trois rangées de dents, dont celles du milieu font les plus groffes;-la
langue eft. aùffi armée, de fix à huit dents. Le nez & le front font d’un,
brun foncé ; les joues jaunes mêlées de verd. L’oeil eft de moyenne
grolfeur; la .prunelle eft noire & bordée de rouge; l’iris eft blanc, avec
une bordure noirâtre en forme de croiffant. Le corps eft étroit ; le dos
rond, garni de taches noirâtres, mais qui font fans bordures. La ligne
latérale eft droite, étroite & nofre. Au-delTous de cette ligne, les côtés
font d’un verd jaune; au-deffus ils font d’un jaune d’or. Le ventre & la
gorge font blancs. Le corps de ce poiffon eft couvert d’écailles très-petites
& de taches rondes, qui contribuent à fa beauté. A la tête & au dos, elles
font noirâtres .& fans bordure; fur les côtés, elles font rouges & fur mi
fond bleuâtre. Les nageoires de la poitrine font d’un brun clair; celles du
ventre jaunes, & au-delfus de. ces dernières, on voit un petit appendice.
La nageoire de l’anus eft pourprée au premier rayon, qui eft le plus long;
le refte eft mêlé de gris & de jaune. La nageoire de la queue eft rayée
d’un jaune foncé; elle eft arrondie par le bout, & a une petite échancrure
au milieu. La nageoire adipeufe eft jaune, avec une bordure brune ; , la
nageoire du dos eft grife & garnie de plufleurs petites taches rondes &
couleur de pourpre.
Cette efpèce de truite eft la plus belle de toutes; les femelles fur-tout
fe diftinguent par l’éclat de leur beauté. Il eft remarquable que ce poiffon,
■ qu’on trouve dans toutes les parties du monde, & qui fe diftingue autant
par fa beauté que par fa.bonté, ait été inconnu aux anciens. Ni les Grecs,
ni Pline n’en parlent: l’évêque Aufône, qui vivoit au commmencement du
cinquième fiècle, eft le premier qui en ait parlé. ;
Ce poiffon a un corps étroit & allongé comme le brochet; il eft
ordinairement long d’un pied, & pèfe une demi-livre. On en trouve
cependant dans les étangs qui pèfent jufqu’à trois livres. On en a pris, en
Saxe un de huit livres, qu’on a envoyé à l'électeur George I, à çaufe
de la rareté.a).
La truite aime une eau claire, froide, qui forte des montagnes, qui
coule avec rapidité & dont le fond foit pierreux : voilà pourquoi elle fe
tient ordinairement dans les ruiffeaux qui prennent leurs fources. dans les
montagnes. Elle nage avec rapidité, & faute comme le faumon à cinq ou
fix pieds , pour funnonter les obftacles qui s’oppofent à fon paffage. Elle
vit de vers, de petits poiffons, d’efcargots, de coquillages ¿) & d'infeétes
aquatiques. Elle attrape, fur-tout fur lès bords des coufins c ) , des
mouches éphémères d') & des phryganes e). Elle fraie en Septembre;
a) Elemmirig. Jagerb. Tom. a. p. 410. c) Ephemera vulgata & culici formis. L.
b) LeJJèr a trouvé dans l’eftomac d’une truite d) Ephemera lutea. L.
une perle, qu’elle avoit apparemment avalé avec <r) Phryganæa grandis,
un coquillage. Richt. p. 878*
dans quelques,contrées en Octobre, & dans ce tems elle fe fourre entre
les racines des arbres & les greffes pierres , pour y dépofer fes oeufs. Les
truites multiplient beaucoup quoiqu’elles aient beaucoup moins d’oeufs
que les autres poiffons de rivière. . Cela vient fans doute de ce que les
poiffons voraces ne fe tiennent pas dans les eaux froides où vivent les
truites. Elles multiplieraient beaucoup plus encore, fi ¡¡les n’étoient pas
fi gourmandes, qu’elles ne fe dévoràffent pas les unes les autres; car on
a fouvent trouvé des jeunes truites dans la gueule des greffes, & que leur
voifin, l’ombre d’Auvergne, ne fut pas fi avide de leurs oeufs.
On prend ordinairement ce poiffon à la truble, à la louve, à.la naffe
& à la ligne. Il faut lever vite la première dès qu’on apperçoit que le
poiffon y eft entré ; fans quoi il fait un faut & s’échappe. . Pour l’attirer
dans la louve ou la naffe, on fe fert d’un appât qui fent fort, compofé de
caftoreum & de camphre : on fait fondre ces deux matières dans une poêle
ffir le feu, & on les brouille avec de l’huile de lin; on trempe un linge
dans cette matière; on le noue en forme de bourfe, & on l’attache dans
la louve ou naffe. Les lignes dont on fe fert pour pêcher la truite, doivent
avoir une verge forte & un fil aufii fort; car la truite fait des mouvemens
précipités qui pourraient caffer l’une ou l’autre. ||appât de l’hameçon doit
être fait avec de la chair d’éeréviffe, prife de la queue & des pattes# ou
bien des petites boules faites avec une partie de camphre, deux parties
de graiffe de héron, quatre parties de bois de faule pourri & un peu de
miel. On peut aufii prendre des vers de terre & des fang - fues coupées
par morceaux. Les anglois, qui aiment beaucoup la pêche à la ligne,
ayant remarqué que les truites fautent fouvent hors de l’eau, pour attrapper
les infeétes, forment des figures d’infectes / ) avec de la foie ou du crin;
& comme-la- nature à tous les mois de nouveaux infeétes, ils favent aufii
les changer de même. Ils agitent çà & là les faux infeétes fur l’eau attachés
à une ligne, & le poiffon vient s’y prendre.'- Cette pêche réuffit fur-tout
vers le lever du foleil, ou par un tems beau. On les prend encore mieux
au feu pendant la nuit. Mais dans le tems du frai, on n’a pas befoin de
tous ces moyens, elles fe laiffent prendre fort aifément, même à la main.
Dans les pays où la pêche de ce poiffon eft abondante, tels que les
pays de montagnes & ceux où l'on n’en trouve pas le débit , on les marine
comme les faumons, ou on les fale comme les, harengs g-). Dans nos
contrées, on les trouve dans diverfes petites rivières de la nouvelle-Marche,
/ ) Gn trouve dans Duhamel la manière de leurs. On fait les antennes & le velu avec de la
faire ces infeétes artificiels. (Voyez Traité des PS- laine, qu’on frotte avec de la cire de différentes^
ches, Tom. IL p. 53.) On emploie pour cela de la couleurs, de même que des poils pris fur différentes
foie, du crin, du fil, des boyaux de ver-à-foie, qu’on .parties des animaux. Les ailes fe font avec des
tire de la Chine, ou à leur défaut des boyaux de membranes minces ou des plumes d’oifeaux.'
chat. On forme le.corps avec du camelot,. de la g') Bornare, Diét. d’hifh.nat.Tom. XI. p. 499*
moire, & d’autres étoffes fines de différentes cou