N e ccnnoiiTent
point la pudeur.
N'ont aucun vêiement
poui- l'un
ni l'autre lexe.
Viennent dans
cet état à la Martinique,
Leurs voyages
îtir mer.
Leurs canots;
Comment ih gararitiiîènt
leurs effets
du naufrage.
Leur habileté à
aaa;er.
50 VO Y A G E
ouvrage qu'on n'admire pas, n'infpire aucun intérêt de counoitre
ion auteur,.
La pudeur efl: inconnue aux Caraïbes, Ils n'ont pas même
de terme dans leur langue pour l'exprimer..
On peut les peindre , hommes &c femmes, comme on ;
peint les amours , nuds armés de fléchés & d'un carquois ; .
il ne s'agit que de déplacer le bandeau. Ce léger vêtement,
le ieul auquel ils font habitués, annonce par l'épargne qu'ils
y mettent, qu'ils ne s'en fervent que par complaifance pour
les Européans ; il fuffit à peine pour tromper fur leur fexe,.
_ C'eft dans cet équipage lefte & peu embarraiTant, qu'ils -
viennent a la Martinique dans les autres liles , faire un
petit commerce proportionné à leur génie & à leurs beloins.
Ils nous apportent quelques-uns de leurs ouvrages ,
des produdions de leurs terres , ou les fruits de leur chaiTe
& de leur pêche. Ils achètent en retour des fabres, des fufiJs
, des couteaux , & fur-tout de cette eau-de-vie de cannes
a fucre, que l'on appelle taffia. Ils aiment paffionnémentr :
les liqueurs fortes^-
Ce commerce , ainfi que leurs voyages, fe borne à cette '
eipece d'Archipel. On dit pourtant que quelques-uns vonC
tous les ans dans le continent de l'Amérique, •
Ils font leurs voyages, fur mer dans, des canots d'une
conltruaion particulière , que l'on nomme pirogues. Tout :
ce qu'ils portent eft attaché au-dedans du canot ^fi le mauvais
tems les furprend en voyage & fait tourner la pirogue,
lisie jettent a la nage dans le même moment , ôc la retournent,
fans perdre aucun de leurs eiFets.
S'ils donnent paiTage à quelque Eurspéan qui ne fâche
pas nager, il y a toujours quelques^.ms des leurs prépofés •
pour veiller à fa confervation.
Il n'eit point de plus habiles- nageurs. C'eft un fpedacle
amulant de les voir occupés à cet exercice dans les mers^
les plus courroucées, au milieu des lames les plus effrayantes.
Ils ont encore aiTez d'adreiTe pour fe défendi-c :
en nageant contre les requins ôc les awres poiiTons voraces .j,,
Facultés de leur
ame : leurs fenfations
, plaifirs &
peines.
A L A M A R T I N I Q U E . ^î
avec un couteau qu'ils tiennent à la main. Ils accoutument
leurs enfans à cet exercice dès leur plus bas âge.
Comme ils n'ont que les plaifirs des animaux, ils paroiffent
n'avoir auiîî que des peines fcmblables aux leurs. En
font-ils moins heureux ? Ces hommes fimples n'ont^MS
multiplié comme nous les objets du bonheur , &: par
féquent les obftacles pour y parvenir. Leurs deiirs font bornés
, leurs befoins font en petit nombre , ils font facilement
fatisfaits. Ils n'ont que le néceiTaire , & ne connoiflent pas
le fuperflu. Les uns ne font pas humiliés pour élever les autres.
Ils ne favent ce que c'eft que la diftin£tion des grands
& du peuple. Ils fe regardent tous comme les enfans d'un
même pere ; ils méritent également de la patrie , en concourant
tous également dans l'occafion pour la défenfe de
la caufe commune.
Leurs yeux ftupides font le vrai miroir de leur ame ; elle leur indolence,
paroît fans fondions , leur indolence eft extrême. Jamais
de foucis pour le moment qui doit fuccéder au moment
préfent.
Ils paiTentleur vie tantôt accroupis, tantôt couchés dans Leurs occupations;
ces fortes de lits fufpendus , que l'on connoît fous le nom
de hamacs , à dormir ou à fumer. La faim les oblige d'aller
chercher leur nourriture à la pêche ou à la chaile ; ils rapportent
leur proie chez eux , leurs femmes l'apprêtent.
Elles font chargées de tout le travail ; elles ne mangent
point avec leurs maris , ils s'en croiroient deshonorés. Les
moeurs des Européans les ont rendu peut-être un peu moins
farouches fur cet article, ih mangent avec elles quand ils
•viennent dans nos Ifles. Peut-être auiTi n'en ufent - ils de
même, que parce qu'il leur feroit incommode de faire autrement
dans leurs voyages. Nous n'avons pas changé fur
-d'autres objets leurs moeurs ni leurs habitudes.
L'amour paroit être pour eux comme la foif ou la faim. Leur amoar.
Jamais il ne leur échappe aucune attention, jamais la moindre
démonftration de tendreffe ou d'amitié pour ce fexe iî
recherché par les nations policées , fi avili par celles qui
ne fuivent que la nature.
G ij
Celles de leurs
femmes.