embouchures & au deffus des chûtes d’eau. C’eft ainfi qu’à Bàllyshanon
en Mande, on a fait au deffus de la chûte, une chauffée dans une éfpace
de deux à trois pieds. Derrière cette chauffée eft un enclos de bois, dont
l’entrée eft large, mais qui devient toujours de plus en plus étroit; de
forte qu’à la fin un faumon peut à peine y paffer. Les faumons qui fe
prennent dans l’enclos, en font tirés tous les matins avec un bâton armé
d’un trident, avec lequel on faiüt le poiffon. Par cette méthode, il n’y a
prefqu’aucün poiffon qui puiffe frayer. Pour remédier à cet inconvénient,
il faut lever les pieux dans le tems du frai. La pêche eft fi confidérable
dans cet endroit, que quoiqu’on ne vende ce poiffon qu’environ fept liards
la livre, le revenu monte cependant jufqu’à 600 liv. fterlings par an.
Comme ces poiffons s’avancent dans les fleuves rapides, on fe fert de
parcs pour les pêcher vers les confluents, afin de les attirer dans les
rivières par la rapidité que caufe le parc. C’eft ce qu’on fait, par exemple,
près de Deffau, dans la Mildè, qui fe jette dans l’Elbe a ):
Derrière ces parcs, & ordinairement aux auges des moulins, on
forme des caiffes à jour, qui ont une gorge comme les louves, le poiffon
qui fuit le courant y tombe & s’y prend. On met auffi des caiffes de cette
efpèce au-deffus des chûtes d’eau, afin d’y prendre le faumon lorfqu’il
faute. On forme auffi dans les petites rivières des eafcades'artificielles.,
pour y épier les faumons. Dans quelques endroits où le poiffon ëft obligé
de s’arrêter & de fe repofer à caufe de la rapidité du fleuve, on le prend
avec des trubles faites exprès. On le prend auffi âla ligne avec des vers,
des demoifelles & des petits poiffons. Dans quelques endroits, ¿comme
dans la Stolpe & le Wipper, il y a des éclufes, dont les pieux font placés
tout près les uns des autres. Le faumon qui entend le bruit que l’eau fait
en paffant entre ces pieux, faute par deffus ; mais comme il trouve de
l’autre côté une autre rangée de pieux plus élevés, il ne peut plus ni
avancer ni reculer. Quand on baiffe la vanne de ïéclufe, on voit ce qu’on
a pris. A Châteaulain ¿), on a un double rang de pieux qui traverfent
la rivière d’un bord à l’autre, & qui étant enfoncés à refus de mouton,
forment une efpèce de chauffée fur laquelle on peut paffer. Ces pieux font
mis les uns près des autres, & il y a encore de longues traverfes affujetties
■par des boucles de fer qui les retiennent, tant au-deffus qu’au-deffous de
l’eau. A gauche, en montant la rivière, eft un coffre fait en forme de
grillage, & qui a quinze pieds fur chaque face : on l’a tellement ménagé,
que le courant de la rivière s’y porte de lui-même. Au milieu de ce
coffre, & prefqu’à fleur d’eau, fe voit un trou de dix-huit à vingt pouces
de
a) Comme le faumon pafle fans entrer-dans la poifible de les y attirer, en -augmentant la rapidité
Havel & la Saale, c’eft apparemment parce que de ces rivières par des parcs de cette eipèce.
leurs eaux font trop tranquilles. Il feroit peut-être b) Petite ville de Bretagne
D u- £ À v m o n;.. 1 1 3
de diamètre, environné de lames de fer-blanc un peu recourbées, qui
ont la figuré de triangles ifocèles, qui s’ouvrent & fe ferment facilement.
Leur affemblage reffemble affez aux ouvertures des fourricières faites avec
du fil de fer. Le faumon conduit par le courant vers le coffre,' y entre
fans peine en écartant les lames de fer-blanc qui fe trouvent fur fa route,
& dont les bafes bordent le trou. CesTames en fe rapprochant les unes
des autres, forment un ■ cône, & elles s’ouvrent jufqu’à devenir un
cylindre. Au fortir du coffre, le faumon entre dans un réfervoir, d’où les
pêcheurs de retirent par le moyen d’un filet1 attaché pour cela au bout
d’une perche. Leur adreffe eft en cela fi grande, qu’ils ne manquent point
de retirer àuffitôt celui qu’ils choififfent de l’oeil;
Les faumons ne viennént pas toujours avec la même abondance. Quand
ils fe fuivent de loin, ils fe rendent tous dans le coffre, & du coffre dans
le réfervoir, fans monter davantage; niais quand ils arrivent par grande
troupe; les femelles attirant les mâles, qui redoublent d’ardeur & de force
pour les fuivre, alors ils paffent à travers les pieux qui forment la chauffée,
& avec une vîteffe incroyable : à peine les péut-on fuivre des yeux. Par
ce moyen Un grand nombre de faumons éehapperoit aux pêcheurs, s’ils
n’âvoient attention de s’embarquer dans de petits bateaux plats, & de fe
couler le long de la chauffée, :en y tendant des filets dont les mailles
font extrêmement ferrées. Tout le poiffon qui s’y prend eft àuffitôt porté
dans le réfervoir, où il fe dégorge, & acquiert un goût plus exquis c).
' Le faumon fe prend auffi dans des naffes de dix pieds de longs, faites
avec des branches de fapin, 'dont les baguettes ne doivent pas être
placées trop près les unes des autres, parce que fëifaùmon fuit l’ombre;:
& afin qu’il ne s’échappe pas entre les baguettes, on les garnit de ficelle.
La ficelle dont on fe fert pour les- filets à faumon, doit être auffi groffe
qu’une plume à écrire: les mailles auront quatre à cinq pouces de large,
& le filet foixante à cent braffes de long, & trois ou quatre de profondeur,
félon la grandeur de la rivière d). On en prend auffi bëaucoüp au feu
pendant la nuit.
Le faumon eft un excellent poiffon, fur-tout dans le printems quand
il eft gras : mais cette graiffe même fait qu’il faut avoir un bon eftomac
pour la digérer. Cependant il n’eft pas également bon dans toutes les
eaux. Celui du Rhin & du Véfer furpaffe celui de l’Elbe,- cependant fa chair
devient plustendre, dès qu’il a féjourné quelque tems dans la Milde qui fe
jette dans l’Elbe, près de Deffau. Il en eft de même du faumon de fOder :
il a une chair maigre & coriace; mais ceux qui fortent de cette rivière pour
aller dans la Varte, la Netze & le Kuddow, prennent dans ces rivières une
c) Bomare, Dift. d’hift. nat. Tom. X. p. 275. de filets dans le i3me Tome der Schwed. Abhand,
d) On trouvera des defcripdons plus au long p. 275— 290.
de la manière de pêcher le faumon dans toutes fortes
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