Les hommes &
les femmes n'ont
point de couleurs.
L'air & les alinien5
y contri-.
b^ieau
g. VO Y A G E
fi peu de précautions , qu'il cft fort rare qu'avant de fe marier
, elles ayent évité ce mauvais état de fanté , que l'oilfait
être une fuite des fuppreffions menftruelles.
Les hommes & les femmes n'ont point de couleurs , avec
cette diflérence que le teint des hommes eft prefque toujours
pâle ou bilieux par les fuites des maladies, ou brûlé
par les grandes chaleurs ; mais parmi les femmes , il eft fort
ordinaire d'en trouver de très-blanches , quoiqu'elles ne
foient pas occupées d'elles-mêmes comme les Européannes.
Elles fe donnent fi peu de foins de plaire , elles font fi peu
de cas des artifices & des moyens empruntés dont h iexe
fait ufage en Europe, qu'elles ne cherchent point à déguifer
ce défaut de couleurs, - L'ufage du rouge n'eft point encore
établi pour les femmes qui ne veulent pas être délignées ,,
de forte que leur blancheur n'eft pas animée comme en
Europe , e le n'a pas cet air de vie qui lui donne tant-d'éclat
& tant d'agrément.-
L'air du pays, & les alimens , contribuent fans doute
beaucoup à cette privation de coulcurs.
L'air y eft dévorant & falin. Si l'on refte expofé au^vent
du côté de la mer , fur les habitations qui en font voilines
on a bientôt les levres feches & ialées.
Les alimens y font prefque fans fuc , U la plupart des-^
perfonnes, hommes & femmes , préfèrent au pain La farine
de magnoc , qui contribue peut-être plus que tout autre aliment
, à TappauvriiTement du £ing , & à cette pâleur du^-
teint,
( On fait que cette farine n eft autre chofe que la racine
d'une plante appellée magnoc ; on fait râper cette racine ; ,
après en avoir enfuite exprimé tout le jus qui eft un poifon^ ,.
on la fait riiioler fur le feu ). Nous aurons occafion d'en>
parler dans d'autres mémoires.
Il pa oîtra furprenant que dans un pays auffi chaud , les •
hommes ayent beaucoup d'appétit, & que les forces de leur
eftomac y puiiTent répondre.
Il n'en eft pas de même des femmes ; elles mangent-Crespeu,
moins encore que dans d'autres climats..
A L A M A R T I N I Q U E . S3
L'un ôc l'autre fexe dans les repas fait un ufage prefque
iKabituel des liqueurs les plus fortes.
' ' de café qi
Malgré la quantité que l'on prend habituelle-
ment dans nos liles , on y confomme beaucoup de cho-
Frcquent u'àge
des liqueurs.
Et du chocolat« ]
colat. Plufieurs perfonnes en prennent l'après-midi , deux
ou trois heures après le dîner. On en donne aux enfans qui
font encore en nourrice.
Il n'entre point ordinairement de vanille dans cette boif-
•fon ; c'eft le cacao pur que l'on réduit en pâte. A mefure
qu'on remployé , on mêle à cette pâte la quantité de fucre
èc de canelle que chacun demande.
Cette canelle , quoiqu'en petite quantité , peut ranimer
îaétion du cacao ; cependant je croirois volontiers que
cette boiiTon prife fréquemment, doit être plus nuifible
que favorable dans des pays chauds , fur-tout en y mêlant,
comme à l'Amérique , un jaune d'oeuf que l'on fait bouillir
avec le chocolat ; ce qui le rend plus nourriiTant 6c plus
difficile à digérer.
Des maladies particulières aux Negres,
Entre les maladies qui font particulières aux Negres , Maladies de»
les plus communes les plus remarquables font le mal Negres,
d'ejiomac & les pians.
Ce qu'on appelle aux Ifles mal d'efiomac , eft une vraie Mal d'ejiomac j
.cachexie dans tous fes fymptômes , & fe termine comme ce que c'eft.
elle par l'hydropifie. On regarde comme perdu un Negre
qui en eft attaqué , quoiqu'on en guériiTe quelques-uns ; le
plus fouventils y retombent peu de tems après leur guérifon.
Leur teint & toute leur peau devient olivâtre, ou couleur
de feuille morte ; leur langue blanchit ; ils font eiFoufiflés
dès qu'ils marchent, le moindre mouvement les met
hors d'haleine ; ils fentent de la douleur à la région épigaftrique
; & comme les Negres confondent toutes ces parties
avec l'eftomac , & qu'ils fentent en eflxt une chaleur & un
tiraillement dans l'eftomac , produits par une grande faim ,
ils ont nommé cette maladie mal d'ejiomac. Le fommeil
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