la n a t u r e qui, comme j'ai dit plus h a u t , fait très bien végéter ce Câprier lorsqu'elle
le place dans les fentes horizontales des faces perpendiculaires des rochers : mais
quoique par cette p r a t i q u e l e Câprier réussisse souvent fort b i e n , elle a cependant
quelquefois de grands inconvénients. i°. L e collet de la r a c i n e , ou l'endroit du
t r o n c qui se trouve placé dans chaque t r o u , niche ou ventouse du m u r , grossissant
chaque a n n é e , remplit b i e n t ô t la largeur ou la h a u t e u r de cette ouverture , si elle
est é t r o i t e , et, après l'avoir r e m p l i e , fait f o n c t i o n de levier contre ses parois en
t e n d a n t à les écarter ; et comnre ce levier agit p e r p é t u e l l e m e n t avec une grande
f o r c e , il écarte enfui ces parois , f e n d le m u r , et y fait souvent des lézardes considérables.
On en a v u n o m b r e d'exemples ; et plusieurs particuliers ont été obligés
de refaire à neuf des murs de terrasses. Cet inconvénient arrive moins fréquemment
dans les murs construits en pierres seches ; leurs pierres n ' é t a n t point liées
les unes aux a u t r e s , ils sont plus difficilement endommagés par les Câpriers; et
il est d ' e x p é r i e n c e que ces plantes y réussissent mieux. 2°. S i , afin d'éviter cet
i n c o n v é n i e n t , l ' o n fait ces t r o u s , niches ou v e n t o u s e s , d ' u n e largeur assez grande
p o u r que le collet de la racine ou la p o r t i o n de la tige qui s'y trouve placée ne
puisse la r e m p l i r , il arrive que lorsque les eaux de pluie ou autres qui abordent
à ces trous en ont détrempé la t e r r e , elle s'écroule d ' e l l e - m ê m e , parcequ'clle
n'est pas alors assez s o u t e n u e ; elle finit par être e n t r a î n é e hors du trou , ainsi
que la terre voisine ; d'oii il résulte que les racines des Câpriers qui y sont
p l a n t é s se t r o u v e n t enfin à d é c o u v e r t , ee qui fait périr ces arbustes : on en voit
des exemples fréquents. »
« D'après ce que je viens de d i r e , on conçoit q u e , lorsqu'on adopte cette pratique
, les principales attentions qu'il faut avoir pour éviter les i n c o n v é n i e n t s dont
je viens de p a r l e r , s o n t , 1". d e faire les t r o u s , dans lesquels on p l a n t e , assez
l a r g e s , et sur-tout assez h a u t , pour éviter les lézardes, dont celles qui sont horizontales
se font plus a i s é m e n t , et détruisent p r o m p t e m e n t les m u r s ; 2°. d e placer
d e r r i e r e ces murs , devant la terre adossée à ces trous, des briques ou tuileaux
posés de m a n i é r é qu'ils la r e t i e n n e n t , l ' e m p ê c h e n t de s'ébouler ou d ' ê t r e e n t r a î n é e,
et que l ' a u g m e n t a t i o n de grosseur des Câpriers puisse les écarter à mesure. 3°. On
conçoit aussi que, lorsqu'on plante les Câpriers dans les ventouses, il est très
i m p o r t a n t , pour la conservation du m u r , qu'elles ne soient pas assez petites pour
qu'ils puissent les boucher en entier p a r l e u r accroissement, et empêcher l'écoulement
des eaux s u p é r i e u r e s : 4°. que la n a t u r e de la terre adossée à ces murs
n ' e s t pas plus i n d i f f é r e n t e que celle de la terre qui est à leur p i e d , et qu'il faut
aussi en ce cas p r é f é r e r celle qui est e n même temps substantielle et pierreuse. »
« T s c h o u d i conseille de p l a n t e r quelques pieds de Câprier dans des cavités pratiquées
dans des murs isolés et remplis de terre. Lorsque les racines des Câpriers
ainsi plantés p a r v i e n n e n t à s ' i n t r o d u i r e entre les joints des pierres de ces murs,
ils y réussissent, et souvent ils y subsistent fort long-temps. Si l ' o n a dans son parc,
dans sa v i g n e , ou dans son j a r d i n , à u n e exposition c h a u d e , des rocailles, des
amas de pierres et de décombres, des masures, des r u i n e s , de vieilles murailles,
des h e u x impropres à toute c u l t u r e , à cause de l e u r n a t u r e extrêmement pierreuse,
c'est u n très b on sol p o u r la c u l t u r e des Câpriers, qui d é c o r e r o n t s u p e r b e m e n t ces
endroits difformes et sauvages. On pratiquera dans les vieilles murailles, masures
et r u i n e s , des cavités d ' e n v i r o n un demi-pied ou u n pied c u b e ; on les remplira
de honne terre v é g é t a l e , légère et s u b s t a n t i e l l e , dans laquelle 011 p l a n t e r a les
Câpriers: ils y r é u s s i r o n t , ainsi que dans les fentes et les crevasses des rochers,
dans lesquelles ils seront p l a n t é s , après q u ' o n les aura remplies de la même terre
végétale. »
On cultive encore cette espece dans de grands pots ou caisses. Ces pots doivent
être remplis d'une terre légere , substantielle et p i e r r e u s e , telle que celle que
j'indiquerai plus bas être convenable pour les semis de cette espece ; mais dans
la composition de laquelle le tiers des décombres calcaires qui y e n t r e n t ne sera
point passé au crible , mais sera en pierrailles grosses environ comme des noix
pour les Câpriers adultes. Ces pots ou caisses doivent être percés de trous assez
grands dans le f o n d s , ou plutôt à la base de leur parois.
Cette espece de Câprier se m u l t i p l i e dans le climat de Paris par s e m e n c e s , par
marcottes, par rejetons enracinés, et par boutures. La voie de multiplication par
semences est la moins suivie, parcequ'clle est la plus longue : c e p e n d a n t , dit
D u h a m e l , il seroit à souhaiter qu'on en élevât b e a u c o u p de semences, parcequ'il
seroit possible que l'on obtînt ainsi des variétés à fleui's panachées ou à fleurs
doubles, qui seroient d ' u n e grande b e a u t é pour nos jardins, et seroient au moins
aussi utiles dans les pays chauds , puisque ce ne sont que les boutons que l'on
confit.
Pour semer cette plante il faut en tirer la semence des pays chauds : celle
récoltée à Paris n'est pas f é c o n d e ; il n ' y fait pas assez chaud : les fleurs s'y épanouissent
beaucoup trop tard ; et ainsi le f r u i t n ' a ni le temps ni la chaleur nécessaires
pour parvenir à maturité. La semence que l'on tire des jjays chauds est
même rarement bonne , suivant Tschoudi ; et l o r s q u ' o n veut s'en procurer il faut
en recommander la récolte et f e n v o i à u n correspondant soigneux. Les bonnes
graines semées en plein air et en pleine terre dans les pays chauds y levent facil
e m e n t : mais cela n'est pas de même dans les pays plus tempérés; les meilleures
graines y levent très difficilement, même lorsqu'elles sont semées sur couche et
sous chassis. Miller dit en avoir semé plusieurs fois dans le climat de Londres, sans
succès ; et il s'est assuré que beaucoup d'autres personnes n ' o n t pas été plus heureuses
: il n ' a réussi que deux fois à o b t e n i r cette p l a n t e par la voie des semences;
la p r e m i e r e fois, en 1 7 8 8 , il e n obtint deux qui poussèrent dans une vieille mur
a i l l e ; la seconde fois, en 1 7 6 6 , il en obtint u n grand n o m b r e , mais elles avoient
été mises dans de la t e r r e u n a n avant de lui être envoyées.
A i n s i , lorsqu'on desire multiplier cette plante par le moyen des graines dans
le climat de Paris, il est nécessaire de ne r i e n négliger pour tâcher de se procurer
la meilleure graine , et d'en obtenir la germination ; il faut recommander à ses
correspondants dans les pays chauds de n e recueillir les semences destinées à être
envoyées que parfaitement m û r e s , de choisir p r é f é r a b l e n i e n t celles des fruits les
mieux conformés, de les envoyer le plutôt possible après qu'elles sont m û r e s,
et dans leurs fruits. Il seroit encore plus sûr d'envoyer ces graines dans de la
t e r r e légere , très peu h u m i d e , avec laquelle elles auroient été mêlées aussitôt
après leur maturité , qui seroit mise au même instant dans des pots ou caisses
découverts par-dessus, et q u ' o n auroit soin de laisser exposés à toutes les influences
de l ' a t m o s p h e r e , depuis cet instant j u s q u ' à celui de leur arrivée à leur destinat
i o n , en couvrant sa surface avec de la mousse v e r t e s e u l e m e n t , et en l'arrosant
très légèrement de temps à autre , pour empêcher qu'elle ne se desseche trop.
Un pot d'un pied de d i a n i e t r e , et d'autant de profondeur , pourroit contenir
de cette maniéré plusieurs livres de semences.
« Il faut semer ces graines aussitôt qu'elles a r r i v e n t , en quelque saison que ce