V O Y A G E
qui font dc paiTage , &c qui nc féjourncnt à la Martinique
.que pendant la iaiion périodique des pluies.
On voit par ces détails, & par ce que nous avons dit des
quadrupèdes , que la chafle n'offre d-^is cette contrée ni
les araufemens, ni les plailirs qvii peiive^it la rejajdre ailleurs
un objet de pallion. Ce n'eft qu'un exercice fatigant, dont
on charge ordinairent un negre intelligent & fidele.
Ce que l'on perd du côté des alimens par la mauvaife
•qualité des oifeaux , n'eft point racheté par ragrénient de
leur ramage..
Les frais que la nature a faits pour ceux de l'Amérique ^
femblent^avoir été tous employés à leur parure. On fait que
s'ils l'emportent fur ceux d'Europe par leurs riches couleurs,
ils leur cedent pour le chant. La campagne n'eft pas animée
là comme ici. Ces animaux qui feniblent ne s'occuper quç
de nos plaifirs , quand ils chantent les leurs , ne font point
retentir les bois de ces concerts fi délicieux & iî attrayans
pour les ames tendres & fenfibles,
La Martiniciue fournit peu d'oifeaux dont le -plumage
-foit remarquable. Il y en a encore moins qui ayent un ran^
age agréable, ils n'en ont aucun , à parler exactement ;
leurs cris ne méritent pas le nom de chant ni de ramage.
• il faut en excepter celui qvi'on appelle roJJignoL II eft de
la groiTeur du rolfigiiol d'Europe, avec lequel il a quelque
foible reiTemblance par fes couleur? , èc même par fon
chant. Quand je dis par fon chant , je parle de ce qu'on
peut appeller le gafouillement du roiTignol. Celui de no$
liles n'a pas ces'fons filés, tendres & plaintifs de celui
d'Europe.
Il eft fi familier qu'il niche dans les maifons, & cette habitude
fe perpétue par leurs petits , qui viennent à leur tour
faire leur ponte dans les mêmes lieux oii ils font nés.
Il faut auifi compter parmi les oifeaux de la Martinique
qui ont une efpece de chant , celui qu'on appelle mujicien.
On lui a donné ce nom , parce que fon chant eft précifé-
{,n:ent une efpece de prélude , qu d'intonation régulière
méthodique.
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înéthodique. Il le recommence à tout moment , & on le
lui fait répéter aufli fouvent que l'on veut, en l'imitant.
Les notes qu'il chante, avec une mefure lente & grave ,
font ut, fol, la , fol, ut. Ce dernier/o/ & ce ¿cmicc ut,
ne font que des répétitions des deux premiers , fur le même
ton , fans monter à leur o£tave.
L'oifeau qu'on nomme merle à la Martinique , aprefque
toujours un cri femblable à celui des jeunes moineaux,
quand la faim les force de rappeller au nid leur mere.
Cependant à deux tems difterens de la journée , au lever
& au coucher du foleil, ils fe raifemblent en troupe fur un
même arbre , & alors ils ont tous une efpece de gafouillement.
Les Negres difent que c'eft parce qu'ils font la converfation,
pour fe rendre compte les uns aux autres de ce
que chacun d'eux a fait ou doit faire dans la journée.
Si l'on en tue un , bc qu'on le fufpende à quelque arbre ,
aufii-tôt on en voit arriver de tous les côtés qui s'approchent
de celui-là.
^ Les uns font entièrement noirs , on dit que ce font
les mâles ; les autres font gris, on dit que ce font les femelles,
C'eft fans doute en adoptant cette opinion vulgaire
, que le P. Feuillée a parlé de cet oifeau , quand il l'a
décrit. Des expériences que je rapporterai, quand je traiterai
plus particulièrement des oifeaux de ces liles, prouvent
, fi je ne me trompe , que les merles de la Martinique
îie font gris ou cendrés que quand ils font jeunes.
Ces trois oifeaux dont nous venons de parler , font les
feuls auxquels nous avons reconnu quelque efpece de chant,
de ramage ou de gafouillement.
Mais parmi les autres , il en eft un remarquable , cVft le
fffleur de montagne. On lui a donné ce nom , parce qu'il
imite parfaitement le fifflet de la voix humaine. Il fe tient
dans les bois. On croit toujours , quand on l'entend , que
c'eft un homme qui-en appelle un autre. Il n'y a point d'étranger
qui n'y foit trompé.
s i l'on parcourt les récapitulations du mois de décembre
, on verra d'autres oifeaux que le roffignol & k merle.
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