
H I S T O I R E N A T U R E L LE
d'un verd brillant, et n'est point ornée, comme le dit Buffon , de miroirs
semblables en petit à ceux du paon. Les plumes de la gorge, celles des
côtés et du devant du cou sont d'un beau mordoré foncé, et comme
velouté : les plus longues de ces plumes, qui bordent la poitrine, ont
chacune à leur extrémité une bordure chamois, et directement au-dessous
d'elles se dessine circulairemcnt un plastron d'un verd sombre, qui ceint
la poitrine d'une aile à l'autre. Ce plastron, qui dans son milieu a cinq
à six lignes de largeur, se termine en pointe à chacune de ses extrémités.
Les premières plumes d'ornement prennent naissance précisément à
l'endroit de la poitrine qui répond au poignet de l'aile, lorsque celle-ci
est appliquée au corps ; les autres, plantées immédiatement les unes sous
les autres, sont rangées en arc de cercle., et suivent le contour même du
plastron en s'en éloignant toujours davantage à mesure qu'elles descendent
: ces mêmes plumes, qui se terminent aussi en arc de cercle, sont
d'un gris de souris uniforme jusque vers leur extrémité , oii les plus
grandes d'entre elles, prennent chacune une large bordure d'un verd émeraude
des plus brillants, et séparé du gris du corps de ces plumes par
une li»ne chamois semblable à celle qui borde chacune des plumes de
cette partie du cou qui touche au plastron verd : admirable effet de cette
belle entente dans les oppositions, et qu'on trouve toujours dans les ouvrages
de la nature, mais que l'art atteint bien rarement dans ses productions!
Les couvertures du dessous des ailes sont d'un blanc pur, ainsi que
toutes les plumes du dessous du corps depuis le plastron verd jusqu'aux
couvertures du dessous de la queue inclusivement. Le revers de la queue
est "ris. Le bec est jaune, et non blanc, comme le dit Billion, dont la
méprise , au reste, est ici très pardonnable, parccqu'en effet le bec de
celte sorte d'oiseau blanchit totalement dans nos cabinets, comme y blanchissent
ou y jaunissent en général tous les becs naturellement jaunes
on rouges. Les ongles sont jaunâtres, et les pieds couleur de plomb.
Nous ne connoissons pas la couleur des yeux, que couronne un sourcil
noir et fin comme du velours, touchant au coin de l'oeil, et s'élevant à
mesure qu'il avance sur le devant. Nous observerons enfin que le duvet
intérieur des plumes pourpres du dos est chamois ; celui des plumes
blanches gris; et celui des plumes de la gorge et du devant du cou grisbrun.
Cette description, très détaillée sans doute, peut-être trop même pour
certaines gens qui n'y attacheront pas un grand intérêt , ne se rapporte
pas entièrement, je l'avoue, à toutes celles qui ont été données du même
oiseau ; mais je ne garantis pas moins pour cela l'exactitude de la mienne,
comme ayant été faite d'après un individu de ma collection parfaitement
bien conservé, et vérifiée sur trois autres non moins beaux, bien dépouillés,
et non mutilés par les sauvages : deux de ces derniers font partie
du cabinet de M. Teniniinck, d'Amsterdam, à qui je dois celui que je
possédé ; le troisième appartient à mon ami M. Raye de Breukelerwaert,
aussi d'Amsterdam.
Il n'est presque pas de naturaliste qui n'ait parlé du manucode : les
Latins l'ont nommé manucodiaca rex, rex avîum paradisearum, avisregia;
les Anglais le nomment hing of birds of paradisc ; les Hollandais honing
van de paradys voogels ; les Français manucode ou roi des oiseaux de
paradis; et enfin les Indiens manucodiata, qui signifie, dit-on, oiseau de
Dieu.
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