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une tempête quelques jours avant quelle arrive : alors ils fe retirent en
foule dans les endroits du frai, lorfqu’ils n’en font pas éloignés. Les
pêcheurs ne fe trompent pas à ce figne.
Après le frai, ces poiffons retournent dans la mer fans conducteur &
fans ordre. Une chofe fort remarquable, c’eft que le retour de ce poiffon
indique fi l’hiver viendra plutôt ou plus tard. Quand le lavaret revient de
bonne heure, c’eft une marque que l’hiver approche ; quand il revient
tard, c’eft une preuve que les froids retarderont aufii a).?Le jeune lavaret
relie dans le Heu de fa naiffance jufqu’à ce qu’il ait atteint à peu près la
groffeur de trois pouces : alors il eft emporté par la violence de la marée
dans la mer, où il relie jufqu’à ce que le défir de la propagation le porte
à en fortir; ce qui arrive ordinairement à l’âge de cinq à fix ans.
Les ennemis de ce poiffon font, outre les poiffons voraces, le chien
de mer, qui les pourfuit fouvent jufque fur les côtes. De forte que les
pêcheurs efpèrent I une riche pêche lorfqu’ils apperçoivent ce monftre
marin près des filets qu’ils ont tendus. Outre cela ils dévorent eux-mêmes
leurs oeufs les uns les autres; ce qui eft fans doute une des caufes qu’il fe
multipüe fort peu.
Dans nos contrées, on pêche le lavaret avec le tramai!, Je grand
filet & la louve, dans l’Elbe, près de Boitzenbourg,. & en Pruffe dans le
Curifeh-Have. Les pêcheurs fuédois fe fervent de tridens.
La chair de ce poiffon eft blanche, tendre & de bon goût, & eft par
conféquent un des meilleurs poiffons de nos bomies tables. Dans les
endroits où la pêche de ce poiffon eft confidérable, on le fume ou on le
fale. Cette dernière préparation fefait delà manière:fuivante: Après avoir
nettoyé, vidé & lavé le poiffon en dedans & en dehors; on le met dans
une corbeille fur le ventre, afin que l’eau puiffe s’égoutter. Après cela on
le fale, on le place par couches; & après l’avoir laiffé ainfi pendant trois
fois vingt-quatre heures, on le lave de nouveau. Par ce moyen on en
ôte tout le limon & le fang; puis on le fale comme les harengs:, en
couches alternatives fur lefqueHes on met une pierre pour les faire porter
les unes fur les autres, & on les bouche, On conferve ainfi le bon goût
qu’ils ont, quand ils font prispar un tems frais. Quand on les a pris dans
la chaleur, il faut les fendre avant que de les faler; leur ôter la tête &
l’épine du dos, qui fe gâtent aifément, & donnent un mauvais goût
au poiffon.
Le lavaret n’a pas la vie dure; il meurt bientôt après être forti de
l’eau. On peut cependant le tranfporter dans des étangs, avec des
précautions. Il faut que le lac ou l’étang où on les met foit grand, profond,
& qu’il ait un fond de fable ; c’eft ce que prouvent les expériences de
a) Si les physiciens faifoient, en différens tems, des obfervations fur les mouvemens des poiflons,
ils pourroient en tirer des règles pour prédire les changemens du tems.
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Mr. Geißler b). Le lavaret qu’il tranfporta avoit deux ou trois pouces de
long; Dans l’efpace de quatre ains, il parviiâjïau poid d’une jufqu’â deux
livres. On voit à la bouche de ce poiffon, qui eft dépourvue de dents,
qu’il ne.vit point de proie, mais d’herbes, de vers, d’infeétes & d’oeufs
de poiffon. J’ai aufli trouvé dans fon eftpffiac des petits coquillages.
La peau de l’eftomac eft forte; le canal ihteftinal eft court, & à fon
commencement entouré de petits appendices. La laite & l’ovaire font
doubles ; l’ovaire contient environ 37,000 oeufs jaunes de la groffeur de
la graine de navette. J’ai trouvé cinquante-neuf vertèbres à l’épine du
dos, & trente-huit côtes de chaque côté.
Ce poiffon fe nomme :
Schnepel, dans nos contrées. Sihka, Sieg & Sia - Kalle, en
Siick & Stor-Siick, en Suède & Livonie,
en Sqrwège. ' t en France.
Helt, en Dannemarc.
Nous trouvons chez les anciens plufieurs poiffons qui portent le nom
de lavaret c), albula nobilis d ), albula coerulea, be^ola e), albulaparvaj)
Stfarra g'), & qui appartiennent au genre des faumons. Les ichtyologiftes
modernes, tels qu’Artédi, Linné, Klein, Wulff, Pennant & Martini h),
les ont tous décrit fous le nom de lavaret, & n’en font qu’une feule èlpèce.
Autant ^qu’on peut en juger par les mauvais delfins qui nous en relient,
on voit que ces poiffons font de différentes efpèces. Oh pèut‘ dire du
moins que le lavaret n’eft pas de la même elpèce que l'albula coerulea de
Gefiier; c’eft ce dont je me fuis convaincu par le defîin que m’en a
communiqué mon ami Mr. le doéteur Warirnann. ds St. Gall, & par la
defcription exaéte qu’il a donnée de ce poiffon i). Comme ce favant
m’enverra aufli les autres efpèces de faumons de fon pays, jedes pubfierai
aufli, afin de pouvoir comparer & concilier les auteurs.
Schoneveld décrivit pour la première fois notre poiffon en 1634, fous le
nom d'albula nobilis kl), & en donna un deflin affez fidèle, que Jonfion,
Willughby & Ruyfih ont copié.
i ) Schwed. Abhandl.-Tom. XV. p. ao8*
c) Rondel. P. II. p. 161. Gefiier. Aquat. p. 30.
Thierb. p. 187- a. Aldrov. p. 657. Jonft. p. 171.
Charlet. p. 163. Willughb. p. 183- Ray. P- 61.11.3.
Duhäm. Tr. des Pêch; Tom. II. p. 43a- Ppfcript.
des Arts & Mét. Tom. X. p. 376.
d) Gefii. p. 33. Schonev. p. 11. Jonfi. tab. 46.
fig. 1. Ray. p. 60. n. 1.
e) Rondel P. II. p. 163. Gefiier. Aquat. p.. 31.
Thierb. p. 187- A Aldrov. p. <558- Jonft. p. 171.
Charlet. p. 164.
f ) Gefiier. Aquat. p. 134. Thierb. p. 18 g. b.
Aldrov. p. 659. Jonft. p. 173. Charlet. p. 164.
Ray. p.. 61. n. 6. Willughb. p. 184.
g ) Rondel. P. II. p. 164. Gefii. Aquat. p. 3£r#
35. Thierb. p. 188* Aldrov. p. 663. Charlet. p. 164.
Jonft. p. 174. Willughb. p. 185.
A) Naturlexie. Tom. I. p. 171. '
ï ) Befchæft. der Gefellfch. Naturf. Freunde.
Tom. III. p. 103.
k) Ichthyol, p; la.