
 
        
         
		destîe rare qui le faisoit chérir de tous  ceux qui le connoissoient. Au  
 retour de son voyage au Pérou , entrepris par  ordre du gouvernement  
 français, il vint à Paris, où il fut  comblé des bienfaits du roi : j'eus le  
 plaisir de faire sa connoissance ; j'admirai  chez lui la belle  collection de  
 minéraux qu'il avoit recueillis dans ces riches contrées, et qui fait aujourd'hui  
 partie du Muséum d'histoire naturelle de Paris ; il eut la bonté  
 aussi de me faire voir plusieurs magnifiques oiseaux du Pérou, du nombre  
 desquels étoit l'espece du  momot à laquelle je  donne son nom ;  foible  
 témoignage de l'estime particulière que je lui avois vouée en  reconnoissance  
 de ses franches  communications.  Tout  ce que je vis chez Dombé  
 des  productions de la partie de l'Amérique qu'il avoit  fouillée, et tout  
 ce qu'il m'en a  dit, me donnent un vif regret de n'avoir pas fait une  
 course dans ce beau pays, où la nature semble avoir prodigué ses bienfaits, 
  mais dont elle a ainsi  occasionné la ruine et le malheur de tous  
 les paisibles habitants, bien vengés par tout ce qu'a valu à leurs barbares  
 persécuteurs tout l'or que leurs mains cupides leur avoient arraché le fer  
 à la  main, quand il étoit si facile de l'obtenir sans crimes de  peuples,  
 qui certes n'y attachoient pas assez de valeur pour s'exposer à le défendre  
 au prix  de la vie d'un seul des leurs.  
 Nous n'étendrons pas davantage la description du  momot  dombé ,  
 pareeque la figure exacte  que nous en avons  donnée mettra le lecteur  
 qui le comparera à celui de l'espece  précédente, à même de saisir les  
 rapports et les différences qui existent entre eux. Le  houtou se trouve  
 à la Guyane, et le momot dombé habite les forets des environs de Lima,  
 où le voyageur que j'ai  nommé m'a assuré qu'il étoit très commun, et  
 qu'il n avoit remarque aucune différence entre beaucoup d'individus qu'il  
 avoit vus de l'espece et les deux qu'il avoit  rapportés, dont l'un fut  déposé  
 avec plusieurs autres beaux oiseaux du Pérou au cabinet du  roi.  
 Il est fâcheux que cet individu ait été entièrement détruit par lês  fumigations  
 de soufre et les insectes : quant à l'autre nous ne savons ce qu'il  
 est devenu.  
 Comme nous avons fait remarquer que le  momot ou  houtou  de la  
 Guyane avoit déjà dans son jeune âge la belle couronne  dont nous avons  
 parlé en son lieu, et qu'il est plus que probable, d'après mes observations,  
 que la femelle l'ait  aussi, il ne peut pas y avoir de  doute,  je  pense,  
 que le momot de cet article ne forme une seconde  espece, d'autant plus  
 que les deux individus que j'en ai vus avoient tous les caractères d'oiseaux  
 adultes, ou parvenus à leur état parfait.  
 Quant à la nature des  momots, en les admettant entre les rolliers et  
 les geais, nous croyons leur avoir assigné la place qu'ils tiennent en effet  
 par tous les rapports extérieurs qu'ils  ont avec ces oiseaux; ce qui  n'empêche  
 pas d'en faire un genre particulier, si on le juge nécessaire, pourvu  
 cependant qu'on ne les  confonde plus avec les calaos , les martinpêcheurs, 
  les guêpiers , les toucans, avec lesquels ils n'ont pas la moindre  
 analogie.  Comme je n'ai pas été à portée d'observer par moi-même les  
 habitudes des momots dans leur pays  natal, on trouvera peut-être mon  
 sentiment prématuré, ou tout au moins hasardé, sur-tout d'après  l'opinion  
 de Buffon , qui, n'admettant pas ce que Pison rapporte du bouton  
 ou  momot, c'est-à-dire qu'il niehoit sur les arbres, qu'il se nourrissoil de  
 fruits, et qu'il étoit facile à apprivoiser, prétend au  contraire, d'après  
 Marcgrave,  que cet oiseau ne vit que d'insectes, qu'il fait son nid dans  
 un trou sous  terre, et qu'on ne sauroit l'apprivoiser; ce qui est absolument  
 supposé. Je crois l'assertion de Pison la plus probable , et cela  
 d'après la grande habitude que j'ai des oiseaux , que j'ai toujours bien  
 jugés à la seule inspection des parties extérieures, et à la nature des  
 plumes et des formes constitutives.  Or qu'il vole peu ou  mal, qu'il niche  
 à terre ou sur les arbres, qu'il soit facile ou difficile à apprivoiser, tout  
 s'accorde à faire des momots, sinon un geai ou un rollier proprement dit,  
 tout au moins une branche ou un genre de la tribu 011 de l'ordre des  
 geais et des rolliers. La question  de savoir si cet oiseau est ou non  
 facile à apprivoiser  me paroit difficile à résoudre ; il faudroil pour cela  
 multiplier les essais. La difficulté d'apprivoiser un animal vient souvent  
 de la mal-adresse de ceux qui l'entreprennent; et l'on sait que s'il est des  
 gens qui apprivoisent les tigres, il en est d'autres qui feroient de l'animal  
 le plus doux une bête  féroce.  Au surplus si le  momot vole  peu, s'il  
 aime à se poser à  terre, s'il fréquente les bois, et ne se perche que sur  
 les branches basses des arbres , il a tout cela de  commun avec tous les  
 geais et les rolliers, qu'on voit très souvent à terre, et qui sautant d'arbre  
 en arbre, traversent des forêts entieres sans faire de grands vols, quoiqu'ils  
 aient les ailes  fortes, et qu'ils volent très bien quand ils ont besoin de traverser  
 des plaines ; ce que doit bien faire aussi le momot, qui a l'aile aussi  
 ample et de la même forme que notre geai.  
 3o