voyages de Pierre Kalms r). Comme ce paffage convient parfaitement à
mon fujet, je le rapporterai tout entier.
Monfieur Franklin m’a raconté le fait fuivant: Dans les contrées de
la Nouvellè-Angletèrre qu’avoit habitée fon père, fe déchargent dans la
mer deux fleuves, dans l'un defquels on prenoit une grande quantité de
harengs, & on n’en prenoit point dans l’autre', quoique les embouchures
des fleuves fuffent affez près l’une de l'autre. Or on avoit remarqué qu’au
printems les harengs remontaient toujours dans le même fleuve, où on
les prenoit, pour dépofer leurs oeufs. Monfieur Franklin, qui demeuroit
entre les deux fleuves, effaya s’il ne feroit pas poflible de faire aufii
remonter les harengs dans l’autre fleuve. Pour cet effet, il prit les filets
où ces poiffons avoient attaché leurs oeufs, & les mit dans l’autre fleuve,
* où ils ont éclos. L’expérience réuflit; & danslalùite, on prit tous les
ans des harengs dans ce fleuve. Quoi qu’il en foit, ceci nous fait croire
que les poiffons aiment à revenir dans les endroits où ils font nés & où
ils font entrés pour la première fois en quittant la mer , afin d’y frayer-,
dès qu’ils y font accoutumés.
La cavité du ventre elt longue dans le hareng; la laite & l’ovaire font
doubles. Le dernier pefoit fept drachmes dans un hareng de moyenne
grôffeur, & contenoit 68,656 oeufs blancs & très-petits. Mais comme
Harmer n’en a trouvé que dix mille dans fon hareng, il eft vràilcmblable -,
que le poiffon qu’il avoit fous les yeux avoit été pris dans le tems du frai,
& qu’il avoit jetté une partie de fes oeufs. La véficule aérienne eft Ample,
& finit en pointe aux deux bouts. L’eftomac confifte en uiie peau mince?
le canal inteftinal eft droit, court & environné de douze appendices. Où
trouve de chaque côté trente-cinq côtes, & cinquante-fix vertèbres à
l’épine du dos.
Ce poiffon, quand il vient de. la mer du Nord fe nomme :
Heering, Hering, en Allemagne; en Dannemarc, quand il eft de la
Strohmling, quand il vient de la groffe efpèce?
Baltique. Strömling, quand il eft de la
Bückling, quand il eft fumé. petite. '
Strohmling, Strimmalas, Silk, Straale-Sild & Gaate-Sild, en
Konn & Kenge, en Livonie. Norwègé. "
S ill, en Suède, quand il eft de Kapifelikan, en Groenland,
la groffe efpèce; ■ Beltfihutfih; à Kamtfchatka.
Strôming ou Strömling, quand il Haring, en Hollande.
-eft de la petite. Herring, en Angleterre.
Sild, Quale-Sild & Grabeen-Sild, Hareng, en France.
H 0 ' Afin
r ) Reif, hach den nördlich. Provinz, vön Americ. Tom. II. p, 431.
Afin de complète- cet article, je finirai par dire quelque chofe du
commerce des harengs. Où l’exerçoit dans les tems anciens. Màdox
raconte r) qu’en 1195, la petite ville de Dunwich fut Obligée dë livrer
vingt-quatre mille harengs à la couronne. Au treizième lièclé-, les
Séelandois faifoient déjà un grand commerce des harengs; & à cet effet,
en las», ils obtinrent du roi d’Angleterre, pour eux &les Hollandois ,ÿfine
patente, qui leur accordoit le droit de pêcher fin1 les côtes d’Yarmouth s),
On voit aufii par un diplôme d’JÉrich V I , roi de Dannemarc, que dans
le treizième fiècle, on faifoit le commerce des harengs fur la Baltique.
Ce diplôme accordoit aux habitans de Hambourg un terrain dans Me dè
Schonen, où ils puffent s’arrêter pendant la pêche du hareng, & établir
leurs boutiques pendant les foires. On trouve encore dans ce fiècle des
traces de la falaifon du hareng r) : c’était fans doute la préparation des
harengs faurs. Au quatorzième fiècle, on établit aufii une foire de harengs
à Yarmouth ; Edouard I I I ordonna en 1357., que les pêcheurs hè
pourraient vendre leurs harengs que dans cette ville (/•}. Les Hollandois,
qui jufqu’alors avoient acheté les harengs fur les côtes, des pêcheurs
d’Écoffe, & qui les portaient de-là aux autres nations, fe trouvèrent
obligés d’envoyer eux-mêmes à la pêche fur ces côtes: car comme les
pêcheurs étaient obligés de porter leurs harengs au marché, avant que dé
les faler, il arrivoit que les harengs deveùoiëût mous & peu propres à
être portés dans d’autres pays. Selon Manières, le commerce des harengs
était aufii très-confidérable vers ce fiècle fur les côtes de Norwègë. Il dit
que dans ces contrées, on trouve plus de trois mille hommes raffemblés
au mois de Septembre & d’Oétobre, qui font occupés à la pêche du
hareng y). La pêche & le commerce du hareng forment encore aujourd’hui
une dés principales branches de l’induitrié nationale, qui rapporte par
an quelques tonnes d’or à ce royaume w). Quoique le bois de fapln, dont
les Norwégiens fe fervent pour fane les tonnes, communique au hareng
un goût qui n’eft pas généralement recherché; cependant les PôlôùôiS eù
font grand cas. Il y a quelques années que le Gouvernement danois
ordonna de fe fervn de tonnes de chênes pour encaquer les harengs : mais
l’on remarqua bientôt que le débit baiffa. Les Pôlonois ne trouvèrent plus
de goût aux harengs, & il fallut en revenu- au bois dé fapin. Chez les
Hollandois, cette branche de commerce eft encore plus confidérable :
voilà pourquoi Mr. Carlefon x) appelle la pêche des harengs une mine
d’or pour les Hollandois ; parce qu’en effet, ce peuple en retire plus d’or
& d’argent que l’Efpagne de fes mines. Aü Cottünencéméût, cette nation
r ) AnderJ.Gefch. des Handels. Tom.II. p.557. y ) Voyez l’article hareng dans l’Encyclopédie.
5) Reiclithum vonHolland. Tom. I. p. 44. w) Pontopp. Norw. Tom.. IL p. 171.
/) Anderf. p. ïj<S. ' a;) Sto'ckh. Magaz. Tom. I. p. 107. Hàmburg.
u) Le livre cité. V Magaz. Tom. IL p. 490.
Part. I. S s