
partie de la côte s'applatit en forme de palette ou d'une larme alongée;
ces palettes, d'un rouge vif de vermillon, sont ordinairement au nombre
de cinq sur chaque aile, quelquefois de moins , fort rarement de six dans
les plus vieux individus ; quelques naturalistes y en ont vu , disent-ils,
jusqu'à sept: quant à moi, sur quarante individus sur lesquels j'ai compté
ces palettes, je n'en ai trouvé que cinq qui en eussent six, et aucun
qui en eût sept; tous ceux sur lesquels je n'en ai compté que trois ou
quatre portaient tous les caractères d'oiseaux encore jeunes. Je remarquerai
à l'égard de ces palettes attachées au bout des moyennes pennes
alaires, que la premiere , à partir du côté des grandes pennes, est la plus
petite, et que les autres sont successivement un peu plus grandes; de
sorte que, lorsque l'oiseau les étale, elles forment autant de rayons divergents
d'une portion decercle;cequi produit un effet des plus agréables,
car d'un côté elles ressortent toutes sur le fond noir mat des ailes, et de
l'autre elles aboutissent au blanc pur du bout des pennes dont elles font
partie. (Voyez l'une de ces moyennes pennes garnie de sa palette, et que
nous avons fait dessiner séparément au bas de la planche qui représente
l'oiseau. ) La queue du grand jaseur est composée de douze plumes d'égale
longueur, et se trouve ainsi coupée carrément; les ailes ployées vont jusqu'aux
deux tiers de la longueur de la queue ; les tarses sont courts, et les
pieds conformés comme ceux des geais et des rolliers : les plumes douces,
fines et soyeuses de cet oiseau ont encore le moelleux de celles de notre
.geai d'Europe ; son front est ceint d'un bandeau noir très étroit, qui d'un
côté se porte sur les narines qu'il couvre entièrement, et de l'autre jusqu'au
chignon, en s'élargissant vers les yeux ; la gorge est aussi couverte
d'une plaque noire qui descend jusqu'au milieu du cou où elle se dessine
circulairement ; un trait blanc sépare le noir des yeux de celui de la gorge, et
se prolonge ensuite en une bande rousse, qui longeant le noir de cette
derniere partie qu'elle achcve d'encadrer sur les côtés, correspond à une
tache rousse aussi qu'on voit au-dessous du noir du chignon , et à uu large
bandeau marron qui occupe le bas de la huppe; tout cela donne à ce bel
oiseau une physionomie vraiment distinguée: la huppe, le derrière et les
côtés du cou, le manteau, les couvertures des ailes, le bas du cou, et la
poitrine sont d'un joli brun clair roussâtre glacé de gris, ou couleur noisette
, qui sur le croupion , les couvertures du dessus de la queue, le haut
de celle-ci, ainsi que sur le ventre, les flancs, et les plumes des jambes,
se changent en unjoligriscendré;les grandes pennes alaires sur un fond noir,
portent chacune, excepté la premiere qui est la plus grande, une tache
oblongue à leurs pointes ; ces taches sont blanches sur les premieres do
ces pennes, et jaunes relevées par du blanc sur les dernieres , où elles se
trouvent coupées par le blanc du bout de celles à appendices dont nous
avons parlé. Les grandes couvertures des pennes alaires, ou ce que les
naturalistes nomment l'aile bâtarde, sont toutes noires, à l'exception de
leurs pointes, qui sont blanches; ce qui avec les taches des pennes et le
beau rouge des palettes produit un effet très agréable sur les ailes étendues;
la queue est terminée par une belle bande jaune jonquille, et tout
l'espace compris entre cette bande et le gris du haut est noir glacé de gris;
la mandibule supérieure, les pieds et les ongles sont noirs; la mandibule
inférieure n'est noire qu'à sa pointe, elle est blanche à sa base; ce qui
semble prolonger encore cette petite bande blanche formée par les plumes
de cette couleur, que nous avons dit séparer le noir de la gorge de celui
des yeux : ceux-ci sont d'un rouge brun; les couvertures du dessous des
ailes sont blanches; celles du dessous de la queue, qui s'étendent jusqu'au
bout des pennes de cette derniere , sont d'un marron foncé; le levers des
pennes alaires et celui de la queue sont d'un gris glacé de blanc.
L'espece du grand jaseur se trouve dans plusieurs parties du nord de
l'Europe : elle passe aussi en automne dans quelques cantons de la France,
de l'Angleterre, et même de l'Italie;je l'ai vue, mais bien rarement, dans
les bois aux environs de Lutléville, oit un garde-chasse ayant tué un de
ses individus, l'apporta pendant mon séjour dans cette ville à un de
nies amis, M. Richard, qui le conserve encore dans son cabinet. J'ai eu
moi-même pendant plus de six mois un de ces oiseaux vivant, que m'avoit
donné M. Boers, bailli d'Hassemoude en Hollande; c'est aussi de lui que
j'ai su que l'espece du grand jaseur n'étoit pas très rare en Hollande pendant
l'hiver, et qu'elle y passe ordinairement tous les ans à la même époque
à-peu-près. Je nourrissois l'individu que j'ai eu vivant avec des chenevis
concassés et de la mie de pain trempée dans de l'eau; il mangeoit
volontiers aussi des noix, des noisettes et des amendes : cet individu u'avoit,
ainsi que celui que j'ai figuré n° 49 de mes planches, que cinq palettes
rouges à chaque aile: lorsqu'il mourut je reconnus à la dissection
qu'il étoit inàle ; mais comme je n'ai point étc dans le cas de faire la même
opération sur les femelles de l'espece, Il me serait impossible de déterminer
toutes les différences qui peuvent se trouver entre l'un et l'autre sexe :
ce qu'il y a de certain c'est qu'en considérant l'oiseau sous toute son organisai
on ex te rie ure , et sur plus de quarante individus, je n'ai pas remarqué
qu'il y eut d'autres différences entre eux que celles qu'on trouve entre
les individus de toute autre espece d'oiseaux vieillis dans les collections,
et dénaturés, soit par la manière dont on les prépare, soit par les différents
procédés qu'on emploie pour les préserver des insectes rongeurs.
Les individus de l'espece du grand jaseur préservés ainsi par des fumigations
sulfureuses et qui avoient subi plusieurs fois cette opération destructive
n'avoient plus qu'un jaune terne et effacé dans celles de leurs
parties qui sont naturellement d'un beau jaune : le rouge des palettes étoit
chez eux couleur de pelure d'oignon, et le noir brunâtre; effets que produisent
nécessairement sur tous les oiseaux les mêmes moyens prétendus
conservateurs, et qui sont cause de tant d'erreurs de la part des ornilho-
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