
impossible ; en un mot, c’est la métamorphose complète du
mammifère en poisson. Comme ce dernier, restreint à l’élément
liquide, il ne saurait vivre, changer de place, que dans
les abîmes de l’Océan.
Le besoin d’aspirer le fluide atmosphérique rappelant
constamment les cétacés à la surface des eaux, ils s’élèvent,
au moyen de la rame transversale qui termine la région
coccigienne, tandis que les membres pectoraux dirigent le
mouvement, et tiennent le corps en équilibre. Pour habiter
les eaux, ces mammifères jouissent de grands avantages ;
car leur domaine s’étend à de plus grands espaces que n’en
occupent ensemble tous les animaux vivant à la surface
sèche du globe; car trouvant d’un pôle à l’autre la température
des mers égale, en même temps que des alimens convenables,
ils se répandent sans difficulté sous toutes les plages
du ciel: semblables aux oiseaux qui, dans les régions de l’air,
s’élèvent au-dessus des forêts et des montagnes J les cétacés
franchissent les obstacles qui, sur les continens, entravent la
marche, relativement si lente des quadrupèdes. Multipliant
sous toutes les latitudes ; comme l’Océan couvre à peu près
les deux tiers de notre planète; comme les continens renferment
des terres incultes, de vastes déserts où rien ne rapp
elle la nature vivante, et que, sous l’équateur même, les
cimes des Alpes sont couvertes de neiges éternelles, on peut
hardiment assurer que l’empire des cétacés comprend trois
fois plus d’étendue que celui des animaux terrestres, même
plus que n’en occupent tous les corps organisés qui, pour
vivre, ont besoin d’être constamment plongés dans l’atmosphère.
Aussi le nombre des cétacés est infini. Distribués par
SUR LA STRUCTURE ET LE SQUELETTE DES CÉTACÉS. \ >
troupes innombrables, ils peuplent toutes les mers, depuis
les zones brûlantes de la ligne, jusque sous les glaces des
pôles.
A cette vue générale, qui embrasse tous les genres, substituons
le tableau des espèces; considérons les habitudes
qui les distinguent, et nous verrons quelques familles établies
sous les plus hautes latitudes, d’autres s’éloigner à peine des
tropiques, ou préférer les ardeurs de la ligne; quelques espèces,
constamment errantes, ne s’attachent à aucune sorte
de climat. Serait-ce le calme des mers polaires pendant les
solstices, et l’agitation des eourans entre les tropiques, l’abondance
d’une nourriture particulière à certaines latitudes, ou
d’autres circonstances qui attachent les cétacés à différentes
localités ; qui les déterminent à ne pas quitter les parages
arctiques; à préférer un ciel moins brumeux, ou à mener une
vie errante et vagabonde?... car il est de fait que les baleines
franches restent confinées aux latitudes presque inaccessibles
des pôles; quelles vivent en société sur les côtes du Groenland,
aux environs du Spitzberg, dans la baie de Hudson, et
par toute l’étendue de la mer glaciale. Elles ne sont pas
moins abondantes depuis le tropique du capricorne jusque
sous les glaces du pôle antarctique (i).
(i) Après avoir terminé cette description , nous avons vu que MM. Péron et
Le Sueur sont d’un avis contraire , et qu’ils prononcent avec certitude que des
amphibies marins qui peuplent l’Océan antarctique, il n’ en est pas un seul qui
ne se distingue essentiellement des espèces boréales analogues. Yoyez le 88e cahier
des Annales du Musée , page 3oo. L’anatomie seule éclaircira un jour cette
question importante à l’égard des cétacés comme des amphibies dont il est ici
question.