7 a D e l a T a n c h e .'
La nourriture de la tanche eft la même que celle de la carpe. Un bon
économe ne doit point fouffrir de tanches dans les étangs où il nourrit des
. carpes; parce qu’elles leur enlèvent la nourriture, & valent moins quelles.
La tanche eft connue fous différents noms. On la nomme:
. Scklei, en Allemagne. Skomacker , Linnore & Sutore,
Schumacher, en Livonie. en Suède. .
Kuppefch, Lichnis, Line&Schleye, Siider & Slie, en Dannemarc.
enEftonie. Tanche, en France. .
. Zeelt, en Hollande. . Tenca, en Italie-
. * Muythondèn, en Frife. . Tinca, en Elpagne..
Tench, en Angleterre.
Nous avons dit plus haut que ce poiffon prend une couleur plus claire
Ou plus foncée lùivant la couleur de l’eau où il féjourne & la nature du
fond. Ainfi Artédi, Klein & Gronov ne parlent pas exactement quand ils
regardent la couleur noire comme un caraétère diftinétif de ce poiffon.
Richter fe trompe auffi, quand il dit que les femelles font fujettes à
une purgation menftraelle f ).
Linné dans la première édition de fon Fauna, donne onze rayons à la
nageoire de l’anus de ce poiffon; mais dans la dixième édition de fon
Syflème, où il fe fert de chiffres au lieu de lettres pour marquer le nombre
des rayons, il en met vingt-cinq au lieu de onze. C’éft fans doute une
faute d’impreflion. Cette faute fe trouve non feulement dans la fécondé
édition de fon Fauna, mais encore dans toutes celles de fon Syflème, &
dans plufieurs ouvrages modernes g'). Elle eft d’autant plus pardonnable,
que Linné & ceux qui ont écrit après lui, n’ont pu examiner de nouveau
en particulier chaque animal dont ils donnent l’hiftoire. Mais quand le
traduéteur du Syftèjnc ajoûte, qu’il ÿ a onze à vingt-cinq rayons à la
nageoire de l’anus, chacun pourrait en conclure que les rayons des
nageoires varient dans ces animaux. Comme les poiffons fe meuvent par
le moyen de leurs nageoires comme les autres animaux avec leurs pieds
& leurs ailes; & comme dans les oifeaux le nombre & la grandeur des
plumes des ailes &de la queue, & dans les autres animaux, le nombre
& la grandeur des pieds & des doigts font proportionnés aux befoins & à
la ftructure du corps, il en eft de même dans les poiffons. Chaque elpêce
a autant de nageoires & de rayons ,que fes befoins le demandent; &
l’expérience confirme cette obfervation.
Une autre raifon qui fait que les auteurs ne font point d'accord fur
le nombre des rayons, c’eft la manière dont ils les comptent. L’un
compte les petits rayons Amples ; & l’autre ne les compte point. Le
barbeau
f ) Ichtyol. p. 303. , . g) Wulff, Pennant, Zückert ùFifcher.
barbeau & la brème peuvent nous en offrir un exemple. Linné donne
au premier onze rayons à la nageoire dorfale, & dit que le fécond
eft dentèlé. Mr. Leske; au Contraire, en compte douze, & fait le
troifième dentelé, »fous deux ont raifon.' M, Leske compté le premier
petit rayonj: que Linné omet. Artédi & Gronov donnent vingt-fept
rayons à la nageoire de l’anus de la brème. M. Leske & moi, nous en
comptons vingt-neuf. Les premiers ne comptent point le premier petit
rayon, & ne comptent que pour un les derniers, qui paroiffent en effet
unis l’un à l’autre.
Je remarque auffi qu’Artédi dans la defcriptioïif dés poiffons de la
Suède; c’eft-à-dire ceux qu’il a été en état d’obferver lui-même, leur
donne prefque toujours deux rayons de plus que Linné & Gronov; mais
que lorfqu’il les décrit d’après Willugbhy, qui ne compte pas non plus les
petits rayons, il eft d’accord avec les autres. Dans les poiffons jeunes ou
gras, il faut beaucoup d’attention pour déterminer exaétement le nombre
des rayons des nageoires du dos & de l’anus. Si le poiffon eft gras, la
peau eft épaiffe, & le premier rayon de la nageoire dorfale eft caché; &
voilà probablement la raifon pour laquelle Linné attribue au fécond rayon
de la carpe la dentelure que Gronov & Leske n’attribuent qu’au troifième.
Les raÿons des poiffons à nageoires molles font divifés vers les bouts
extérieurs en quatre à huit pointes. Or, comme les deux derniers rayons
de la nageoire de l’anus font pour ainfi due réunis, comme nous l’avons
déjà dit, il n’eft pas facile de les diftinguer dans les jeunes poiffons. A la
nageoire peétorale, les premiers rayons font longs, & les derniers très-
courts. Cependant je ne voudrais pas foutenir que le même nombre de
rayons fe trouve toujours dans chaque individu; car il peut arriver
quelqu’accident qui en divife ou détruife quelques-uns. Il fe peut auffi
qu’étant bleffés dans leur jeuneffe, plufieurs rayons fe réunifient & croiffent
enfemble; ou que quelqu’autre caufe inconnue en fafle croître un plus
grand nombre; de même qu’il arrive auffi quelquefois qu’on a plus de
cinq doigts à un pied ou à une main A).
On n’a pas eftimé également ce poiffon dans tous les tems. Les
Romains le méprifoient beaucoup ; & il n’y avoit que le peuple qui le
mangeât; comme on le voit dans Aufone z). Dans le royaume de Congo,
il pafle pour un morceau très-délicat : il n’y a que la Cour qui en mange;
& il y a peine de mort contre quiconque pêche une tanche & ne la porte
pas à la cuiline royale A). En Allemagne, elle n’eft pas généralement
A) J ai trouvé une fois une carpe qui avoit au ; proie. Le règne végétal nous offre une grande
coté une nageoire, qui commençoit vers celle du quantité d’exemples de cette nature,
ventre, & alloit jufquà la doriàle. J’ai vu auiïi ¿) Quis non eft virides vulgi folatia tincas
une plume d’oifeau qui avoit trois barbes ; & norit.
M. de Rochiro a trouvé fix ferres à un oifeau de k) Allgem. Reifen. 4ter B. p. <593.
Part. I X ‘