainsi on désigneroit
fort bien l'aigue-marine ou -verd-de-gris, dont il est ici question par verd
rottier, puisque presque tous les rolliers se trouvent en avoir plus ou moins
sur leur plumage. Le derriere et le bas des côtés du cou ont dans notre
rollier varié une teinte vineuse, qui dégénéré insensiblement vers le dos
en un verd gris, nué de roussàtre, qui est la couleur de toutes les plumes
scapulaires , et des dernieres pennes alaires les plus proches du corps ;
en sorte que l'oiseau paroit avoir un manteau de cette derniere couleur.
Les petites couvertures du poignet des ailes sont bleu foncé violâtre, et
les suivantes du verd du dessus de la tête, mais fondu avec du bleu; les
plus grandes sont terminées par le même verd qui occupe le dessous du
corps. Les petites pennes qui couvrent les tiges des grandes pennes des
ailes sont aussi du verd du dessous du corps. Les pennes des ailes sont
gros bleu dans leur milieu, puis verd aigue-marine, et enfin bleues à leurs
pointes: elles se trouvent ainsi coupées irrégulièrement par toutes ces
différentes couleurs, dont l'ensemble offre un aspect très agréable, et que
le lecteur ne pourra bien apprécier qu'en consultant les figures parfaites
que nous donnons de ce magnifique oiseau. Le croupion et les couvertures
des ailes, sont du même bleu que celui des ailes. Quant à la queue,
dont toutes les pennes sont d'égale longueur , elle a ses deux intermédiaires
de la couleur du manteau , et toutes ses latérales bleu violâtre à
leur naissance, verd aigue-marine dans leur milieu, et terminées par du
bleu: elle est ainsi coupée par trois bandes transversales parallèles, dont
deux bleues qui touchent au verd de celle du milieu, et qui étant ellesmêmes
divisées en sens contraire en deux parties égales par les deux plumes
du milieu, et de couleur différente de celle des autres , font qu'elle
présente de chaque côté en-dessus trois compartiments d'un très bel effet.
Les pennes des ailes et de la queue ont leur revers des mêmes couleurs
que leur dessus: le bec est noir: les pieds sont roussâtres, et les yeux d'un
brun maron.
La femelle du rollier varié est un peu plus petite que le mâle; le roux
qui couvre les narines de ce dernier s'étend davantage sur le front chez
elle, et y a un ton plus blanchâtre; les joues et le devant du cou y sont
moins lustrés de violet, mais en revanche les bandes blanches longitudinales
des plumes de ces parties y sont plus larges et plus apparentes; le
roux de la poitrine s'y étend aussi plus bas, et arrive jusqu'aux cuisses:
DES ROLLIERS. 83
les autres couleurs enfin ont ici une teinte moins vive, quoique semblables
à celles du mâle et distribuées de la même maniéré que les siennes.
Nous avons pensé qu'il étoit inutile de donner la figure de celte femelle
dont on peut facilement se faire une idée par la description que nous
venons d'en faire.
Pour le jeune âge, le rollier varié y est si différent de ce qu'il est adulte,
que nous avons cru devoir consacrer l'article suivant à le décrire et à le
figurer dans cet état, pour qu'il ne plaise point aux naturalistes d'en faire
une espece particulière.
Le rollier varié se plait en Afrique dans les bois: il construit son nid
sur la tête du tronc des plus grands arbres, et le compose en dehors des
mêmes matières que celles qu'emploie le rollier à longs brins, son congénère;
mais le dedans il le garnit de plumes: la ponte est de quatre
ccufs roussâtres. Ces oiseaux sont très farouches et de difficile approche
pour le chasseur, quoique naturellement fort curieux. Leur cri d'effroi est
aussi absolument le même que celui de notre geai d'Europe, dont ils ont
encore , au point de s'y méprendre, le vol , les attitudes, et tous les mouvements:
ils se nourrissent de fruits et d'insectes. Mon lidcle compagnon
de voyage Klaas, m'apporta un jour une nichée entière de quatre de ces rolliers
variés , qu'il avoit pris, après avoir tué le perc et la mere : je les nourrissois
de jaunes d'oeufs d'autruche cuits, qu'ils meparoissoient manger avec
plaisir ; ils devinrent cependant d'une maigreur extrême, et moururent au
bout de huit ou dix jours. Celte espece n'est que de passage dans la partie
d'Afrique où je l'ai trouvée, et n'y est pas même très commune; elle arrive
au commencement de l'été, et repart lorsque la saison des fruits est passée,
et que les jeunes sont en état de suivre les vieux. J'ai remarqué que tous
les oiseaux qui sont de passage en Afrique arrivent et partent dans les
mêmes saisons, ceux du moins qui y font un long séjour.
En comparant la figure de l'individu de l'espece du rollier varié qui
habite les Moluques , et qu'on trouve représenté n° 27 de nos planches,
à celle de l'individu apporté d'Afrique, n"28, le lecteur s'appercevra facilement
que toutes les parties du cou, qui dans ce dernier n'ont qu'une teinte
violette purpurine, sont dans le premier d'on beau violet pourpre, et que
les autres couleurs y sont aussi plus vives et plus prononcées, quoiqu'en
général elles soient absolument distribuées de la même maniéré dans l'un
et dans l'autre. Quant aux formes, pas la moindre différence.
L'individu que nous avons fait peindre fait partie du cabinet de M. Raye
de Breukelerwaert, à Amsterdam: j'ai vu encore beaucoup d'autres individus
de la même espece dans différents autres cabinets, et qui tous proviennent
des Moluques.
Il ne nous reste plus qu'à décrire le jeune âge du rollier varié. pour avoir
complété l'histoire de cette belle espece.